CONTREBANDE Phytos illégaux : la lutte por te ses fruits
S'il reste du chemin à parcourir, la lutte contre le commerce illicite de produits phytosanitaires progresse, en particulier grâce au rôle des douanes, renforcé par la loi d'avenir.
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Il y a tout juste un an, Agrodistribution publiait une enquête sur le commerce de produits phytosanitaires illégaux (1). Une problématique de taille, notamment dans le Sud, où les achats, rarement dans les clous, sont monnaie courante. Bonne nouvelle, la situation avance ! Avec un distributeur espagnol mis au pas, et une redevance pour pollutions diffuses (RPD), déclarée par les agriculteurs, maintenant à six chiffres. En novembre 2016, la campagne « Des phytos hors-la-loi, ce n'est pas pour moi », a été renouvelée, avec des encarts publiés sur lameteoagricole.net et sur Twitter, et des communications terrain des participants du groupe de travail à son origine. En sont membres le ministère de l'Agriculture, l'UIPP, Coop de France, la FNA, l'Onema, FranceAgriMer, les chambres d'agriculture et le PCIA (conseillers indépendants). Et il s'est étoffé en 2016 avec les douanes.
Avec la loi d'avenir agricole du 13 octobre 2014, les possibilités d'intervention des douanes sur le sujet ont notablement évolué. « Les produits phytosanitaires font désormais partie de la liste des marchandises reprises à l'article 38-4 du code des douanes », explique Pascal Pillitteri, inspecteur à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED). Avec ses trois collègues, il mène depuis fin 2014 une enquête d'envergure sur le commerce avec l'Espagne (lire encadré). « Le noeud du problème, c'est la déclaration de la RPD, la redevance pour pollutions diffuses », résume Dominique Oneto, inspecteur à la DNRED. Car il est parfaitement légal pour un agriculteur d'acheter un produit en Espagne, à condition que celui-ci bénéficie d'un permis de commerce parallèle, ou à titre personnel si le produit est sur la liste ad hoc, avec déclaration au préfet (listes sur ephy).
400 000 € de RPD en 2016
Dans les deux cas, il faut ensuite déclarer et payer à l'Agence de l'eau Artois-Picardie la RPD. Et autant dire que les agriculteurs ne se bousculent pas au portillon ! « Avant 2016, nous avions une cinquantaine de déclarants spontanés, pour un montant assez anecdotique », chiffre Mario Lestani, à la direction déléguée Redevances de l'agence, qui travaille activement avec les douanes depuis le début de l'année. Un protocole doit d'ailleurs être signé entre les deux institutions fin novembre, pour formaliser cette collaboration. Et une fois les acheteurs de phytos en dehors du territoire contactés par la DNRED, les demandes de création de comptes agriculteurs à l'Agence ont - étrangement - bondies. « Sur les producteurs identifiés, près des trois quarts atteignent le seuil de 100 € à partir duquel ils sont redevables de la RPD », précise Mario Lestani. Plus de 400 000 € ont ainsi été déclarés en 2016 par des agriculteurs, certes à relativiser face aux 138 M€ de RPD déclarés par la distribution agricole. Une somme de travail que l'Agence de l'eau Artois-Picardie a su absorber. « L'an prochain, on continuera cette consultation de professionnels en direct, tant que l'on n'a pas élaboré une procédure pour faire collecter la RPD par les distributeurs basés à l'étranger », conclut Mario Lestani. D'ici là, sensibilisation et information sont de mise, car la connaissance du sujet par les producteurs pèche, comme le montre notre sondage ci-dessus. Et peu de TC abordent le sujet (lire p. 16).
Marion Coisne
(1) A découvrir dans AD n° 266, décembre 2015.
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