HERBICIDES CÉRÉALES Chute drastique du désherbage d’automne
Les mauvaises conditions météo ont souvent empêché les applications d’herbicides sur les céréales. Le marché à l’automne recule ainsi de 34 % par rapport à la campagne précédente.
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Les précipitations tombées à partir du mois d’octobre 2023 n’ont pas permis de semer la totalité de la sole prévue en céréales d’hiver. Les surfaces reculent ainsi de 11 % en 2023-2024 par rapport à la campagne précédente, à 6 Mha. Cette baisse atteint également 11 % pour le blé tendre (4,2 Mha). Les stratégies de désherbage des agriculteurs ont ensuite été bouleversées par le mauvais temps persistant. « Environ une parcelle sur deux n’a pas du tout été désherbée à l’automne », révèle Laurent Magnant (Ascenza). « La prélevée a pu être réalisée assez correctement, contrairement aux passages en postlevée précoce qui ont été compliqués à positionner et sont réduits de moitié par rapport à l’automne 2022 », note de son côté Alice Nolli (Bayer CropScience). Au total, plus de 1,5 Mha n’ont pas pu être traités à cette période par rapport aux campagnes précédentes. Une partie des produits d’automne a été appliquée en janvier, à la faveur d’une fenêtre météo plus favorable. Les rattrapages au printemps ont aussi été compliqués. Si bien qu’au final, « un grand nombre de parcelles sont infestées de graminées qu’il faudra gérer la campagne prochaine », indique Emilie Ardissone (BASF).
Le flufenacet sur la sellette
Le marché des herbicides céréales recule donc à 6,75 Mha déployés à l’automne 2023 contre 10,1 Mha en 2022, soit une baisse de 34 %. Sur l’ensemble de la campagne 2023-2024, les prévisions annoncent un recul de 10 % par rapport à 2022-2023. Le marché atteindrait ainsi 14,3 Mha, contre 15,9 Mha déployés en 2022-2023. Les solutions de printemps, comme les sulfonylurées, ont permis de compenser un peu le recul des produits d’automne, tout comme les molécules tel le fenoxaprop, plus souples. « Appliqué en foliaire pour compenser ce que n’ont pas fait les racinaires sur les graminées, le fenoxaprop a progressé de 50 %, soit une hausse de plus de 10 000 hectares », chiffre Kevin Hirbec (FMC). À l’automne 2023, la dépense des agriculteurs s’est élevée à 74 €/ha traité contre 71 €/ha en 2022. Il s’est fait 1,3 passage en moyenne.
Trois substances actives dominent toujours le marché : le DFF, le flufenacet et le prosulfocarbe. Viennent ensuite différentes molécules comme la pendiméthaline, le metsulfuron-méthyl, le florasulam, le pyroxsulam, le pinoxaden, l’iodosulfuron-méthyl-sodium, le fluroxypyr, le mésosulfuron-méthyl, le chlortoluron, le fenoxaprop, l’aclonifène, le clodinafop, le diflufénican… Les programmes à base de flufenacet et DFF sont dominants à l’automne. Toutefois, la hiérarchie devrait évoluer les prochaines années puisque le flufenacet, matière active racinaire pilier du désherbage antigraminées à l’automne, est sur la sellette. Il pourra être encore utilisé en 2024, voire en 2025. Les conclusions de l’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) sont attendues avant la fin de l’année 2024, avec un vote ensuite des États membres courant 2025 qui précisera alors les délais de vente et d’utilisation.
Bayer devance Syngenta et Adama
Trois intervenants se partagent les premières places sur ce marché. Bayer Cropscience reste leader, avec près de 30 % de part de marché (PDM) en valeur. « Nous observons une baisse du marché global à l’automne 2023 du fait des conditions climatiques et de l’arrivée de nouveaux compétiteurs, observe Alice Nolli. Au printemps, le marché a été nettement plus dynamique et les produits Bayer en ont bénéficié. » Son produit de prélevée Mateno (flufenacet + DFF + aclonifène), désormais référence à l’automne, continue d’être développé sur blé tendre d’hiver. Syngenta est deuxième avec 20 % de PDM, avec des produits d’automne à base de prosulfocarbe, et le pinoxaben, première matière active en hectares au printemps. Adama annonce de son côté une PDM de 20 % en hectares à l’automne, deuxième du marché sur ce segment avec Merkur, Codix, Constel, Trinity et Compil. Viennent ensuite FMC (dont la part de marché devrait progresser à 11,5 % en hectares en 2023-2024 contre 10,5 % en 2022-2023), Corteva (en hausse à 13,3 %, 10,1 % en valeur), BASF (12 % à l’automne, avec notamment Trooper), Ascenza (10 % des hectares, 8,5 % en valeur) et Nufarm. « Au printemps 2024, nos produits antidicotylédones ont été appliqués sur 1,47 Mha contre 1,26 Mha en 2022 », indique Elsa Penguilly (Corteva).
Besoin de solutions souples
« Avec le changement climatique, le marché a besoin de solutions souples, considère Kevin Hirbec. Les campagnes ne se ressemblent pas les unes les autres, et avoir des produits plus larges, racinaires, foliaires, pour l’automne et le printemps, est important. » Et de poursuivre : « Il est nécessaire de traiter tôt par rapport à ces aléas climatiques. Les enseignements de cette campagne remettent sur le devant de la scène les solutions de préémergence qui permettent d’assurer au moins un passage à l’automne. » Pour Laurent Magnant, « dans certaines situations les passages en sortie hiver restent aussi intéressants et permettent de gagner 10 points d’efficacité. Car désormais les graminées lèvent durant tout le cycle et les traitements d’automne n’arrivent pas à atteindre celles qui lèvent en janvier et février. »
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