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Il est important pour les distributeurs de savoir ce qu'ils vendent Evaluer la qualité des fertilisants organiques

Face à la diversité des engrais et amendements organiques proposés sur le marché, les distributeurs ont tout intérêt à disposer de procédures pour appréhender ces produits et in fine pour justifier la pertinence, c'est-à-dire l'efficacité et l'innocuité de leurs gammes.

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C'est ce qu'on appelle le syndrome du concombre allemand. La crainte de voir émerger un nouveau scandale sanitaire qui éclabousserait la filière des engrais et amendements organiques. Face à l'arrivée massive cette année de digestats de méthanisation en bout de champ, notamment au nord de la Seine, la CAS (1) s'est ainsi fendue au printemps d'un courrier adressé aux distributeurs pour leur rappeler ainsi qu'à leurs clients, que hors homologation et hors compostage avec des déchets végétaux, les digestats ne pouvaient pas pour le moment être mis sur le marché. Enlevons d'emblée une ambiguïté : « Les problèmes de conformité ne sont pas spécifiques aux produits organiques », précise Laurent Largant, délégué général de la CAS, mais les distributeurs sont plus vigilants, étant donné la multiplicité des fournisseurs et des circuits d'approvisionnement et la moindre standardisation du produit. La première chose à vérifier est que l'étiquette soit conforme à la norme en question. Il existe trois normes majeures : la NF U 44-051 pour les amendements organiques (en cours de révision), la NF U 44-095 pour les amendements organiques contenant des Miate (2), et l'amendement n° 10 de la NF U 42-001 (en cours de refonte également) pour les engrais organiques. Il y a aussi des produits bénéficiant d'une homologation ou d'une autorisation provisoire de vente (se référer d'ailleurs au nouvel onglet Matières fertilisantes sur le site e-phy). « Les réglementations peuvent être différentes d'un pays à l'autre, alerte en plus Laurent Largant. Par exemple, les boues de décantation de conserves de légumes ne sont pas considérées comme des Miate en Belgique, alors qu'elles le sont en France. »

Des analyses pour vérifier la conformité

Rien n'oblige les distributeurs (du moins les non-mélangeurs) à réaliser des analyses et d'ailleurs « en général, ils en font très peu et pas assez », relève Christophe Bacholle, consultant-formateur. Mais pour eux, autant être sûr que leurs produits sont efficaces et inoffensifs. « D'autant que ce sont eux qui récoltent la production, fait remarquer Laurent Largant, et qui peuvent être pénalement responsables puisqu'ils sont les derniers metteurs en marché. » Ce qui est sûr, c'est que les responsables appro ont tout intérêt à demander aux fabricants de faire suivre leurs analyses.

Les normes définissent un certain nombre de critères d'appréciation du produit, en premier lieu les éléments propres (taux de matière organique et de matière sèche, teneurs en N, P et K, oligoéléments) à comparer à la promesse du fabricant, tout en sachant qu'une grande variabilité existe, notamment pour les composts de déjections animales. Le produit doit également être sain en terme de métaux lourds et micropolluants organiques et indemne d'agents pathogènes. Des indicateurs de traitement thermique sont recherchés pour vérifier que le produit a été composté et hygiénisé. De plus en plus, la valorisation des éléments fertilisants (comme la cinétique de libéralisation de l'azote ou le comportement de la matière organique) est étudiée. Dans ce cadre, le calcul de l'Ismo, le récent indicateur de la stabilité de la matière organique, peut donner une bonne appréciation. Mais une analyse poussée à ce niveau-là peut vite monter à 800 €. Enfin, « si on veut continuer à vendre ces produits, témoigne un acheteur, il va falloir regarder d'autres critères comme leur odeur ou leur stabilité au stockage ».

Renforcer l'argumentaire de vente

Toutes ces évaluations ne sont pas « à fonds perdus » car elles vont permettre à l'acheteur de négocier si la qualité livrée est inférieure à la promesse. A moins d'un véritable litige. Surtout, elles servent, en les croisant avec celles des fournisseurs et éventuellement à des résultats d'essais propres, à établir des fiches où sont inscrits le mode d'obtention, l'origine, la valeur en éléments fertilisants du produit avec des recommandations d'utilisation, de stockage et d'épandage. Des fiches produits précieuses au technico-commercial pour son argumentaire de vente, et à l'agriculteur pour construire ses plans de fumure.

Renaud Fourreaux

(1) Chambre syndicale des améliorants organiques et support de culture.(2) Matière d'intérêt agronomique issue du traitement des eaux.

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