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Volumes stables malgré les remous

L’année 2019 devrait se terminer sur une quasi-stabilité de la production nationale d’aliments pour animaux. Et les fabricants jouent sur tous les tableaux pour consolider leurs chiffres d’affaires.

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A vec 20,8 Mt d’aliments composés, la nutrition animale française devrait rester à peu près étale cette année, selon les estimations de Coop de France Nutrition animale et du Snia (voir infographie). L’industrie emploie 15 200 personnes dans 201 entreprises (311 usines) et a réalisé 6,3 Mds€ de chiffre d’affaires en 2018. Sa valeur ajoutée représente 12,6 % du CA et son Ebitda 3,5 % du CA. Son statut reste donc celui d’une industrie lourde. Le marché est dominé par la volaille (42 %), suivie par les bovins (26 %) et les porcins (23 %).

Après une période de concentration continue d’une trentaine d’années, le nombre d’entreprises s’est stabilisé autour de 200 depuis 2007-2008, avec un tonnage moyen légèrement supérieur à 100 000 t/an. Mais, la contraction des marchés rend probable d’autres fermetures d’usines. Le plus gros évènement industriel de l’année reste la reprise de Neovia, filiale d’InVivo, par l’américain ADM.

Dans les grandes tendances, outre la baisse quasi continue des aliments porcs et la progression en ruminants, les dix dernières années se caractérisent par l’émergence du segment bio, qui pourrait dépasser les 580 000 t en 2019. Plus de la moitié étant destinée aux poules pondeuses. Au total, la volaille consomme plus des trois quarts des aliments bio produits en France, porcs et ruminants n’étant qu’à 9 % chacun.

La montée en gamme, oui mais…

La question de la montée en gamme, privilégiée par les plans de filières établis lors des EGalim, se heurte toutefois à une certaine réalité ; avec un budget alimentaire moyen par personne de 5 à 7 €/jour, les Français voient bien la différence entre un filet de poulet ukrainien à 2,40 € et un français à 4,80 €. Mais ils sont attachés à l’origine. « L’origine France est désormais assez bien indiquée dans les rayons des supermarchés, mais nous attendons toujours l’extension de cette information dans la restauration hors domicile. Nous l’espérions pour octobre, on parle maintenant de mars ou d’avril prochain », note Gilles Huttepain, directeur de LDC amont.

À l’instar de l’agriculture et de l’élevage, la nutrition animale se trouve donc écartelée entre de nombreuses injonctions, parfois contradictoires. Par exemple, sécuriser du bio local n’est pas simple (lire p. 65) et certaines montées en gamme peuvent se retourner contre elle. Ainsi, le passage des laiteries à du lait de vaches nourries sans OGM se traduit par le basculement vers du tourteau de colza incorporé directement à la ferme.

Pour les ruminants, le segment mash est toujours en progression, accompagné par plusieurs investissements cette année, telle l’extension de l’usine ABL (Aliment bétail Limousin) inaugurée en avril à Saint-Léger-Bridereix (Creuse). Nutriciab y a investi 3,5 M€ pour passer de 30 000 à 50 000 t.

L’organisation même de la filière nutrition animale évolue avec la recherche de valeur ajoutée, notamment la montée vers l’amont. Les fabricants d’aliments n’hésitent plus à produire leurs propres matières premières, voire leurs prémix (voir la Cavac p. 66) et à investir l’aval plus à valeur ajoutée. Ainsi, le groupe Michel vient de lancer Solubird, une solution nutritionnelle précoce pour les poussins d’un jour, fabriqué par Nutrifuture Prod à Loudéac (Côtes-d’Armor). CCPA, qui s’est engagé dans le déploiement d’un nouveau projet d’entreprise, vient de son côté d’ouvrir, en novembre, sa nouvelle usine de Trégueux (Côtes-d’Armor) pour ses spécialités d’élevage.

Repenser les postes de travail

En 2018, 121 usines ont participé à l’observatoire de la sécurité en entreprise (OSE), piloté par Tecaliman. Elles représentent 58 % de la production française d’aliments, 4 600 équivalents temps plein et près de 8 millions d’heures travaillées. Les chutes de hauteur, les déplacements et les ports de charge restent les premières causes d’arrêt de travail dans le secteur. En 2017, le taux de fréquence était de 19,96, pour un taux de gravité de 0,87.

L’analyse précise des causes est en cours au niveau de la profession, mais les entreprises n’ont pas attendu pour s’engager dans l’aménagement des postes de travail. C’est, par exemple, le moteur initial de certains investissements, expliquent tant Difagri (p. 69) que la Cavac (p. 66). « À la base du projet de Fougeré, il y a l’idée d’éviter aux opérateurs de porter les 240 t en sacs de 25 kg qu’ils manipulaient chaque année, explique Jérôme Pineau, responsable ruminants à la Cavac. Nous avons donc commencé par réfléchir à l’organisation en passant à une réception en big bag. Nous avons désormais une station MiniMix avec 96 microcellules de réception, de 1 à 3 m3, protégées des émissions de poussières, pour éviter tout risque d’inhalation par les opérateurs. » L’usine de Fougeré a ainsi réduit de 80 % les manutentions et les émissions de poussières.

Les structures de la nutrition animale se sont également emparées de la formation des salariés. La première promotion du certificat de qualification professionnelle « conducteur d’installation de transformation des grains », organisée par Alqual et Tecaliman, est sortie avec succès de cette formation en alternance en juin 2019, la deuxième promotion ayant démarré à la rentrée de septembre. Autre formation soutenue par la profession, cette fois avec l’Aftaa et le CPSA de Combourg, l’école des technico-commerciaux de la nutrition animale a démarré une première promotion avec quatre stagiaires en octobre. Et peut monter à une douzaine de places l’an prochain.

Renforcer la communication

L’industrie de l’alimentation est une des parties prenantes de l’élevage. Dindes et pintades ne sont pas les segments en plus forte hausse, tant s’en faut. D’où la volonté de leurs interprofessions de communiquer pour renforcer la demande. Le CIP (Comité interprofessionnel de la pintade), présidé par Jean-Louis Zwick (Maïsadour), a lancé une nouvelle communication sur cette volaille, dont la France est le premier consommateur et producteur (plus de 80 % de la production européenne) et exporte 20 % de ses volumes. « La fragilité de la filière française ne tient pas à la concurrence des autres pays producteurs, mais plutôt au fait que cet animal, de moins en moins connu du grand public, n’est pas mis en avant dans les linéaires des GMS, sauf en période de fête », relate le président. Pour donner à la pintade la place qu’elle mérite dans les restaurants et assiettes en Europe, le CIP a donc répondu à l’appel d’offres de l’UE. Elle a été retenue et déploie sur trois ans (2019-2021) un programme de 1,1 M€ (dont 70 % de l’UE) pour la France, la Belgique et l’Allemagne, principalement vers les professionnels du foodservice.

L’Avec, association européenne des viandes de volailles, coordonne par ailleurs un programme de communication sur cinq pays (France, Pologne, Allemagne, Italie et Pays-Bas) de 5,5 M€ pour deux ans qui démarrera en janvier 2020, grâce à l’effet de levier européen. Chaque pays a le choix de l’espèce, la France ayant retenu la dinde.

© DIFAGRI - Les fabricants n’ont pas attendu pour s’engager dans la formation de leurs salariés et de la sécurité en entreprise.

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