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L'innovation pour satisfaire les marchés

Au cours des cinq dernières années, les semenciers français ont davantage investi dans la recherche et l'innovation. Retour sur investissement assuré ou fuite en avant ? L'innovation est en tout cas la clé pour répondre aux attentes du marché.

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La campagne 2016-2017 a été compliquée pour les semenciers. Les céréales à paille et les protéagineux sont probablement les espèces qui ont le plus souffert des très mauvais rendements de 2016. « Le marché est passé pour ces deux groupes d'espèces de 405 M€ en 2015-2016, à 341 M€ en 2016-2017, soit une baisse de 19 % », constate Philippe Silhol, chef du service statistiques au Gnis, le groupement national interprofessionnel des semences. Il avait déjà reculé de 9 % en 2015-2016. « Pour la campagne 2017-2018, on s'attend à un nouveau recul, estime François Desprez, président du Gnis. La campagne n'est pas terminée, mais de date à date, nous constatons une nouvelle baisse de 15 % par rapport à l'automne 2016. Les prix ne se sont pas relevés et la récolte a cette année été précoce et de qualité, deux facteurs qui incitent les agriculteurs à se tourner vers les semences de ferme. Le phénomène est général en Europe. »

Les surfaces emblavées en maïs et en colza ont aussi reculé en 2016-2017, entraînant une baisse des ventes de semences. Seuls les marchés des semences de betteraves, et des semences fourragères ont progressé en 2016-2017. Avec la fin des quotas betteraviers, les surfaces implantées ont augmenté cette année de 20 % en France, et le marché des semences fourragères a connu une embellie, il est passé de 174 M€ en 2015-2016 à 211 M€ en 2016-2017.

La clé pour intéresser les agriculteurs et leurs clients, et contrecarrer le marasme des ventes, est de répondre aux attentes nouvelles du marché par l'innovation. La plus forte est celle d'aider les agriculteurs à mettre en place des itinéraires pour leurs cultures moins dépendants de la chimie. C'est aussi contribuer à améliorer la qualité des aliments, en obtenant un blé auquel on aurait retiré la partie allergène du gluten, ou une pomme qui brunit moins vite une fois coupée. L'innovation est indispensable pour satisfaire les nouveaux besoins du marché. Les sélectionneurs français l'ont bien compris, ils investissent toujours plus dans la recherche. C'est en tout cas ce que révèle la dernière enquête structure conduite par le Gnis.

Des efforts plus importants en potagères et maïs

« Toutes entreprises confondues, le budget recherche des semenciers est passé de 235,8 M€ en 2011 à 395,1 M€ en 2016, soit un bond en cinq ans de 67 %, note Philippe Silhol. Au cours des cinq années précédentes, il avait déjà progressé, mais de 25 % seulement, si l'on peut dire. » Le montant que les entreprises semencières consacrent chaque année à la recherche en France, s'amplifie. Sans surprise, c'est le maïs qui mobilise les plus gros budgets, 120 M€ en 2016, juste devant les espèces potagères, 113,2 M€. Les oléagineux qui sont aussi, pour la plupart d'entre eux, des hybrides, viennent ensuite avec des investissements en 2016, de 66,4 M€. Les céréales à paille et les protéagineux n'arrivent qu'en quatrième position avec un budget recherche l'an dernier, de 55,5 M€, devant les betteraves sucrières et les pommes de terre.

Une faible progression des ventes en France

« Le ratio budget recherche par rapport au chiffre d'affaires est en moyenne de 13 % pour l'ensemble des sélectionneurs, soit un niveau équivalent à celui de notre précédente enquête », précise le responsable du Gnis. Ce sont les potagères avec un ratio de 25 %, et les céréales avec 15 %, qui mobilisent les plus gros efforts de recherche. En oléagineux, le ratio de 13 % est dans la moyenne, en maïs, 11 %, et en betteraves, 8 %. Le montant investi dans la recherche tombe à 7 % du chiffre d'affaires pour les fourragères, et à 5 % pour les pommes de terre. Les budgets consacrés à la recherche ont globalement augmenté, mais l'activité des entreprises aussi avec un bémol, cependant, les ventes sur le marché français ont peu progressé au cours des cinq dernières années puisqu'elles sont passées de 1,7 Md€ en 2010-2011, à 1,8 Md€ en 2015-2016. C'est le chiffre d'affaires à l'exportation qui a fortement progressé. Il est passé pendant le même laps de temps, de 1 à 1,6 Md€.

Quid des nouvelles techniques d'amélioration des plantes

Au sein des entreprises, les effectifs ont augmenté au cours des cinq dernières années de 26 %, et c'est là encore le nombre de salariés dans les services recherche et expérimentation qui a le plus progressé, + 38 % entre 2011 et 2016. « Les effectifs recherche ont progressé principalement pour le secteur amont et laboratoire, + 4 %, et biotechnologies, + 42 %, souligne Philippe Silhol. L'activité de sélection reste cependant toujours exigeante quant aux salariés sur le terrain, qui représentent 69 % des effectifs totaux impliqués dans la recherche en 2016, contre 75 % en 2011. »

L'innovation pour les semenciers porte bien sûr sur la recherche d'amont et la création de variétés, mais pas seulement. Elle porte aussi sur la production de semences qui doit elle aussi répondre aux enjeux de conduite avec moins d'intrants et aux évolutions climatiques, à la conservation des semences, l'introduction de nouvelles espèces ou l'accompagnement de nouveaux créneaux comme le bio... Sans oublier d'inclure le marketing et la communication.

Reste à savoir si les semenciers français et européens vont pouvoir faire jeu égal avec leurs concurrents des autres continents en matière d'outils de sélection. La possibilité pour eux dans les années à venir, d'utiliser les nouvelles techniques d'amélioration des plantes, est en train de se jouer à Bruxelles.

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