Coop de France Philippe Mangin : Tous les maillons de la chaîne alimentaire souffrent
Le 3 septembre, à l'occasion de son point presse de la rentrée, Coop de France, par la voix de son président, Philippe Mangin, a fait part de sa profonde inquiétude par rapport à l'évolution des filières alimentaires. Morceaux choisis.
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Une situation économique jugée préoccupante. Les chiffres 2013 parlent d'eux-mêmes, avec une petite hausse de 0,6 % du chiffre d'affaires de l'agroalimentaire, une perte de 4 850 emplois et 316 défaillances d'entreprises, et surtout, pour la première fois, une baisse en volume de 2,2 % de la production agricole, Philippe Mangin s'inquiète : « Tous les maillons de la chaîne alimentaire souffrent. » Sans compter, souligne-t-il, le quatrième mois consécutifs de déflation des prix des produits alimentaires (- 1,8 % en juin) : « Beaucoup de clignotants passent au rouge. »L'embargo russe n'arrange rien. « Pour la France, la Russie ne représente que 8 % du total de nos exportations, soit un peu plus de 600 millions d'euros, rappelle Philippe Mangin. Mais pour l'Europe, c'est le second marché et il pèse près de 9 milliards d'euros. » Il craint un effet domino, avec l'arrivée en France des produits que les autres Etats membres ne peuvent plus exporter (notamment en fruits et légumes) et la mise en place de nouveaux circuits commerciaux avec des pays tiers (comme récemment le Maroc) pour répondre à la demande des Russes. Ce qui ne fera qu'accentuer les difficultés.Rassurer la filière céréalière. Concernant la moisson 2014 avec des OS à cran sur le Hagberg, Philippe Mangin martèle : « Nous satisferons la demande de la meunerie française, l'amidonnerie et l'alimentation animale et nous saurons aussi exporter les céréales. » Face aux « prévisions alarmistes des analystes de tous bords », il invite à se tourner vers les opérateurs, « nous, les coopératives », assurant que tout est mis en oeuvre. « Nous retrouvons les fondamentaux du métier, l'allotement, le travail des grains... » Et de pointer les 16 000 analyses déjà effectuées par sa coopérative EMC2 dont il est le président, depuis le début de campagne, pour répondre au mieux à la demande. La vraie inquiétude, selon lui, reste l'état du marché dans le monde avec une forte dégradation des cours.De profondes inquiétudes en porcs, en volailles et en fruits et légumes. Si la situation est jugée, par Philippe Mangin, nettement meilleure en élevage bovin, notamment en lait, où les investissements repartent, et dans le secteur viticole qui devrait tirer son épingle du jeu, il n'en est pas de même en porcs et en volailles. Et de pointer les difficultés de la Cecab et de sa filiale Gad en porcs, sur le point d'être racheté par Intermarché, le poids de l'endettement (180 millions d'euros) supporté par les opérateurs en volailles.« On va au-devant d'une catastrophe (...) on se demande comment on va s'en sortir », s'alarme Philippe Mangin qui déplore que les coops n'aient pas suffisamment accès aux dossiers pour soutenir ces filières... et qui n'est nullement convaincu que la grande distribution soit la solution avec le risque « d'activer une stratégie de produits d'appel qui peut pénaliser les filières à moyen et long terme ». Il remarque d'ailleurs qu'« il n'y a qu'en France que certains distributeurs peuvent devenir des acteurs industriels ».Quant à la filière fruits et légumes, « elle est carrément menacée », assène le président de Coop de France. Difficile de lutter contre la concurrence qui traverse les frontières et « contre laquelle, on ne peut rien ». Sans compter, l'embargo russe...Pour le maintien d'outils de régulation et l'émergence d'opérateurs forts à l'export. Philippe Mangin milite ardemment pour une « mise en oeuvre plus efficace des mécanismes d'intervention (stockage, fixation des prix de retrait...) et pour convaincre Bruxelles de mettre la main à la poche en sortant de la seule enveloppe agricole ».Quoi qu'il advienne, le président de Coop de France est également convaincu de la nécessité pour la France de « faire émerger des opérateurs plus forts à l'export, capables de rivaliser sur la scène internationale et en Europe ». Il appelle l'Etat « à muscler sa stratégie d'accompagnement des entreprises ». Et se met à rêver : « Pourquoi pas, des entreprises transnationales demain ? »Stopper la course effrénée à la baisse des prix des produits alimentaires. « Pas un décret de la loi Hamon (sur la consommation) n'est encore sorti ! Ce n'est pas sérieux », s'est insurgé Philippe Mangin, à la veille des (re)négociations des contrats avec la grande distribution. Et de craindre que « la course effrénée à la baisse des prix » ne continue, entraînant une érosion des marges, qui touche même aujourd'hui les grandes enseignes de la distribution.Il est urgent pour le président de créer un lien dans la durée entre l'industrie et le commerce, sur des préoccupations de court terme mais aussi de long terme : « Tous les maillons de la chaîne doivent se mettre autour d'une table pour un exercice de prospection, d'anticipation. » Et c'est notamment dans cette perspective de devenir un acteur reconnu (et entendu) que « nous sommes en train de créer un pôle agroalimentaire chez Coop de France », annonce Philippe Mangin.
Catherine Queheille
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