Le chanvre tisse peu à peu sa toile
Les enjeux actuels projettent sur le devant de la scène des cultures comme le chanvre qui, progressivement, prend place dans différents usages, notamment le secteur du textile qui rapprivoise cette fibre.Par Hélène Laurandel
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Les surfaces en chanvre vont « continuer à se développer ». Lors du congrès du chanvre en mai, le président d’InterChanvre, Franck Barbier, a voulu par ce propos rassurer dans un contexte de hausse des charges et des cours des autres productions. « Pour cela, nous devons développer la marge en chanvre en allant notamment chercher de la valeur et en la redescendant jusqu’au producteur. » La marge moyenne semi-nette s’établit en effet à 500 €/ha, incluant une aide couplée de 115 €/ha.
Depuis les années quatre-vingt-dix, le chanvre a vu ses surfaces multipliées par cinq, pour atteindre les 21 700 ha en 2022, faisant de la France le leader européen de cette culture dont les atouts agronomiques et usages multiples (infographie) pourraient la propulser si les facteurs limitants étaient levés.
28 M€ investis sur deux ans
La production devra être au rendez-vous pour répondre à la demande. D’ailleurs, trois nouvelles chanvrières se montent, dont une en Isère (lire p. 43), et deux autres multiplient par trois leur capacité de transformation, dont la Cavac. Au total, 28 M€ vont être investis dans les deux ans. Et ce, pour des débouchés multiples en progression, tel le textile qui absorbe 10 % du volume en fibres (1 % en 2019) pour des rideaux Ikea, chaussettes Decathlon, jean Levis, boxer et polo Slip français. « Une carte est à jouer pour cette culture, excellente tête d’assolement avec très peu d’intrants. Le marché en réclame, mais avec des garanties. Il va falloir construire des itinéraires techniques pour rassurer les marques et consommateurs », souligne Marie-Emmanuelle Belzung, déléguée générale à la Confédération européenne du lin et du chanvre. La voie est prise avec le label « France Hemp Fibers » lancé par InterChanvre en 2021 pour garantir le zéro phyto, le made in France et la traçabilité. DG de La Chanvrière, Pascal Morteau pousse un cran plus loin, estimant que « l’on ne pourra plus à l’avenir utiliser autant de coton, consommateur de pesticides et d’engrais. Des fibres comme le chanvre ou le lin ont vraiment un avenir devant elles, d’autant plus avec la croissance démographique prévue. »
Autre marché porteur, l’alimentation humaine, avec une graine riche en protéines, en acides aminés ou gras essentiels. Ce créneau bénéficie depuis deux ans d’un label « chènevis français ». Marché déjà plus installé, le bâtiment connaît une demande croissante en granulat pour le béton de chanvre. InterChanvre vient d’obtenir la validation de la feuille de route par le ministère du Logement pour élargir les règles professionnelles du chanvre aux constructions R + 7 (7 étages). Quant à la filière automobile, ses usages sont aussi en expansion avec une combinaison fibres naturelles de chanvre et thermoplastique dans dix-sept modèles de sept constructeurs, soit à terme 13 millions de véhicules qui éviteront l’émission de 100 000 t de CO2 grâce à une réduction de poids de 21 %.
Quant à la toute récente filière du cannabidiol (CBD), elle devrait s’organiser, depuis la nouvelle législation nationale (lire p. 42), pour un marché estimé à 770 M€ en France, dont la moitié en compléments alimentaires. Mais certains producteurs restent avec des fleurs sur les bras. Pour les extraits, selon Nathalie Fichaux, directrice d’InterChanvre, « le marché va bien ».
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