Sorodiab, la souplesse de ses vingt ans
Cette entreprise, spécialisée dans l'alimentation du bétail, s'est diversifiée au fil des années. Elle mise plus que jamais sur ses atouts : proximité et réactivité.
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A La Pacaudière, tout au nord du département de la Loire, c'est la coutume. Chaque année, au mois de septembre, on y célèbre la fête des classes. Toutes les personnes dont l'âge se termine par 0 (10 ans, 20 ans…) défilent déguisées (selon la tranche d'âge) dans les rues de la commune. Si cette tradition ne concernait pas que les individus, Sorodiab aurait pu y participer l'année prochaine… pour ses vingt ans. En effet, c'est le 1er janvier 1992 qu'a été créée la Société roannaise de distribution d'aliments du bétail par Yves Tamin, l'actuel gérant, et son beau père. Pour Yves Tamin, l'aventure du négoce commence en 1988, année où il rejoint la petite entreprise spécialisée dans la vente de produits nutritionnels et d'aliments du bétail que tenait justement son beau-père à quelques encablures de La Pacaudière. " A l'époque, on vendait beaucoup de sacs d'aliments ", se souvient d'ailleurs Yves Tamin. Dans la lignée, Sorodiab propose dès 1992 dans cette zone de polyculture-élevage, à orientation charolaise, une gamme complète d'aliments. Mais aussi d'engrais, d'amendements, de phytos et de semences.
L'aliment du bétail, socle de l'entreprise
Lorsque son beau-père fait valoir ses droits à la retraite en 1997, Yves Tamin devient logiquement gérant de l'entreprise, son épouse Véronique conservant des parts dans la société. A cette date, le premier technico-commercial est embauché, Yves Tamin étant jusqu'alors l'unique TC. Puis, début 2000, Sorodiab s'installe à La Pacaudière, dans des locaux flambant neufs. L'occasion de créer un libre-service agricole franchisé Kiriel, actuellement d'une superficie de 350 m2 en intérieur et 250 m2 en extérieur. " Un maillon de la chaîne qui était manquant ", justifie-t-il. Malgré cette diversification, vingt ans après, l'aliment du bétail reste toujours le fonds de commerce de Sorodiab. Le négoce se fournit en aliments auprès de deux marques, Evialis, aux deux-tiers, pour la gamme granulés et spécialités nutritionnelles, et Soréal, pour le mash et les fibres. " Au milieu des années 1990, le mash montait en puissance, notamment sur la Saône-et-Loire, raconte Yves Tamin. C'est à ce moment-là qu'il a été décidé de travailler avec Soréal. Aujourd'hui, la progression du mash est stoppée. " Et en général, " bon an, mal an, les volumes d'aliments sont stabilisés depuis 2003 ".
Une marge de progression en appro
C'est d'ailleurs à partir de cette date que Sorodiab a développé le travail à façon avec Evialis. " L'éleveur met à disposition un certain tonnage de céréales et reçoit en échange des aliments à choisir dans la gamme, fabriqués avec ce même volume, explique Yves Tamin. Il ne lui revient alors qu'à payer l'aliment complémentaire ainsi que la prestation. Si ce service a permis de maintenir les ventes, Yves Tamin est bien conscient qu'" il n'y a plus trop de marge de progression sur l'alimentation du bétail ", et n'exclut pas des évolutions stratégiques de l'entreprise sur cette activité. Côté distribution verte, Sorodiab se verrait bien implanter un deuxième libre-service agricole. Mais le secteur n'a pas une grande potentialité et présente déjà un bon maillage en la matière. " Sans compter les autres enseignes, le réseau Kiriel couvre quatre magasins entre les portes de Vichy et celle de Roanne. "
La marge de manoeuvre pour Sorodiab se situe plutôt sur le reste de l'appro, notamment en apportant du conseil. " Comme nous avons un site unique, des appros nous échappent sur notre territoire, regrette Yves Tamin. Au-delà d'un rayon de 15 Km autour de La Pacaudière, quelques agriculteurs ne nous connaissent pas bien. Il y a un certain nombre de petites exploitations qui ont besoin d'un suivi technique renforcé ", poursuit le gérant, qui s'est lui-même réservé une clientèle de 40 éleveurs pour " garder le contact avec le terrain ". Sorodiab va notamment continuer à travailler le secteur des engrais, après avoir mis en place des services d'épandage rendu racine, en partenariat avec un entrepreneur local, et une action par an avec Agro-Systèmes dans le domaine des analyses de sol. Résultat : le chiffre d'affaires du poste engrais a augmenté de près de 30 % ces dernières années. En semences, l'entreprise propose aussi du triage à façon avec un autre entrepreneur, pour environ 150 t de céréales.
