Login

Lin 2000 exploite toutes les facettes du lin

Du textile à l'oméga-3, de la papeterie aux matériaux d'isolation en passant par la biomasse pour chaudière, Lin 2000 transforme le lin en de multiples produits.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

«Nous sentons actuellement une très nette reprise de la demande en lin textile à l'échelle mondiale, et les cours sont repartis à la hausse, à entre 1,5 et 2 € par kilo », constatent avec le sourire, Jacques Larcher, directeur général de Lin 2000 et Sébastien Jumel, agriculteur à Daméraucourt, dans l'Oise, le président de la coopérative depuis janvier 2011. Il faut dire que depuis la crise de 2008, le marché du lin textile, qui s'étend maintenant à l'échelle de la planète, était en net recul et les cours s'étaient véritablement effondrés, à 1 €/kg, voire au-dessous. La coopérative linière avait été obligée de réduire les emblavements chez ses adhérents de près de 2 000 ha, il y a cinq ans, à 1 100 ha en 2010 et, même, 1 000 ha en 2011. Les responsables de la coopérative de l'Oise espèrent avoir touché le fond et pensent que 2012 va maintenant leur permettre d'amorcer le virage de la hausse de la production. C'est pour amortir ces hauts et ces bas, qui sont très fréquents en lin textile, que depuis sa création en 1990, la coopérative Lin 2000 cherche à exploiter au mieux toutes les facettes du lin. « C'est aussi pour apporter la meilleure valorisation possible de leur production à nos adhérents », souligne Sébastien Jumel.

Un commercial en Chine

Née de la fusion des coopératives linières de Grandvilliers, dans l'Oise, et de Saint-Pathus en Seine-et-Marne, la coopérative Lin 2000 a choisi de concentrer son activité de teillage sur un seul site, celui de Grandvilliers. Elle a pour cela agrandi son usine de l'Oise et investi dans des équipements de transport. Une tentative d'investissement dans la deuxième transformation avec la création en 1995, d'Interlin, n'a pas connu le développement escompté. A l'époque, la transformation du lin était en train de passer dans les mains des industriels chinois. Il était bien dificile de résister à ce mouvement et Interlin a dû cesser son activité en 2005. Entre-temps, pour mieux commercialiser ses lins textiles en Chine, Lin 2000 s'est associée depuis 2003 avec d'autres intervenants français, pour disposer sur le territoire chinois d'une structure commerciale légère, les Ets Devoldere. Tout récemment, Lin 2000 vient de mettre un pied dans la vente de tissus et de vêtements en lin, en France, en créant avec une coopérative normande un site de vente sur internet, Linfini. Les autres projets de diversification de Lin 2000 concernent les semences, et les utilisations du lin dans d'autres domaines que le textile.

La création de nouvelles variétés

La sélection variétale et la production de semences ont toujours constitué une priorité pour la coopérative. La coopérative de Saint-Pathus avait initié depuis longtemps, avec l'Inra, un programme de sélection du lin textile que Lin 2000 a poursuivi. La coopérative a démarré en parallèle un programme lin oléagineux. « Nous voulions renforcer nos travaux de sélection et allouer des moyens plus importants à la recherche variétale, nous avons pour cela décidé de nous associer à trois autres coopératives, Calira dans la Somme, Agy-Lin en Seine-Maritime et la coopérative de Teillage du Lin du Neubourg, dans l'Eure, souligne Jacques Larcher. Ensemble, nous avons créé en 2001, le GIE Linéa Semences de Lin qui vient donc de fêter son dixième anniversaire.

L'intérêt pour les différents membres du GIE est de disposer de variétés bien adaptées à leur terroir. Aujourd'hui, Linéa offre à son catalogue en lin textile, quatre variétés de printemps, Lorea et Andréa qui conviennent bien à la Picardie, Altéa, plutôt destinée à la Normandie, et la nouveauté Evéa. Il a inscrit sa toute première variété de lin d'hiver, Violin, et a déposé cinq variétés dans les essais officiels d'inscription. En lin oléagineux, la gamme de Linéa est encore plus large, puisque le GIE de sélection propose pas moins de six variétés de printemps et cinq d'hiver. En plus de la création variétale en lin oléagineux, Lin 2000 s'est efforcée de faire la promotion de la culture en France. Elle a créé en 2008, avec Linéa et B & B Développement, la filière Oléolin. Depuis 2010, la coopérative fait également appel aux biotechnologies et plus précisément à la sélection par les marqueurs avec l'université Jules Verne d'Amiens et l'Inra de Versailles. Pour valoriser les anas de lin, Lin 2000 a monté avec la commune de Grandvilliers un projet de chaudière à biomasse, l'un des tout premiers en France. Elle assure depuis deux ans le chauffage de la piscine municipale, du collège et de deux cent trente logements avec un réseau d'eau chaude de 1,9 km. Entre 50 et 60 % des anas de lin de la coopérative (2 000 t) sont ainsi traités.

La carte du renouvelable pour réaliser des économies

Les travaux ont nécessité un investissement de 1 M€ pour la coopérative et 1,3 M€ pour la commune. « Une augmentation de la capacité de la chaudière est prévue prochainement pour chauffer un hôpital, le lycée et vingt-deux maisons individuelles supplémentaires, précise Jacques Larcher. L'utilisation de cette énergie renouvelable permet à la ville et aux particuliers qui y sont raccordés, d'économiser entre 15 et 20 % par rapport à un chauffage au fuel. » Les anas sont désormais valorisés 60 € la tonne, contre 40 auparavant, sur le marché de la litière pour chevaux. Ils sont aussi exploités sur place, ce qui supprime les trois cent cinquante trajets de camions nécessaires à leur transport, soit une économie en CO2 rejeté, de 1 500 t/an.

Lin 2000 s'est intéressée également aux isolants de bâtiments pour valoriser les fibres courtes du lin, cette fois, et a créé avec d'autres actionnaires la société Natur'lin implantée, elle aussi, à Grandvilliers. Le marché était jusqu'à présent modeste, mais il est réellement en train de bouger, comme celui de tous les isolants naturels.

A la recherche de nouveaux producteurs

La coopérative va plus loin encore dans le domaine de l'isolation, en développant un programme de recherche-développement avec des industriels, pour créer de nouveaux produits qui pourraient cumuler effets isolants et acoustiques. « C'est un travail de longue haleine, mais nous y croyons beaucoup, reconnaît le directeur de la coopérative. Notre objectif, à terme, serait de construire une unité de production qui nous permettrait de valoriser la totalité de nos fibres courtes à un prix plus intéressant. » Pour le moment, elles sont valorisées à 60 % dans l'industrie automobile, 30 % dans la fabrication de papier et 10 % sous la forme de fibres textiles. Chez Lin 2000, toutes les idées sont bonnes et la coopérative n'hésite pas à consacrer de l'énergie à la recherche. Elle investit d'ailleurs aux côtés de Calira, dans des programmes de R & D, au sein du pôle de compétitivité Agro-Ressources Picardie Champagne-Ardenne, et bénéficie dans ce cadre du support financier de la région Picardie.

« Notre objectif est de revenir très rapidement à 2 000 ha de lin textile cultivés, souligne le président de la coopérative. Si tous ces projets se concrétisent, comme nous le prévoyons, nous devrions les atteindre très rapidement. » Lin 2000 est pour cela à la recherche de nouveaux producteurs.

Blandine Cailliez

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement