VU À L'ÉTRANGER Grainco : le leader privé de l'importation de blé en Egypte
Trouver du blé dans le monde pour pouvoir répondre aux appels d'offres locaux est un objectif permanent pour la société égyptienne Grainco, basée au Caire.
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Dans la famille Mohsen, on était meunier de père en fils jusqu'en 2001. « Nous avons vendu cette activité car elle n'était plus rentable. L'Egypte est structurellement en surcapacité depuis 1993 avec près de 40 % en surplus », raconte Khaled Mohsen. Fort de l'expérience d'achat de blé, le jeune patron décide de se lancer dans le négoce. Il crée la société Grainco, toujours sur la base d'un actionnariat familial. Naturellement, son premier objectif est de fournir du blé aux meuniers qu'il connaît bien. Rapidement, Khaled Mohsen va s'intéresser à d'autres matières premières agricoles végétales. Si l'Egypte est le premier importateur mondial de blé, le pays est aussi largement déficitaire en maïs, en oléagineux (soja, tournesol, colza) et en sucre.
Répondre à la demande des meuniers
Pour importer, il faut des partenaires. Khaled Mohsen analyse les entreprises internationales capables de le fournir de façon stable et de qualité. « Le plus important pour nous était de trouver des alliés de confiance », précise-t-il. Trois contrats sont signés avec le brésilien GTP Pactual, l'américain Gavilon et le français Soufflet. Il s'agit pour Khaled Mohsen de pourvoir répondre en permanence aux appels d'offres du gouvernement égyptien sur le blé, mais aussi d'approvisionner les industriels de l'huilerie et de l'agroalimentaire avec du sucre. « Grâce à la localisation de nos partenaires, nous avons diversifié nos sources d'approvisionnement dans plusieurs pays. En plus, ces entreprises ont des implantations dans la CEI pour compléter leurs offres locales. »
Le pain est l'aliment de base. Les Egyptiens en sont les plus gros consommateurs au monde avec 400 g/jour/hab (160 g en France), soit un équivalent blé de 20 kg/hab/an. Le gouvernement collecte l'ensemble du blé local par le General Authority for Supply Commodities (Gasc). Pour encourager la production du blé, un prix fixe est annoncé dès la période des semis. Il se situe en 2015 à 305 $/t, soit près de 280 € (360 $/t l'an passé). Fort des 5 Mt collectées localement et des 5 Mt achetées sur les marchés internationaux, le Gasc revend le blé à des meuniers à un faible prix pour que ceux-ci puissent faire de la farine peu chère, qui elle-même sera rachetée par le Gasc pour être revendue aux boulangers. Ceux-ci pourront fabriquer le pain « baladi » qui représente 80 % du pain produit en Egypte, à partir d'une farine à 82 %. Ce pain sera vendu pour 0,5 centime d'euros dans les rues et les petits magasins. Chaque jour, 67 millions d'Egyptiens se voient offrir cinq pains par l'Etat sur une carte de rationnement. En parallèle, il existe un second marché privé. Une vingtaine d'entreprises, dont Grainco, ont été référencées par l'Etat. Puisqu'elles ne peuvent pas acheter le blé local, elles ne peuvent qu'importer, soit 5 Mt chaque année (autant que le Gasc). Ce blé est revendu au Gasc pour les apports des meuniers publics, ou traité directement par des meuniers privés qui élaborent une farine de meilleure qualité à 72 % d'extraction, plus chère et non subventionnée, qui servira à la boulangerie et à la viennoiserie classique.
Pour les importations, le Gasc qui importe 50 % des volumes, se base sur un socle d'entreprises internationales qui sont agréées et qui lui fournissent des origines très diversifiées (France, mer Noire, Canada...). La France a une excellente réputation et nos trois plus importants exportateurs, InVivo, Granit et Soufflet, sont reconnus et appréciés. En 2015, elle a été la première source d'approvisionnement du Gasc avec 2,1 Mt, suivie par la Roumanie.
2015, une année record
Grainco a été l'entreprise privée leader de l'importation de blé avec ses 700 000 t importées. « Les années se suivent et ne se ressemblent pas, se lamente Khaled Mohsen. La moisson française 2015 est bonne en quantité et qualité, mais beaucoup plus chère que l'origine russe ou ukrainienne, contrairement à l'an passé. Nous avons un différentiel en prix fob de plus de 3 $ à l'arrivée à Damiette, ou Alexandrie. Il faut que je puisse m'approvisionner sur ces origines plutôt que la France cette année. » Un seul panamax en provenance de France avait été traité avant Noël. C'est Khaled qui a gagné l'appel d'offres. Depuis, les hésitations du premier acheteur mondial de blé concernant les règles sanitaires d'importation pèsent sur les cours. Khaled Mohsen est très confiant pour l'avenir. « L'Egypte ne sera jamais autosuffisante. Nos politiques nous font croire que nous allons produire du blé dans le désert. C'est un leurre. Cela fait quarante-sept ans que j'entends cela, sans véritable résultat concret, la production de blé stagne voire régresse. » Autre sujet de satisfaction, ses deux fils Karim, 23 ans et Hamed, 19 ans ont décidé de rejoindre leur père dans l'entreprise. Karim finit un cycle de commerce international à Paris, et Hamed suivra ses pas dès 2016.
Christophe Dequidt
Les petites boulangeries vendent du pain subventionné à 0,5 centime d'euros et aussi des viennoiseries.
C. DEQUIDT
Le pain est l'aliment de base, avec une consommation de 400 g/jour /hab.
C. DEQUIDT
Le siège situé au 35e étage d'un building offre une vue imprenable sur le Caire et ses 20 millions d'habitants.
C. DEQUIDT
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