Les challengers montent au front
Les outsiders du marché profitent de leur appartenance à des pays qui n'ont pas peur d'investir. Ils annoncent leur volonté de renforcer leur activité en France.
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On entend parfois que le marché français des engrais est oligopolistique. Ce n'est pas vraiment le cas. Au-delà du trio de tête qui se partage la moitié du chiffre d'affaires de l'industrie française, un certain nombre d'autres acteurs ont dépassé les 100 M€ de CA en 2011-2012. Parmi eux, des entreprises déjà bien implantées en France comme ICL Fertilizers Europe (potasse, superphosphates, PK et NPK), Litfert (engrais azotés), Seco fertilisants (NPK et ammonitrates) ou le spécialiste des produits à base de potassium et magnésium K + S Kali France (1). Même s'il est en décroissance, le marché français intéresse toujours à en croire les récents investissements des capitaux étrangers. Et il ne fait guère de doute que ceux qui détiennent les ressources en matières premières seront les acteurs de demain.
Des gammes complètes
Sans même parler de Borealis, filiale à 64 % du fonds souverain d'Abu Dhabi (Ipic), qui a racheté l'usine alsacienne d'engrais azotés Pec-Rhin et qui l'a intégrée à sa filiale Linzer agro trade, deux mastodontes ont récemment mis un pied en France. D'abord, l'égyptien OCI, dont la division engrais a produit en 2012 environ 7,7 Mt d'engrais azotés. Détenue en majorité par le milliardaire égyptien Nassef Sawiris, OCI est la plus grande entreprise égyptienne (86 000 collaborateurs dans le monde). Clairement, OCI Agro a pour objectif de développer le marché de l'urée en France, où il y encore un potentiel, puisque l'urée n'y représentait que 10 % de parts de marché (néanmoins dans la fourchette basse de ces dernières années) des engrais azotés simples livrés la campagne passée. La mise en service de l'usine Sorfert à Arzew, détenue à 51 % par OCI et 49 % par Sonatrach, devrait largement y contribuer. Initialement programmé pour le début de 2012, mais ajourné au « premier trimestre 2013 », cet outil disposera à terme d'une capacité de production de 1,2 Mt d'urée et de 0,8 Mt d'ammoniac par an. Aujourd'hui, sixième opérateur mondial sur le marché des engrais azotés, l'égyptien maintient son objectif d'être dans les trois premiers d'ici à 2015. Ceci grâce à un projet de construction de deux unités majeures, l'une dans l'Iowa aux Etats-Unis (prévue pour 2015) et une autre au Brésil. En Europe, le dilemme pour OCI est juste de trouver l'équilibre entre ses activités urée et ammonitrates, dont il est aussi producteur.
L'autre mastodonte en présence est EuroChem. Le groupe emploie 22 000 personnes dans le monde et dispose d'un large portefeuille : urée, ammonitrates, solution azotée, NPK, NP, DAP, MAP... Le premier producteur russe d'engrais et onzième mondial (7 Mt d'engrais azotés et 3 Mt d'engrais phosphatés) prépare aussi l'exploitation future de deux gisements de potasse, dont la commercialisation pourrait débuter d'ici deux ans.
Seco vise les spécialités
Seco fertilisants, de son côté, souhaite « prendre le contre-pied de cette tendance à la concentration de plus en plus grande, et à la standardisation de l'offre faite aux agriculteurs ». Certes, l'entreprise continue à distribuer bon an mal an 75 000 t d'ammonitrates et de NP fabriqués par ses actionnaires Yara et Prayon. Mais à partir de son outil industriel « très flexible », de Ribécourt (Oise), qui produit 300 000 t d'ammonitrates soufrés (28 %) et de NPK granulés à base nitrique (72 %), Seco a commencé à transformer il y a deux ans une partie de sa gamme en produits de spécialité. Ceci par l'adjonction d'oligo-éléments (Ca, Na, Se...) « mis dans des doses qui sortent de l'ordinaire ». Ce secteur est passé de 10 % de la gamme l'année dernière à 15 à 20 % actuellement. André Thissen, directeur commercial de l'entreprise, aimerait qu'il soit porter à 30-40 % d'ici à 2014. « On se situe à mi-chemin dans ce développement source de croissance et de fidélisation », se félicite-t-il. Seco va installer en 2013 une machine pour 200 000 € qui permet de travailler de manière plus précise et plus sûre ces oligo-éléments. Du côté de la force de vente, démarche originale, Seco fertilisants rémunère une quinzaine d'experts agronomes indépendants, bien formés sur ses produits, pour accompagner les TC de ses clients distributeurs. Ils s'ajoutent à son équipe commerciale constituée d'une quinzaine de personnes.
Un peu plus loin, on trouve aussi des acteurs comme Eliard-SPCP (avec Fertemis) et Fertinagro. Ce dernier, premier fabricant de fertilisants complexes espagnol, vient d'ailleurs d'investir sur le site de Tarnos (Pyrénées-Atlantiques) dans une installation de mélange et de conditionnement, mais a priori positionnée davantage pour l'export. Quant à Tessenderlo, ce groupe annonce la fermeture de son unité de sulfate de potassium de produits chimiques de Loos (Nord), mettant en cause « un environnement concurrentiel de plus en plus difficile et une baisse continue de la demande », qui n'offrent « aucune perspective d'amélioration ».
(1) K + S Kali France, Litfert et ICL Fertilizers Europe n'ont pas souhaité communiquer sur leur activité.
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