Du service de proximité, souvent gratuit
" Cela permet de fidéliser et de développer la clientèle ", insiste-t-il en rappelant également l'action de l'entreprise en matière d'analyses fourragères, sur lesquelles le négoce ne prend pas de marge. Derrière ces analyses, le TC fait son bilan fourrager, ce qui lui permet d'apporter un conseil pour ajuster la ration et de proposer de l'aliment. " Cette année, avec la sécheresse printanière, le bilan fourrager va être plus complexe, poursuit-il. On va sûrement faire beaucoup d'analyses fourragères, car il y a pas mal de produits de substitution dans les exploitations et les agriculteurs ne connaissent pas trop les valeurs nutritionnelles. " La preuve est que Sorodiab a vendu au printemps une dizaine de tonnes de semences de cultures dérobées (sorgho, moha) alors que ce marché est quasiment inexistant habituellement.
" Dans des zones de polyculture-élevage, on fait la différence avec le service, l'écoute régulière, la souplesse, la proximité et la réactivité ", résume Sylvain Lassaigne. Pour ce technico-commercial, il s'agit du point fort de cette entreprise familiale de dix salariés, où l'agriculteur a toujours affaire à une même personne, les trois TC étant sur trois secteurs géographiques différents, et où " l'on peut établir une autre relation que dans une grosse structure ". " Pas plus tard qu'hier, un client nous a appelés, relate Yves Tamin, souhaitant illustrer la réactivité de l'entreprise. Il comptait réimplanter une prairie et avait besoin de carbonates pour le lendemain. On s'est arrangé pour réaménager la tournée et lui livrer l'engrais. C'est l'avantage d'être monosite. " " Si on s'arrange pour le dépanner, le client s'en souvient, poursuit-il.
D'autant qu'ici, la plupart des agriculteurs demandent à être livrés, et on a la logistique pour. " Dans le même ordre d'idées, l'usine Evialis est basée seulement à six kilomètres de là, à Saint-Martin-d'Estréaux.
Certiphyto, le chantier de 2012
Cherchant à structurer ses achats, Sorodiab s'est rapprochée d'Alliance Appro (une trentaine de sociétaires) dès la création de ce réseau en 2001. " Je suis indépendant au niveau du capital, mais au niveau du métier, je considère que l'échange permet d'avancer et que je ne peux pas rester seul ", dit-il, même s'il fait la distinction entre réseaux économique et professionnel. C'est d'ailleurs pourquoi Yves Tamin a oeuvré pour la constitution du Négoce Centre Est, créé en début d'année, dont il est aujourd'hui trésorier. Il est également membre élu de la chambre de commerce et d'industrie du Roannais, où il s'occupe particulièrement de défendre les territoires ruraux. De quoi être armé pour les vingt prochaines années.
En attendant, " la prochaine étape à franchir, c'est l'agrément distributeur ". Pas question pour autant d'abandonner les phytos, de peur de perdre pied dans les exploitations. Mais " il va falloir mettre tout ça en musique, au même titre qu'une grande structure, et transformer la contrainte en opportunité. Cela permettra peut-être d'avancer au niveau des conditions de travail ". Depuis octobre, une commission interne de cinq personnes représentant chaque métier se réunit mensuellement dans le but de décrocher les certifications individuelles et d'entreprise. Côté agriculteurs, une dizaine de sessions Certiphyto ont été organisées par le biais d'Asfona avec, à la clé, la formation de près de cent cinquante agriculteurs.
Renaud Fourreaux
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