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Le négoce à la une Beauchamp assoit sa place en Deux-Sèvres

Jean Michel Nossant

Repris en 2011 par Christophe Prouteau, alors unique TC de la société, le négoce Beauchamp s’est entouré d’une équipe dynamique qui fait la différence par son expertise et son souci du revenu de l’agriculteur, tout en relevant les enjeux agroécologiques.Par Hélène Laurandel Photos : Jean-Michel Nossant

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Le 8 juillet 2016, 17 h 28. Le métier de collecteur du négoce Beauchamp, en Deux-Sèvres, commence vraiment avec la première remorque bennée dans la fosse de réception d’un silo flambant neuf. Une nouvelle corde à l’arc d’une structure baignant à l’origine dans la nutrition animale et qui continue son développement en végétal, sous la direction de Christophe Prouteau depuis le 1er janvier 2011. TC de la société à l’époque, il a repris l’affaire à Claude Beauchamp, partant en retraite, qui l’avait créée en 1987 à partir du moulin familial. Né dans la Vienne, le négoce s’installe en 1990 à quelques encablures dans les Deux-Sèvres, à La Peyratte, à la suite de la déprise de l’élevage viennois, pour se rapprocher de ses clients éleveurs ovins.

Croissance de l’activité végétale

Il se développe depuis la fin des années quatre-vingt-dix en productions végétales, dans un contexte où l’élevage ovin n’est pas favorisé. L’activité végétale représente aujourd’hui 57 % de son chiffre d’affaires (voir infographie). La zone de chalandise s’étend sur 50 km autour du siège, couvrant les aires céréalières nord Deux-Sèvres et de la Vienne.

Si l’agrément OS a été obtenu en 2008, l’activité de collecte se met en place en 2016 avec l’installation de cinq cellules verticales de stockage, dont trois de 2 200 t et deux de 300 t, soit une capacité totale de 7 200 t. « Nous externalisons aussi du stockage chez un prestataire de services », ajoute Christophe Prouteau qui compte au moins doubler cette capacité d’ici cinq à six ans, pour atteindre 15 000 à 20 000 t. Un projet qui coûterait 800 000 € et se rajouterait aux 2,5 M€ investis depuis quatre ans pour accompagner la croissance de l’entreprise. En effet, après le silo, le dépôt appro a été étendu en 2017, avec un magasin de 2 000 m2 dédié aux stockages en palettes.

En attendant, l’installation existante est complétée par un séparateur, opérationnel en avril 2020, et un cyclo filtre, pour un montant de 260 000 €. Ces opérations étaient jusque-là externalisées pour 20 000 €/an. « Ce nouvel équipement sera un gage de qualité pour nos clients aval, outre nos certifications CSA-GTP et 2BSvs », avance Christophe Prouteau. Des clients qui sont des fabricants d’aliments pour 50 % des céréales commercialisées ; l’autre moitié partant à l’export en alimentation humaine depuis le port de La Pallice.

Cet équilibre de débouchés est préservé pour assurer la commercialisation de la collecte qui connaît un bond de 40 % sur la dernière récolte. Elle passe de 8 000 t en 2018 à 11 000 t en 2019, dont 55 % blé, 20 % orge fourragère et 15 % maïs. Deux facteurs expliquent ce bond : les meilleurs rendements et le gain de parts de marché. « Petit à petit, nous gagnons la confiance de nos apporteurs qui sont déjà clients en appro. »

Pour se différencier et se développer dans cette activité chez leurs clients, voire des prospects, le négoce Beauchamp travaille en prix ferme, tout en laissant la liberté à l’apporteur « de décider du moment où il veut vendre son produit. Je leur envoie les cotations tous les jours. » Christophe Prouteau a d’ailleurs suivi une formation sur le Matif avec le Naca ; il en réserve l’usage pour sa gestion interne.

En outre, il fait appel aux services d’un cabinet conseil (Kemeva conseil) qui accompagne les négociants et les agriculteurs fafeurs dans leurs décisions d’achat et de vente de matières premières agricoles. « Il est essentiel de bien maîtriser cette activité de collecte si je souhaite la développer. » D’autre part, pour appuyer cette croissance, il projette, courant 2021, la mise en place d’une plateforme de collecte à 15 km du siège social, avec un pont-bascule et un stockage provisoire libéré par une flotte de camions en rotation.

