VU À L'ÉTRANGER IKR Agrar en route pour un redressement productif
Repartir de l'avant après avoir frôlé le dépôt de bilan, il y a trois ans, tel est le pari d'un des principaux distributeurs hongrois, IKR Agrar, qui envie le modèle français.
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D'emblée, Lajos Nagy, directeur général d'IKR Agrar annonce la couleur : « Vous les Français, vous ne vous rendez pas compte à quel point vous avez bien structuré votre agriculture avec des entreprises privées ou coopératives fortes, organisées par filières. Pour ne pas l'avoir fait, la Hongrie est aujourd'hui le symbole de la mondialisation, avec des distributeurs de toute taille et des multinationales qui se livrent une guerre des prix sans aucune cohérence et capables de tous les excès. » A l'exemple des semences de maïs où 80 % du marché est détenu par Cargill, Monsanto et Pionner. « On peut facilement prédire que d'ici cinq ans, il ne restera plus que cinq entreprises pour faire la distribution des intrants, tellement la concurrence est exacerbée », précise Lajos Nagy.
Un métier à risques en Hongrie
Ici, le métier est différent du modèle français. Le distributeur fait face à deux types d'agriculteurs. Ceux possèdant plusieurs centaines d'hectares, de plus en plus nombreux et sans foi, ni loi. Et les autres avec des structures moyennes (moins de 300 ha), incapables de survivre seuls donc plus dépendants. Ils ont besoin de financement pour pouvoir acheter leurs intrants et exercer leur métier d'une année sur l'autre. Ce que ne font bien évidemment pas les multinationales, et les banques ont définitivement refusé de suivre les agriculteurs. « C'est un métier très difficile qui nous amène à suivre de façon très proche nos clients et d'être très présents dans leur comptabilité, ajoute Lajos. Les risques sont énormes avec la volatilité. Nous sommes donc obligés de prendre des précautions en établissant des contrats en début de campagne, de faire souscrire des assurances si c'est possible, ou encore de mettre des cautions sur les terres. Sans compter qu'il ne faut rien attendre en retour, car en cas de retournement de marché, les promesses sont vite oubliées, ce qui nous amène parfois devant les tribunaux. » C'est ainsi qu'IKR est devenue propriétaire de plus de 8 000 ha qu'elle exploite pour vendre les productions via des traders. Pour ne pas prendre trop de risques, l'entreprise choisit aujourd'hui ses clients en fonction de leur taille, leur honnêteté et leur capacité à être solvable.
Retrouver sa place de leader
Pas de fidélité, pas d'outils de transformation, aucun résultat financier, une volatilité importante, des problèmes de sécheresse et un actionnaire majoritaire trop gourmand, voilà les ingrédients qui ont conduit IKR à connaître de grandes difficultés. A partir de 2010, plusieurs activités sont cédées. L'important agro holding tchèque Agrofert Group, dirigé par Andrej Babis, l'actuel ministre des Finances du pays, avec ses 200 sociétés et 27 000 salariés, rachète progressivement les actifs, en synergie avec ses autres activités, ailleurs en Europe. La filiale de machinisme agricole devient alors, Agrotech, nom de la filiale tchèque, récupérant ainsi l'exclusivité New Holland pour plusieurs pays d'Europe de l'Est. Mission est donnée à Lajos Nagy de redresser l'entreprise et d'en faire une entreprise d'avenir. Retrouver les niveaux du début des années 2000 est un leitmotiv qui devient presque une obsession. « Les agriculteurs ont une grande confiance en IKR devenue par le rachat IKR Agrar. Ils en ont assez de l'hégémonisme des sociétés américaines en semences. Ils souhaitent renouer du contact et de la proximité. IKR Agro est la mieux placée pour y arriver. » Lukas Istvan, le responsable de terrain, précise : « Pour cela, nous devons faciliter la vie de nos clients, par exemple pour ceux qui ont dû emprunter pour leur activité, nous acceptons un remboursement anticipé et c'est nous qui payons la fin des intérêts. » Dans un tel contexte, impossible de créer de nouvelles offres payantes et de valoriser le service. Celui-ci est inclus dans le prix du produit dont les marges diminuent inexorablement. IKR Agrar fait un autre pari. Elle mise sur la relation humaine et la fiabilité : rétablir le dialogue et les relations de confiance, tenir sa parole sur les achats d'intrants et être fiable sur la logistique. C'est ainsi que l'entreprise compte retrouver sa place de leader.
Christophe Dequidt
(1) Pour en savoir plus : www.ikragrar.hu - www.agrofert.cz
« Nous comptons augmenter le chiffre d'affaires de 30 % par an jusqu'en 2018 », confie Lajos Nagy, directeur général d'IKR Agrar.
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