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Joyeux anniversaire Agrodistribution !

Pour notre 30e anniversaire, nous avons voulu avant tout, dans le contexte actuel de crise sanitaire fort pesant, amener un peu de légèreté, créer un espace derespiration en forme de clins d’œil et de moments d’émotion partagés. Avec cette envie permanente d’être toujours au plus près de vos préoccupations. Par la rédaction

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Octobre 1990, le premier numéro d’Agrodistribution voit le jour. Et notre toute première interview était réalisée chez Soufflet. J’étais allée rencontrer Alain Canard, récente recrue du service Agronomie et environnement (eh oui ! déjà une préoccupation majeure du groupe), au poste nouvellement créé de technicien spécialisé fertilisation. Trente ans après, qu’est-il devenu ? Et là, surprise, après une recherche rapide sur Google, Alain Canard apparaît comme membre du Comifer, toujours rattaché au négoce Soufflet. Heureux hasard que lui et moi, trois décennies plus tard, soyons toujours dans la même entreprise… Lui toujours chez le négociant de l’Aube, en tant que technicien du service Agronomie conseils innovation, moi à l’origine de la création d’Agrodistribution et toujours aux manettes. Et cerise sur le gâteau, comme je l’apprendrai par la suite, tous les deux du même âge. Il n’en fallait pas moins pour piquer ma curiosité et chercher à savoir quels avaient été les principaux enseignements qu’il avait tirés de ces trente dernières années passées dans la distribution et les nouveaux enjeux pressentis. Rendez-vous est pris le mercredi 7 octobre par téléphone, Covid oblige. Et je n’étais pas au bout de mes surprises… avec cet homme de terrain, pro de la fertilisation et qui reconnaît volontiers : « Aujourd’hui, j’ai le sentiment qu’au cours de ces trente années d’expérimentations et de conseils, nous avons réuni bon nombre de connaissances et d’expériences qui seront utiles à la construction de nouvelles agricultures. »

Parmi elles, il pointe trois grands temps forts. Tout d’abord, dans les années 1990, l’arrivée des produits organiques (fientes sèches, compost…) dans les zones céréalières et l’expérimentation mise en place pour évaluer leur efficacité et établir leurs cinétiques de minéralisation azotée. « Un dossier lourd », comme il aime le qualifier. Des travaux qui ont duré 4-5 ans avec l’appui de l’Inra, Arvalis, d’élèves ingénieurs… et le soutien financier de l’agence de l’eau Seine-Normandie. « On connaissait mal le comportement de ces produits dans le sol, se souvient Alain Canard. Ces résultats nous ont été précieux pour mieux cerner l’efficacité des différents produits et surtout optimiser leur utilisation (doses, positionnement…) en fonction des cultures. » Mais dans le même temps, il déplore, nouvelle Pac oblige, le désinvestissement important en fertilisation dans les régions difficiles qui « a fait du mal sur le long terme, avec des sols aujourd’hui faibles en phosphore ».

Deuxième temps fort : dans les années 2000-2010, l’adaptation de la directive nitrate à travers les différents programmes d’Action azote par départements puis par Régions. Et surtout, le développement des couverts végétaux, les Cipan, avec la mise en place d’expérimentations dont certains thèmes travaillés avec la chambre d’agriculture de l’Aube pour conseiller les meilleurs mélanges. « À l’époque, pour les agriculteurs, c’était encore une réglementation de plus. Il fallait faire passer le message qu’au-delà de l’aspect réglementaire, il y avait surtout des avantages agronomiques, souligne Alain Canard. Aujourd’hui, plus personne n’en doute. » Les années 2000 voient aussi le développement des OAD pour piloter l’azote, comme le N-tester, GPN… Les successeurs de Jubil, premier outil de pilotage de l’azote en végétation apparu dans les années 1990.

Ensuite, sonnent les années 2010-2020, notre spécialiste fertilisation pointe le doigt sur l’arrivée des nouveaux produits avec inhibiteurs d’uréase, et en ligne de mire la chasse à la volatilisation de l’ammoniac. Son troisième temps fort. « Un dossier sensible aujourd’hui, avec des objectifs forts au niveau européen », reconnaît Alain Canard. Et une certitude pour lui, « la vie des sols » devient une préoccupation grandissante et affirmée avec un besoin croissant d’accompagnement sur les techniques de TCS, ACS… « Les agriculteurs y sont sensibles », assure-t-il. Depuis une dizaine d’années, les mentalités évoluent.

Et chez Soufflet, le service Agronomie conseils innovation, comme estampillé aujourd’hui, a vu ainsi l’arrivée, aux côtés d’Alain Canard, de deux nouveaux techniciens spécialisés, l’un en ACS, l’autre en agriculture biologique. Ce service a d’ailleurs pris de l’ampleur. En trente ans, les effectifs ont doublé, avec pour la partie technique une vingtaine de techniciens de régions. Un service à la hauteur du périmètre couvert par le négociant qui rayonne bien au-delà de son siège de Nogent-sur-Seine, « de Metz à Royan et de Nevers au Havre », comme aime à le rappeler Alain Canard. Aujourd’hui, le service est armé pour relever les importants défis de demain : « Réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prepa), c’est-à-dire pour l’agriculture, limiter les pertes par volatilisation d’ammoniac, réduire encore plus l’utilisation des phytos et favoriser l’introduction du biocontrôle, préserver et améliorer nos sols, énumère notre technicien spécialisé. Sans oublier les objectifs de la stratégie nationale bas carbone intégrée dans la stratégie RSE du groupe Soufflet. » Vaste programme ! Mais déjà bien amorcé… avec le lancement récent du calculateur de GES.

En tout cas, après trente années passées au service Agronomie de Soufflet, Alain Canard éprouve toujours le même plaisir à échanger et faire évoluer les choses, même si « on voudrait souvent que ça évolue plus vite ». « Nous devons continuer à porter les messages aux agriculteurs, les accompagner dans les enjeux en phase avec de fortes attentes de la société, les aider à modifier leurs pratiques pour aller dans le bon sens, vers une agriculture du vivant. » Et la prise de conscience des agriculteurs est bien réelle, selon lui, et les besoins d’accompagnement qui y sont liés aussi : « On a encore de l’avenir ! »

Un bel enthousiasme sans nul doute partagé par bon nombre d’intervenants du monde des coopératives et négoces. Le sentiment d’avoir apporté sa pierre à l’édifice d’une agriculture en pleine mutation et pour laquelle les entreprises de la distribution œuvrent sans relâche depuis trente ans et bien plus. Et encore aujourd’hui, elles doivent faire face à de nouveaux défis, dont celui, qui n’est pas le moindre, de la séparation du conseil et de la vente des produits phytos, sans oublier de nouveaux modèles initiés sous le coup de la récente crise sanitaire du Covid, qui n’a pas fini de marquer les esprits. Une certitude cependant, toutes ces années, avec leur lot de mesures exceptionnelles et novatrices, auront montré la grande résilience du secteur qui sait faire preuve d’une grande agilité pour apporter les réponses aux enjeux du moment. Rendez-vous dans dix ans. L’agrodistribution n’a pas dit son dernier mot.

Catherine Queheille

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