« Que ce ne soit pas une période pour rien »
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Volontaire et déterminé, Philippe Grié, DRH du groupe coopératif Terrena, entend bien rebondir sur les pratiques de travail imposées par le confinement pour en faire un levier de progrès. L’enquête menée auprès des 1 400 télétravailleurs du groupe vient renforcer sa détermination à exploiter le champ du possible, sans pour autant mener une révolution puisque le télétravail concerne 10 % de l’effectif total.
Pourquoi souhaitez-vous faire un levier de progrès de la période de confinement vécue ?
Cette période nous amène à réaliser plusieurs constats. Le télétravail, mis en place pour 1 400 collaborateurs, a été bien vécu pour 95 % d’entre eux selon une enquête conduite en mai par Eminove. Ils sont près de la moitié à souhaiter sa généralisation. Plusieurs personnes qui y étaient opposées initialement en sont devenues des promoteurs et j’en fais partie.
Tout comme le travail à distance, qui est à distinguer du télétravail, a prouvé également son intérêt avec les réunions en visioconférence qui peuvent générer un gain de temps important. Et aussi un gain en fatigue, un gain en argent et un gain sur l’environnement avec moins de carbone émis.
En avril, sans compter les trajets domicile-travail, le groupe a économisé 2,1 millions de kilomètres avec le confinement. Sachant qu’à l’année, nous enregistrons 60 millions de kilomètres de déplacements, nous avons là un vrai levier, facile à mettre en œuvre, pour préserver notre environnement.
Tout un champ du possible existe en fait à distance. Ainsi, j’arrive fort bien à recruter sur Skype alors que je n’appréciais pas ce type d’entretien auparavant. J’ai quasiment autant d’informations qu’en présentiel. Dernier point : cette période offre une occasion extraordinaire pour retravailler le management.
En quoi le management va-t-il être revu ?
Des questions se sont posées aux managers durant le confinement : « Quel degré d’autonomie j’accorde à mes équipes, comment je mets en place un reporting, quel niveau d’information je leur donne… ? » Cette période doit être l’occasion de revisiter, de repenser nos modes de management.
Nous avons demandé aux managers de procéder avec leurs équipes à un bilan de cette période de télétravail en reprenant les questions de l’enquête télétravail : qu’est-ce qui a bien fonctionné, qu’est-ce qui n’a pas bien fonctionné et qui doit être amélioré, qu’est-ce qui n’a pas été fait et aurait dû être fait, quelles pratiques abandonner et quel plan d’action se donner ?
Parmi les 100 000 verbatims recueillis avec l’enquête, de très bonnes idées peuvent être reprises.
Des limites ont-elles cependant été relevées ?
Durant le confinement, le droit à la déconnexion a été écorné. Nous devons revenir à des pratiques plus sereines, plus respectueuses de la vie de chacun, par exemple, en fixant des horaires pour se contacter.
Pour les réunions à distance, si elles fonctionnent très bien, les collaborateurs les jugent trop nombreuses et ils étaient fatigués en fin de journée. L’intensité de travail est plus forte à distance.
Vers quelle organisation tendez-vous à ce jour ?
Tout ne reviendra pas comme avant et personne n’y aspire, même si les vieilles habitudes peuvent vite revenir. Nous souhaitons que chacun retrouve son lieu de travail tout en maintenant en partie le télétravail. La présence dans les open space est divisée par deux jusqu’à fin septembre.
Quant aux réunions à distance, plus personne n’imagine que cela puisse se passer autrement. Des webinaires avec 200 personnes pour faire descendre de l’information ont très bien marché. Avec à la clé un gain de temps extraordinaire.
Nous commençons aussi à explorer des sujets comme la formation à distance, les Moocs, l’e-learning, le co-développement à distance afin d’établir un mix entre le distanciel et le présentiel pour créer un système de formation efficace et efficient.
Nous ferons un bilan en octobre pour étudier comment ancrer les bonnes pratiques.
Le risque de fracture sociale est-il présent ?
Nous avons à être vigilants car le télétravail ne s’adresse qu’à 10 % de nos salariés. Or la qualité de vie au travail doit concerner l’ensemble des salariés.
Il faut être aussi attentif à la reconstruction du collectif et redonner au présentiel toute la valeur ajoutée qu’il doit avoir. Une réunion en présentiel doit notamment être différente d’une réunion à distance.
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