Login

« L’innovation n’est pas un gadget marketing »

Cédric FAIMALI

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Comment peut-on définir ce qu’est l’innovation aujourd’hui ?

Pour moi, il n’y a pas un mais plusieurs types d’innovation, elle a des gradients liés à leur disruptivité.

Il y a l’innovation qui est un renouvellement, avec la mise en avant d’une nouveauté, mais qui n’a pas réellement d’impact disruptif. On est dans la poursuite, un produit remplace un autre, et il n’y a donc pas de révolution en tant que telle, elle se met en place pour un renouvellement de gamme ou l’élargissement de l’offre. Après, il y a l’apport d’un nouveau concept qui s’inscrit dans une certaine continuité, avec la mise en place de nouvelles technologies complémentaires. On augmente le niveau de technologie qui accompagne l’offre, c’est déjà un cran au dessus, un premier pas dans la rupture. Et enfin, on a l’innovation de rupture, elle va dans des changements complets de pratiques. Cette innovation n’est pas seule, elle est forcément accompagnée d’un projet.

Qu’est-ce qui amène cette innovation ?

Il y a plusieurs choses qui mènent l’innovation, mais il faut déjà qu’il y ait une culture dans ce domaine. Il y a des entreprises qu’ils l’ont et d’autres non. Il y a des gens qui sont suiveurs et d’autres leaders, ce n’est pas un jugement de valeur, c’est vraiment un état d’esprit et c’est souvent le comité de direction qui l’impulse, une gouvernance qui est un peu visionnaire.

Ensuite, il y a toutes les contraintes qui vous obligent à vous renouveler, qu’elles soient techniques, réglementaires, de marchés et de débouchés, ou autres. Ce sont l’ensemble des contraintes qui font qu’à un moment votre produit ne peut plus se faire, donc vous êtes obligés de vous poser des questions. Ce sont les deux grands préceptes qui font l’innovation.

Et après vous avez aussi un motif non négligeable, l’innovation ça coûte cher, donc soit vous êtes complètement sous le joug de la contrainte ou alors vous êtes dans un fonctionnement où l’investissement innovation est un budget que vous allouez tous les ans. Ça veut dire que l’innovation on la prépare. C’est avoir une vision, se donner les moyens et derrière s’adapter par rapport aux contraintes du moment. Ce n’est pas un enjeu ou un gadget marketing, c’est bien plus que ça, c’est une culture. C’est ce qui va vous permettre de durer et d’être différenciant. L’innovation n’est pas forcément que sur les produits, elle est de plus en plus du service et donc on sort des canevas classiques. Il ne faut pas hésiter à le faire et ça n’est pas toujours évident pour les gens qui portent l’innovation.

Quels moyens doit se donner la distribution ?

C’est avant tout des moyens financiers, mais c’est aussi des moyens humains et des process. Il y a énormément besoin de mettre en place des process sur toute cette partie innovation pour faire émerger les besoins du terrain, faire de la veille, arbitrer entre les dossiers et être capable d’objectiver le potentiel d’une innovation, son marché cible et son modèle économique pour ensuite prototyper, tester. Beaucoup de structures ne l’ont pas aujourd’hui et c’est pour ça que beaucoup de choses avortent, les process ne sont pas robustes. L’innovation, elle a un coût et donc il faut à un moment être capable de dire stop ou encore, et ce n’est pas toujours évident.

Si les moyens sont trop élevés pour la structure, est-on capable de mutualiser ?

Certaines structures portent l’innovation typiquement dans les unions, mais il faut être sûr que les membres partagent un même projet et qu‘ensuite il ne soit pas l’enjeu de convoitises entre les uns et les autres, c’est un véritable problème. Et puis il faut que chacun accepte de mettre la main au portefeuille. L’innovation c’est bien, jusqu’au moment de la facture.

Et comment faire redescendre cette innovation aux agriculteurs ?

Ça ne sert à rien de vouloir amener tout le monde, c’est un tort qu’on peut avoir. Il faut d’abord viser un petit groupe d’agriculteurs motivés et capables d’emmener ce changement et, derrière, si l’idée est bonne, vous trouverez l’adhésion d’autres, surtout dans le cas d’innovations de rupture. Celle-ci doit déjà faire ses preuves parmi les convaincus, il faut aller en terrain conquis. L’innovation, globalement personne n’est prêt à ça donc il faut être capable de se l’approprier, il faut d’abord cibler un public pour tester la robustesse de l’innovation et ensuite l’étendre. Ça implique vraiment ces notions de ciblage, au niveau des agriculteurs et de leurs besoins, mais aussi des TC, et donc quelque part des notions de marketing derrière qui souvent font défaut.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement