L’irrésistible ascension du bio
La production de semences bio a presque triplé en quatre ans en France. Désormais, pratiquement personne ne la laisse de côté.
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En 2017, la France comptait 8 400 ha de productions de semences bio. Ces surfaces sont passées en 2021 à 22 518 ha, soit près de trois fois plus. 81 entreprises semencières étaient impliquées en 2017. En 2021, elles sont 138 sur les 200 établissements producteurs de semences en France. 6 % des surfaces de multiplication de semences sont désormais consacrées aux bio, et 8 % des agriculteurs multiplicateurs sont des producteurs bio. Nul doute, le bio compte aujourd’hui sur le marché des semences et la grande majorité des entreprises a fait le choix d’y mettre un pied.
La fin des dérogations
« Cette croissance de plus de 30 % par an ces dernières années vient de l’augmentation des surfaces de consommation, mais aussi du fait que les espèces passent les unes après les autres en système “hors dérogation” », précise Michel Straëbler, chargé du dossier chez Semae. Pour être labellisés AB, les agriculteurs doivent obligatoirement acheter des semences certifiées, mais lorsqu’ils ne trouvent pas assez de semences bio sur le marché, ils peuvent obtenir une dérogation et utiliser des semences conventionnelles non traitées. Cette dérogation prend fin progressivement selon les espèces. Elle a été levée pour la plupart des céréales à paille, par exemple, ou pour le maïs, à l’exception de certaines variétés très tardives. « Le passage du blé du statut “dérogation” à celui “hors dérogation”, en juillet 2018, a constitué un véritable tournant en semences bio et incité beaucoup de semenciers à s’intéresser au bio. En tournesol, il va être obligatoire d’utiliser des semences bio à partir du 1er janvier 2022, la demande pour les prochains semis va faire un bond. »
Toutes les cultures ne sont pas concernées par le bio dans les mêmes proportions. « Le bio ne représente que 6 % des surfaces de blé tendre, note Michel Straëbler. Mais un quart de celles de triticale ou de féveroles, 40 % du sarrasin, 60 % de l’épeautre… et seulement 3 % en pommes de terre. » Si la plupart des semenciers repèrent dans leurs gammes les variétés les mieux adaptées à la culture sans phytos ni engrais de synthèse, certains ont engagé de véritables programmes de sélection bio. En grandes cultures, l’Inrae, avec sa filiale Agri-Obtentions, et Lemaire Deffontaines ont mis en place des programmes de ce type de longue date et sont les seuls à avoir inscrit à ce jour des variétés de blé tendre au catalogue français avec l’estampille « bio ». Lemaire Deffontaines réalise d’ailleurs aujourd’hui 30 % de son CA dans le bio. « Très tôt convaincus par les changements à venir, nous avons fait le choix de diversifier nos axes et programmes de sélection en nous intéressant à de nouvelles espèces, nouveaux débouchés et modèles de production différents, souligne Philippe Lemaire, directeur général. L’inscription de deux nouvelles variétés de blé bio, LD Chaine et LD Voile, au catalogue officiel français l’automne dernier, illustre parfaitement cette stratégie. »
Le marché des semences bio ne demande qu’à progresser. Les surfaces de consommation en bio ont encore gagné 12 % en 2020 et atteignent désormais 2,55 Mha, soit 11,77 % de la SAU. « Attention en semences à ne pas faire basculer l’équilibre entre l’offre et la demande, prévient Michel Straëbler. Dans certaines espèces, on commence à avoir des stocks, la preuve que pour ces cultures, le marché est mature. » Même si l’Agence bio assure « qu’il n’y a pas eu de coup de froid sur le bio en France en 2020 », la consommation de produits par les Français a grimpé de 300 M€ en 2012 à 1,31 milliard d’euros en 2016, mais n’est passée depuis qu’à 1,376 Md€ en 2020.
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