La lutte bio contre la pyrale

« Les premiers essais de lutte contre la pyrale du maïs avec des trichogrammes remontent à la fin des années quatre-vingt, se rappelle Pierre Boyer, responsable agronomique, chez Cohesis. Les traitements chimiques aériens avec des pyréthrinoïdes en granulés avaient remplacé les formules liquides appliquées au stade « Limite passage tracteur ». Ces dernières n'étant pas très sélectives des auxiliaires naturels, nous avons noté certaines années une prolifération de pucerons sans que l'on puisse les maîtriser. D'autre part, en cas de conditions météo défavorables, le stade LPT était vite dépassé. Les producteurs se retrouvaient alors sans solution. »

1 UNE COMMANDE EN MORTE-SAISON

La pyrale engendre à la fois des pertes de rendement au niveau du remplissage du grain, des pertes mécaniques par verse liées à la fragilisation des tiges, ainsi que des problèmes de qualité en favorisant la production de mycotoxines. Les maïs grain sont plus touchés que les maïs fourrages. En 2009, 17 000 ha ont été traités, soit 12 à 15 % des surfaces de maïs grain chez Cohesis. « Les autres utilisent des pyrèthres ou font l'impasse. » Pour 2010, 15 000 ha sont actuellement prévus chez 180 adhérents environ. Les surfaces varient surtout en fonction de l'emblavement en maïs grain. Les commandes des adhérents, réalisées en décembre et janvier en même temps que celles des produits phytosanitaires, sont centralisées chez SeVeal (1) qui les transferts à Biotop, producteur des trichogrammes. Vingt-cinq diffuseurs sont nécessaires par hectare, quelle que soit la pression du ravageur.

2 UNE LIVRAISON EN ÉTÉ

En juin ou juillet, suite au feu vert donné par les conseillers productions végétales responsables de l'opération sur les différents secteurs de la coop, Biotop expédie les diffuseurs contenant les trichogrammes aux silos d'appartenance des adhérents. « Nous prévenons ensuite nos adhérents par téléphone pour leur annoncer la mise à disposition des trichogrammes et les inciter à les poser très rapidement. De façon optimale, la pose doit coïncider avec le début des pontes de la pyrale qui se situe pour nous entre le 20 juin et le 10 juillet selon les conditions météo et les zones. »

3 UNE POSE TRÈS FACILE

La pose se fait manuellement, de préférence le matin pour éviter les heures chaudes de la journée. « On laisse une dizaine de mètres en bordure (12 rangs environ), puis sur le 13e rang un diffuseur est installé à l'aisselle d'une feuille de maïs tous les 20 m. L'opération est renouvelée en laissant 20 m entre chaque rang protégé. » En une heure, 4 à 5 ha sont ainsi protégés. « La surface moyenne des parcelles de nos adhérents étant de 10 ha, l'opération est rapide. »

Chaque diffuseur contient des trichogrammes à quatre stades de développement qui émergent progressivement en fonction de l'évolution des températures. La femelle trichogramme pond alors dans les oeufs de pyrale. La larve se développe et provoque très tôt la mort de l'embryon.

Cette technique revient à 42 €/ha contre 22 à 30 €/ha pour un pyrèthre. « Mais on n'a pas le risque de voir pulluler les pucerons par la suite », souligne Pierre Boyer qui estime que « la réglementation sur les mycotoxines et la réduction de l'emploi des produits de santé végétale devraient à l'avenir booster le développement de cette technique de lutte biologique. »

Chantal Urvoy

(1) Structure d'approvisionnement commune à quatre coopératives dont Cohesis.