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Dur, dur d’entretenir de bonnes relations de voisinage

Les agriculteurs sont de plus en plus chahutés par leur voisinage concernant leurs activités agricoles. Il devient urgent de rétablir une relation de confiance.

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L’anxiété et la peur vis-à-vis des activités agricoles gagnent peu à peu du terrain dans les campagnes françaises, là où pourtant elles ont toujours fait partie du paysage. D’après notre baromètre Agrodistribution-ADquation, la moitié (52 %) des agriculteurs sondés ont déjà rencontré des difficultés avec leur voisinage en raison de leur activité agricole. En particulier ceux ayant 150 ha de SAU ou plus (58 %)… mais à une fréquence modérée. Les causes de ces discordes sont nombreuses, qu’elles soient liées aux activités d’élevage ou végétales, entre odeurs, bruits, pesticides et bien d’autres…

Révolutionner la communication

Ces relations tendues sont bien souvent attisées par l’agribashing ambiant. La profession agricole relève ses manches et met en place des actions pour tenter de le contrecarrer, ou du moins limiter sa prolifération. Tout est question de communication, mais surtout de communiquer de la bonne façon. « Il est clair que l’on doit plus communiquer et ouvrir nos fermes », a expliqué Gérard Delagneau, président de 110 Bourgogne, lors de l’assemblée générale de la coopérative, le 6 décembre dernier. Christophe Barbier, éditorialiste à L’Express, et invité ce jour-là à témoigner devant les adhérents, a insisté sur ce point : « Il faut une révolution dans votre communication, dire ce qui a été fait, ne pas s’épuiser à le défendre mais surtout crier haut et fort ce qui est et va être fait. » Des démarches voient le jour, comme Agriloving émanant des jeunes agriculteurs de Bourgogne-Franche-Comté et accompagnés par les coopératives de la région, avec l’Alliance BFC et notamment Dijon céréales. Au travers d’une campagne au ton décalé sur les réseaux sociaux, le collectif a pour objectif de sensibiliser le grand public au travail des agriculteurs et aux pratiques agricoles. « Notre ruralité est en désarroi, il faut communiquer, s’adapter et utiliser nos moyens de communication d’aujourd’hui, et il y a maintenant Agriloving », a clamé Didier Laurency, président de Bourgogne du Sud.

« Engagez-vous aux municipales ! »

Ce dernier n’a d’ailleurs pas hésité à appeler ses adhérents à s’engager aux municipales pour plaider la cause du monde agri­cole : « Il serait précieux d’avoir des agriculteurs dans les conseils municipaux ». Même discours du côté de 110 Bourgogne, « à tous les agriculteurs, surtout engagez-vous aux élections municipales pour avoir encore la parole dans nos zones rurales », a déclaré son président, Gérard Delagneau.

Et s’il y a bien un sujet qui préoccupe davantage le grand public, ce sont les produits phytosanitaires. Selon notre baromètre, parmi ces agriculteurs qui font face à des difficultés avec leur voisinage, près de la moitié (48 %) évoquent des problèmes liés aux distances lors de leurs traitements phytosanitaires, notamment ceux ayant plus de 110 ha de SAU (58 %). Ce qui correspond tout de même, ramené à la base totale, à un quart des agriculteurs. En 2019, les fameuses ZNT auront en effet fait beaucoup de bruit.

Les chartes riverains se multiplient

Plusieurs maires ont pris part au débat, parfois de façon très radicale en interdisant l’épandage de pesticides de synthèse sur leur commune à moins de 150 mètres des habitations, comme le très médiatique maire de Langouët, en Ille-et-Vilaine, Daniel Cueff. Dans le cadre de la loi EGalim, une consultation publique a été lancée par le gouvernement en septembre dernier pour déterminer les ZNT et établir les règles d’élaboration des chartes départementales. Mais le monde agricole n’a pas attendu que le sujet des ZNT soit à la une, et encore moins les résultats de la consultation, pour se mobiliser. Ces dernières semaines, un grand nombre de chartes riverains ou de bon voisinage ont fleuri dans les départements. Leur objectif est avant tout d’apporter plus de transparence sur les pratiques agricoles et de mettre en avant les engagements des agriculteurs, afin d’apaiser les relations avec les différentes parties prenantes au sein des campagnes (lire encadré ci-dessus). À la fin 2019, ce sont plus de 20 départements qui ont déjà leur charte, dans les Hauts-de-France, en Bretagne, en Île-de-France, dans le Grand Est, en Occitanie, en Paca, dans le Centre-Val de Loire, en Auvergne-Rhône-Alpes ou encore en Nouvelle-Aquitaine.

Ces chartes de voisinage font également partie des engagements du Contrat de solutions avec l’élaboration d’un cadre national de charte duquel découleront des déclinaisons départementales, afin notamment de servir d’appui au dialogue entre agriculteurs et riverains. Pour Générations futures, elles sont cependant « d’une faiblesse criante ». L’ONG s’insurge sur le fait qu’elles soient déjà signées, « cela nous semble des plus étonnants alors même que les textes nationaux ne sont pas encore validés et promulgués ! » Il reste donc à vérifier si ces chartes sont en adéquation avec le texte de loi entré en vigueur au 1er janvier 2020.

Lucie Petit

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