Lagerhaus : le rural, une seconde nature
Dans un pays de moyenne montagne comme l’Autriche, très rural, qui prône le bio, faire sa place dans les métiers de l’agriculture n’est pas chose aisée. La coopérative Lagerhaus y excelle.
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Lagerhaus, coopérative de 2nd degré, forte de 80 coopératives de 1er degré, est très diversifiée à la fois dans les métiers de la vente d’intrants agricoles et les métiers du grain, la vente et les services techniques associés au matériel de récolte comme dans ceux du jardinage, les matériaux de construction et l’ingénierie d’architecture intérieure, un réseau de magasin de plantes, d’animalerie et d’outils de jardin, et, enfin, un développement dans les énergies. Avec un chiffre d’affaires de plus de 3,5 milliards d’euros pour 10 000 salariés, elle est le deuxième groupe agricole autrichien. Lagerhaus a d’ailleurs noué des liens avec sa puissante voisine allemande, première coopérative européenne, la BayWa.
Toutes les coops de base ont un statut coopératif avec élection pour un mandat de quatre ans. Deux collèges existent. Le premier pour la stratégie, que l’on peut comparer à nos conseils d’administration. Le second, plus original, totalement libre de ses choix et de ses avis, est un organisme de contrôle composé à 60 % par des agriculteurs et 40 % par des représentants des salariés. Il surveille la bonne application de la stratégie, sa cohérence, le suivi des décisions et les relations avec le groupe Lagerhaus. « Il existe peu ou pas de conflit, assure Johann Auer, directeur de la région Eferding, coopérative de 1er degré. Ces deux instances rassurent les adhérents, le directeur et les salariés. »
L’agriculture ne suffit pas
Johann Auer est très clair : « L’agriculture et l’énergie représentent plus de 60 % de notre chiffre d’affaires. Si nous n’avions pas les diversifications en magasins verts et matériaux de construction, nous n’existerions plus. Les services aux agriculteurs sont un métier de pauvre qui demande des investissements incroyables pour si peu de résultats. » Dans sa région, il résume : « Nous n’exportons pas et nos céréales servent en interne entre les céréaliers et les éleveurs. Les prix proposés aux céréaliers ne sont jamais assez élevés et ceux pour les éleveurs le sont trop. » Difficile équation dans une région où la concurrence de petites entreprises sans structure est forte.
La coopérative avec ses consœurs du 1er degré a décidé de réduire la voilure en limitant le nombre de silos de proximité. « Nous avons fermé cinq silos lors des trois dernières années et ce n’est qu’un début. » Les fermes se sont regroupées en exploitations agricoles beaucoup plus grandes. La proximité de village n’est plus de mise. La distribution autrichienne est en train de faire ce que la française a entamé depuis une décennie. À cela s’ajoute le fait que le groupe a fortement investi dans le numérique. Les agriculteurs, surtout les jeunes, souhaitent acheter et vendre via le net. « Il ne faut pas lutter contre cette évolution, mais bien la suivre. Notre maison mère nous y aide. »
Du circuit court à l’architecture
Lagerhaus a créé de nombreuses marques qu’elle distribue dans ses magasins locaux comme à l’export. « Par exemple, nous avons créé notre propre marque “OKAY” de tondeuse tractée comme en petit tracteur, avec un excellent accueil de nos consommateurs. Les ateliers de machines agricoles ont depuis longtemps dépassé l’agriculture pour accueillir aujourd’hui tous les outils de jardinage à moteur, et même des voitures de particuliers. » La partie jardin, outre les fleurs et le petit matériel classique, commence une diversification sur les circuits courts. « Ce n’est qu’un début car nous avons des ambitions sur le sujet, confie Johann Auer. Dans un pays où l’on recherche du sens dans ses achats, cela supplante bien souvent le bio. »
Trouver un architecte pour sa salle de bains, une extension ou autres travaux d’intérieur, n’est pas aisé dans les milieux ruraux. « À la vente traditionnelle de matériels de TP, nous proposons une ingénierie d’architecture d’intérieure. Nous pouvons ainsi vendre du service et des consommables. Le public a plébiscité ce nouveau service. »
Pays très boisé, l’Autriche est un merveilleux réservoir de bois pour faire des pellets ou des centrales à bois. « Nous fournissons de la chaleur à plus de 2 000 habitants d’Eferding et avons développé un réseau de stations-service pour agriculteurs comme pour les particuliers, avec une particularité : il n’y a pas de personnel dédié. »
Christophe Dequidt
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