« 16 propositions pour accueillir les nouveaux porteurs de projet »
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C’est une analyse approfondie et riche de 107 pages que trois participants de la promotion 9 de la formation Aristée (pour cadres dirigeants des coops) ont réalisée sur les changements à opérer par les coopératives pour répondre aux attentes de nouveaux coopérateurs. Leur projet stratégique, clôturant ce cycle de formation, a abouti à un livre blanc déclinant seize propositions pour une relation nouvelle et durable avec la nouvelle génération d’agriculteurs. Il est présenté par deux de ses auteurs, Laurent Stéfanini, directeur du pôle élevage de la coopérative Océalia, et Martine Cazin, directrice des opérations à l’UNSCV (1).
Quels constats vous ont amenés à produire ce projet et ce livre blanc ?
Martine Cazin : Un chef d’exploitation sur quatre va partir à la retraite d’ici à 2030. Ce sont 100 000 fermes qui vont changer de main et autant de nouveaux agriculteurs adhérents qu’il va falloir installer. La situation actuelle et les 13 900 installations annuelles de jeunes (NDLR : chiffres 2021 de la MSA) ne permettent pas de répondre aux besoins pour maintenir les moyens humains de la production agricole. L’élevage est en première ligne de cette problématique, surtout en bovin.
Laurent Stéfanini : Et nous ne pouvons que constater que le tissu coopératif est au pied du mur. Les coopératives font face, pour la plupart, à une baisse du nombre d’adhérents et à un désengagement de la part des coopérateurs. Les capacités productives sont menacées et d’autres acteurs dans les filières arrivent avec des stratégies d’alliance invisible pour prendre la main sur la production.
M. C. : Aussi, comment capter de nouveaux adhérents, c’est-à-dire de nouveaux agriculteurs qui ont des attentes légitimes bien précises. Ils veulent un salaire régulier, une vie sociale épanouie, des vacances, être en phase avec leurs convictions et sont notamment attirés par le circuit court, le bio, les labels qualité. Et ils ne vont pas forcément faire toute leur carrière comme agriculteurs.
Comment se déroule votre livre blanc ?
L. S. : Nous avons souhaité partager notre analyse, réalisée dans le cadre de notre projet Aristée, avec le plus grand nombre en élaborant un livre blanc, publié sur le site de Calaméo et intitulé « Quels changements doivent opérer les coopératives pour répondre aux attentes de nouveaux coopérateurs ? ». Dans ce document, nous avons décliné quatre axes de travail, assortis de seize propositions au total : faire place aux néo-agriculteurs, c’est-à-dire les porteurs de projets non issus du monde agricole, renforcer le lien entre agriculture et société pour doper les créations et les installations, faire reconnaître la coopération agricole comme un acteur majeur dans le renouvellement des générations en agriculture, redéfinir le lien entre les nouveaux, les jeunes agriculteurs et les coopératives.
Quelles actions prioritaires mettre en place pour ce renouvellement ?
M. C. : Il est essentiel d’anticiper en accompagnant les cédants le plus tôt possible, c’est-à-dire au moins cinq ans avant la transmission de l’exploitation, dans la recherche d’un porteur de projet. Ils peuvent d’ailleurs céder non seulement parce qu’ils partent à la retraite, mais aussi parce que certains ont un autre projet professionnel. D’autre part, il faut se rendre suffisamment attractif et trouver les moyens d’accueillir les nouveaux porteurs de projets de moins en moins issus du monde agricole. Aussi, il va falloir bien communiquer pour capter leur attention et leur intérêt.
L. S. : On peut ainsi envisager la création d’un catalogue d’exploitations à céder et aussi d’un vivier de porteurs de projets. En termes de communication, il est important de se faire connaître comme un acteur clé, de s’impliquer dans toutes les initiatives territoriales. Et surtout, les coopératives doivent savoir accueillir à bras ouverts les néo-agriculteurs ; c’est d’ailleurs notre première recommandation dans le libre blanc.
Que proposez-vous pour bien accueillir les nouveaux porteurs de projet ?
L. S. : Déjà, être ouvert à l’inventivité : dire un grand « oui » aux projets innovants. Les coops pourraient ainsi proposer une offre à la carte afin de s’adapter à des projets innovants, voire atypiques. Puis s’intéresser au concept d’espace-test agricole, qui existe déjà, pour faciliter la découverte des exploitations et l’acquisition d’expérience. Il ne s’agit pas seulement de la phase de test chez un futur cédant pour faciliter la transmission de l’exploitation. On peut aussi envisager des tests d’activité dans des exploitations qui ne sont pas à transmettre afin de confirmer ou d’infirmer le projet.
Pour notre étude, nous nous sommes plongés dans tout cet univers de l’installation et nous avons découvert un nombre impressionnant d’initiatives, dont les espaces-tests agricoles. Nous avons aussi travaillé sur une thèse très bien documentée d’une doctorante italienne qui éclaire bien l’enjeu d’une nouvelle implication dans les territoires. Notre projet est une base de travail qui demande à être enrichie. Ce sujet du renouvellement des générations est un véritable bouillon de cultures et un sujet de société d’autant plus important que le modèle familial agricole est en recul. D’ailleurs le modèle coopératif agricole français en est issu.
(1) La troisième stagiaire de ce projet, Anne-Sophie Leclercq, était en déplacement à l’étranger lors de la présentation de leur étude stratégique au moment de l’AG du Dirca, le 29 avril dernier.
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Séduire les nouvelles générations d’agriculteurs
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