Être à l’écoute de leurs attentes
Les dernières générations d’agriculteurs ont des attentes multiples envers leur coop ou négoce, avec un trio gagnant pointé par notre enquête ADquation.
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Ne pas « leur imposer de solutions sans avoir écouté leurs attentes ». Ce propos tenu par Christophe Grison, président de la coopérative Valfrance, lors de la table ronde d’Agrodistribution, reflète bien ce que les nouvelles générations souhaitent avant tout : être écoutées. À l’occasion du deuxième forum des jeunes coopérateurs organisé par Coop de France Ouest en juin dernier, ces derniers ont bien souligné que « savoir écouter est la clé du succès pour nous attirer ».
Et si on s’y attelle, on découvre que leurs attentes sont multiples et plutôt fortes envers les coopératives et négoces. En effet, notre enquête ADquation-Agrodistribution révèle qu’au moins la moitié des jeunes agriculteurs interrogés ont cité comme prioritaires huit des neuf services que pourrait développer leur distributeur principal (voir ci-dessus). Avec plus de 70 % estimant prioritaires trois types d’accompagnement : la formation, le financement et l’aide au pilotage technico-économique de l’exploitation qui arrive en tête avec 74 % de citations en moyenne, 78 % pour les agriculteurs travaillant surtout avec une coop. Ces exploitants expriment globalement une attente plus forte que leurs collègues faisant affaire avec un négoce.
Est-ce que les coopérateurs ont, du fait de leur lien spécifique avec leur entreprise, une attente plus forte à son égard ? Est-ce que les agriculteurs clients de négoce sont dans un état d’esprit plus indépendant et plus autonome ? Ces derniers recherchent d’ailleurs de nouvelles ouvertures en étant plus friands de voyages d’études (50 %), ces prestations étant plus courantes dans les coopératives. Ainsi, chez Triskalia, « tous nos groupes jeunes en bénéficient », reconnaît Jean-Yves Deslandes, un des experts à l’installation du groupe breton.
Ouvrir les horizons
La formation Atouts jeunes en inclut également dans son parcours en emmenant les jeunes dans un pays de leur choix. Un point jugé crucial par Jean-Albert Massenet, responsable de cette formation, et pour lequel « il faut pousser les jeunes à aller voir ailleurs avant de s’installer. Ils peuvent ainsi s’ouvrir sur le monde, sur une réalité qui nous entoure et qui va peut-être arriver jusqu’à nous. Nous avons un groupe spécialisé dans la noix du Sud-Est qui vient de revenir du Chili. Ses participants ont découvert ce pays qui est le premier producteur de noix et mieux compris le marché en dialoguant avec les producteurs chiliens. Dans une agriculture qui se transforme en profondeur et très rapidement, il s’agit de trouver sa place et de s’y sentir bien. Le fait de voir autre chose est très important. »
Toutefois, à l’instant présent, le plus préoccupant est le volet économique pour lequel « on observe un manque d’accompagnement spécifique du jeune pour l’aider à calculer ses coûts de revient et ses marges brutes », remarque Jérémy Pettini, jeune agriculteur de la coopérative EMC2.
Besoin de formation en économie
Du côté d’Agrial, ce besoin est également souligné. Afin de compléter le programme Agriboost (lire p. 35), la commission Jeunes est en train de préparer un plan de formation à partir « de questionnaires et de jeux de post-it en réunion. Les thèmes qui reviennent en premier sont le financier et l’économique. On a besoin de se rassurer car la réalité n’est jamais pareille au PE (plan d’entreprise) que l’on a fait. Tout change rapidement », commente Sébastien Ballu, jeune coopérateur du groupe coopératif normand.
Mais que cette attente d’une aide au pilotage technico-économique soit aussi fortement exprimée dans l’enquête ADquation surprend Benjamin Viguier, formateur auprès des équipes de TC. Il estime en effet qu’en toute logique, « ce thème devrait être le cœur de métier d’un technico qui accompagne un agriculteur, s’ils sont dans une relation de partenariat ». C’est là que resurgit tout le débat sur la posture du TC (lire p. 31-34) et sur sa mission qui va être quelque peu chamboulée avec les nouvelles dispositions de la loi EGalim sur le conseil et la vente des produits phytosanitaires.
Rassurer sur les débouchés
Quoi qu’il en soit, coopératives et négoces ont une large marge de manœuvre s’ils veulent mettre sur pied un programme spécifique, ou consolider l’existant, pour épauler les nouveaux installés avant, pendant et après. Ce qui ne pourrait que renforcer leur légitimité sur l’accompagnement des jeunes. Une nouvelle dynamique se met d’ailleurs en place, avec des conventions passées avec l’organisation des JA, à l’image de ce que fait Coop de France, qui est en train de monter un observatoire des actions des coops en faveur des nouveaux installés. Dans ce mouvement, la question de la communication et du relais de l’information ne doit pas être négligée afin d’atteindre ce jeune public d’agriculteurs. Tout en élargissant les horizons afin de répondre aux attentes nouvelles, comme le bio ou l’agriculture de conservation, et aux nouveaux profils. Il s’agit également de personnaliser l’approche comme le suggère Jean-Albert Massenet : « Le jeune ne veut pas ressembler aux autres. Il veut bien être dans un écosystème et dans une communauté, mais il veut faire son projet. »
Les attentes sont en effet multiples avec un besoin d’être rassuré sur le revenu, donc les débouchés et le fonctionnement des filiales ou de l’aval, ainsi que le précise Sylvain Marcuard, du syndicat des JA : « Ce qui peut aussi sécuriser un jeune, c’est le chiffre d’affaires qu’il pourra réaliser. Et les contrats. » C’est là qu’il pourrait y avoir collusion entre le besoin d’autonomie des nouvelles générations et leur besoin de sécurisation qui peut impliquer une notion de contrats et donc de liens. Ce qui fait dire à Jérémy Pettini : « Je ne vois pas l’intégration comme un gros mot : ma coopérative propose des aides pour le financement d’ateliers d’engraissement en bovins viande et un prix garanti pour les animaux. Le jeune sait que s’il travaille bien, il se sortira un revenu décent malgré la fluctuation des cours, tout en ayant la propriété de son cheptel. »
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