Au comité stratégique d’Impaact

Près de 20 % de ses clients agriculteurs sont des céréaliers et les 80 % restants sont en polyculture-élevage. Les éleveurs de chèvres laitières sont ses plus gros acheteurs d’aliments, suivis des éleveurs ovins, puis de ceux de bovins viande et de bovins lait. Par mois, sont vendues 1 000 t d’aliments composés. 1 500 t de matières premières (tourteau de soja, pulpes de betterave) et 300 t de minéraux et d’aliments diététiques sont également commercialisées à l’année. Il est vendu un peu d’aliments petfood et de basse-cour aux exploitants retraités ou aux proches.

Si le négoce Beauchamp travaille en aliments depuis plusieurs années avec l’appui d’Evialis, en appro végétal, la recherche d’un partenaire est plus récente. C’est ainsi qu’en 2016, il rejoint le réseau Impaact pour lui confier l’achat de ses appros. Tout en continuant le partenariat avec la société d’engrais Amaltis dont il est actionnaire avec 23 autres négociants. En décembre 2018, Christophe Prouteau rejoint le comité stratégique d’Impaact. Une implication « très enrichissante qui apporte de la hauteur et de la perspective ».

Pour se donner justement de la perspective, il a entrepris avec les services d’Impaact une étude de sa clientèle qui va être prochainement restituée. Une clientèle majoritairement très fidèle, du fait notamment de la visite mensuelle induite par l’activité nutrition animale, porte d’accès au végétal.

Conscient des enjeux démographiques et de la concentration des exploitations, il sait que son négoce doit faire valoir sa place dans un environnement très concurrentiel, avec pas loin d’une vingtaine de coopératives et négoces établis ou venant faire des incursions sur sa zone d’activité.

Aussi, l’accompagnement des agriculteurs se focalise sur l’optimisation de leurs marges qui passe notamment par le choix stratégique des intrants et aliments. Le virage de l’agroécologie a été pris avec la phytothérapie et les huiles essentielles en alimentation animale, les engrais foliaires, riches en oligoéléments, et le biocontrôle en végétal, ainsi que le stockage sans insecticide grâce à un système de ventilation. « L’an dernier, on a remplacé un T1 en blé par un produit de biocontrôle. On espère passer de 200 ha à 500 ha avec ce produit. Au préalable, est épandue une fertilisation foliaire, que nous pratiquons depuis plusieurs années avec 1 500 à 2 000 ha couverts aujourd’hui. »

La différence par la spécialisation

Quant à la séparation conseil et vente en phytos, Christophe Prouteau est assez serein, avec un CA phytos de 600 000 € qu’il relativise en regard de son CA global de plus de 10 M€. « En phyto, nous nous contenterons de recommandations. Sinon, nous continuerons dans les autres domaines le conseil, pour lequel nous sommes bien reconnus. Nous sommes jugés sur les résultats par nos clients. » Christophe Prouteau souligne aussi le rôle essentiel de ses chauffeurs qu’il nomme «conducteurs» car ils transmettent les messages des clients agriculteurs et « sont les yeux complémentaires des technico-commerciaux ».

Des TC qui, pour tenir le cap face à des agriculteurs de mieux en mieux formés, ont été recrutés par spécialité : Antoine Cherbonnier, entré en août 2012, dédié aux productions végétales, Mélanie Descoux, technicienne caprins et bovins lait depuis six ans, et Franck Allard, technicien ovins et bovins viande depuis deux ans. « Nous faisons la différence par notre spécialisation », souligne Franck. Et Mélanie d’ajouter : « Ce sont des productions très spécifiques et on n’a pas le droit à l’erreur, surtout en chèvres laitières. Nous nous formons régulièrement avec les fournisseurs et nous leur proposons aussi des idées de produits. Ils savent que nous sommes ouverts et prêts à faire des essais. »

La dynamique et la motivation entretenues par son équipe et les retours de ses clients agriculteurs amènent Christophe Prouteau à envisager l’avenir plutôt sereinement. « S’il faut construire autre chose, je suis prêt », affirme-t-il, en parlant de la nécessaire concentration à venir des interlocuteurs en Deux-Sèvres. Une ouverture qu’il manifeste en ouvrant les portes de la communication par l’accueil de classes d’un collège autour de la collecte des emballages vides, d’élus de la commune ou encore de la presse dans le cadre d’une participation en 2020 au programme Vert l’avenir du Naca.

© Jean-Michel Nossant - « Je crois en l’agriculture raisonnée, gage de sécurité sanitaire et alimentaire, et en la proximité », affirme Christophe Prouteau, dirigeant du négoce Beauchamp en Deux-Sèvres.

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