VU À L'ÉTRANGER Hermes-Trading : de fortes ambitions à l'export
En Ukraine, plusieurs exploitations agricoles ont réussi le passage de producteur à exportateur de grains. La société Hermes-Trading témoigne de cette volonté.
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« Nous avons créé UkrAgroCom en 2000 sur la base d'un kolkhoze de 5 000 ha qui était en faillite, avec l'opportunité de reprendre les baux de 14 000 ha, raconte Yuriy Skichko, le directeur général. Nous étions alors trois jeunes ukrainiens motivés qui aviont une première expérience dans des structures internationales. » Et le premier silo a été acquis en 2001 dans la région des tchernozioms. « En 2002, la rencontre avec un investisseur étranger nous a permis de faire évoluer le capital et progressivement les activités. La société de trading, Hermes-Trading, a vu le jour, en complément des activités agricoles qui sont restées sous contrôle ukrainien, pour aller vendre à l'étranger nos productions et celles d'autres fermes. »
Plusieurs autres activités ont ensuite été développées, soit par opportunité lors de la reprise d'autres kolkhozes, comme la ferme de 5 000 vaches holsteins, ou encore la production de sucre, soit par nécessité comme la création de terminaux fluviaux sur le Dniepr, principale rivière d'Ukraine. Dans le plan stratégique 2020, l'objectif est de cultiver 120 000 ha (contre 75 000 ha aujourd'hui) et de doubler les volumes commercialisés à l'export, à 1 million de tonnes.
Poursuivre l'intensification agricole
La rencontre avec l'importateur de matériel Kuhn a été déterminante pour la production. Elle a permis de mieux aborder l'agronomie et la gestion du matériel. La stratégie de produire de la qualité plutôt que de la quantité a été définie. « Les fermes du groupe ont ainsi été parmi les premières en Ukraine à faire du non-labour, précise Yuriy Skichko. Nous avons aussi développé des OAD avec nos principaux fournisseurs, comme John Deere et Class. L'agronomie est cruciale dans des zones où la période de développement des cultures est très courte. »
Parallèlement, les trois associés misent sur les hommes. Ils ont gardé les équipes en place, mais en installant un contrôle strict. « Le succès passe par la compétence des hommes et leur capacité à prendre des initiatives, précise Yuriy Skichko. Après soixante-dix ans de communisme, il est parfois bien difficile de faire perdre les habitudes. »
L'enjeu de la logistique
Sur le plan de la commercialisation, « quand on souhaite exporter, la logistique est stratégique », insiste Ivan Cherevko, directeur des ventes. Fort d'une capacité de stockage à la ferme de 259 000 t, l'entreprise a construit un silo fluvial sur le Dniepr de 94 000 t. Ce fleuve qui débouche sur le port de Nikolaev était, du temps des Soviétiques, un axe principal à la remontée des céréales ukrainiennes vers les républiques d'Union soviétique. Il était tombé à l'abandon après l'indépendance. Nibulon, le principal exportateur ukrainien, en a fait un axe stratégique de développement. Et Hermes-Trading veut aussi en profiter.
Mais « c'est très compliqué car le secteur des transports est celui où la corruption est la plus forte, se plaint Ivan Cherevko. Tout est source de racket : le pilote du bateau, les écluses, les ponts, l'Etat, le conducteur de train, le chef de gare, le loueur de wagons... Certains passages de village font également l'objet de curieux péages sur les routes. Prenons l'exemple des barges : en fonction de leur taille, les nôtres que nous devons louer à l'Etat, sont taxées à 6 $/t alors que celles de Nibulon qui les a construites sur mesure, sont taxées à moins de 1 $/t. »
La société a fait ses comptes. Pour rejoindre la mer Noire, cela lui coûte 25 $/t en fluvial, 9 $/t en train et 17 $/t par la route. « Il faut réagir », prévient Yuriy Skichko. Ainsi, dès la prochaine privatisation de la compagnie ferroviaire, UkragroCom souhaite acheter 400 wagons en propriété. Elle fera appel à des sociétés étrangères pour le fluvial et gardera sa flotte de quinze camions
Le financement, un challenge permanent
Pour fonctionner normalement, les besoins financiers de ce type de sociétés sont de l'ordre de 20 millions de dollars par an. « C'est un challenge permanent qui nécessite la confiance des banques ou de nouveaux partenaires », confirmeYuriy Skichko. Comme pour toutes les sociétés ukrainiennes, l'année 2016 en production sera difficile en financement à cause de la forte dévaluation de la grivna. Heureusement, les contrats à l'exportation sont effectués en dollars.
Christophe Dequidt
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