VU À L'ÉTRANGER Camgrain optimise la mutualisation du stockage

Camgrain collecte dans les grandes zones de production de céréales au sud-est de l'Angleterre. Elle a été créée en 1983 avec, pour objectif, de construire des capacités de stockage en commun plutôt qu'individuellement dans les exploitations. « Au début du siècle, plusieurs coopératives anglaises ont périclité entraînant un large désarroi auprès de leurs sociétaires, mais surtout une suspicion importante, se remémore John Latham, président de Camgrain. Le système coopératif ne s'en est jamais remis. L'exemple de Camgrain montre que la coopération a encore sa place. Sa conception est parfaitement adaptable à la France. Nous apportons une véritable plusvalue à nos adhérents. » Le concept a été largement porteur puisqu'en huit ans la coop à multiplier par dix ses tonnages passant de 15 000 à 250 000 t et qu'elle a un objectif à court terme de 350 000 t. Le capital est détenu à 100 % par des agriculteurs (300 au total). Ils deviennent propriétaires d'une capacité de stockage d'un minimum de 60 t, à 115 £ la tonne. La coopérative leur offre des possibilités de prêt entre un et sept ans suivant un barème établi. Cette participation est à vie jusqu'à la demande de remboursement - lors de la cessation - et se fait au même prix que la valeur de l'investissement. Celui-ci est amortissable par l'agriculteur. Camgrain est une coop reconnue pour la qualité des céréales qu'elle met sur le marché, grâce à l'outil ultra perfectionné dans lequel elle a investi. Dernier en date, un nouveau silo de 90 000 t, à Wilbraham, inauguré en juillet 2009, avec toutes les facilités de séchage, de contrôle qualité, de nettoyage et de tri des grains. Ces atoûts en font les principaux fournisseurs de Sainsbury pour la fabrication de sa farine et de Kellogg's, au Royaume-Uni.

Engagement total sous peine d'amende

L'approvisionnement est garanti, le producteur actionnaire devant honorer ses engagements. « Chacun des agriculteurs choisit la part de sa récolte qu'il nous livre, explique John Latham. En sachant que nous valorisons mieux que les autres les céréales de qualité, nous sommes les premiers servis. » Si pour une raison quelconque, il ne peut pas livrer, c'est à lui de trouver les quantités qui manquent au risque de se voir infliger une amende correspondant au manque à gagner de la coopérative. Inversement, s'il veut livrer plus, c'est à lui de trouver un autre propriétaire qui lui cède ses capacités. Les céréales sont payées douze mois après la livraison. Il en reste le propriétaire tant qu'elles sont dans le silo et peut faire un prêt à la banque avec warrant.

Valorisation et services

La contrepartie de cet engagement, c'est la valorisation des céréales livrées de 15 à 20 % en plus que la moyenne du marché. « D'autre part, nous avons des accords avec Openfield, la principale coopérative de vente de céréales du pays qui écoule les céréales de moins bonne qualité. » Camgrain développe aussi des services. Elle va chercher les céréales dans les champs (en 24 h), se charge de la commercialisation et garantit la qualité du travail en proposant à ses adhérents les investissements à faire dans les silos. Ainsi, les installations sont très récentes avec des séchoirs de grandes capacités. Sur les trois sites de stockage, la multiplicité des cellules, de taille différente, permet de s'adapter aux demandes des clients. « Nous arrivons à mesurer suffisamment notre risque pour ne poursuivre nos investissements qu'en fonction de nos ventes potentielles. Tout cela est bien maîtrisé, précise John Latham. Nous n'avons d'ailleurs aucune difficulté à trouver de nouveaux actionnaires. »

Christophe Dequidt