La nouvelle vague de dirigeants Manager en toute harmonie

Ses origines agricoles ont inculqué à Estelle Thibaut, DG de la coopérative Scara dans l’Aube, la valeur de « produire quelque chose de concret pour une fin essentielle ». C’est la colonne vertébrale de son parcours professionnel qui l’a emmenée du Cerfrance Vienne à la Scara, en passant par la filiale Agrosolutions d’InVivo. « Cela me donne aujourd’hui une certaine force, un socle qui me permet de m’adapter facilement. » Avoir accompagné des agriculteurs de la Vienne dans leurs projets multiples lui apporte une compréhension des enjeux rencontrés par les adhérents. La création d’Agrosolutions, où tout était à construire, lui sert plus que jamais dans sa mission actuelle.

Équilibre et disciplines

« Dirigeant de coopérative est un métier solitaire. Il faut apprendre à composer avec. Pour réussir au mieux, je mise sur une recherche d’équilibres à tous points de vue, équilibres qui fluctuent en permanence d’ailleurs, et sur une certaine discipline de vie. » Tout d’abord, équilibre entre vies professionnelle et personnelle. « J’ai de jeunes enfants et un conjoint qui ne travaille pas dans le milieu agricole. La vie familiale est une vraie force pour moi car ça me permet de couper avec le travail. » Quant à avoir une bonne discipline de vie, « c’est indispensable pour ne pas perdre le fil, gérer le stress et continuer à prendre du recul, car la mission, toute passionnante qu’elle est, peut parfois être ingrate ». Équilibre entre investissement opérationnel dans l’entreprise et investissement dans des sujets plus stratégiques, plus extérieurs à la coopérative. « Je suis administratrice de différentes structures. Je participe à des groupes de travail, notamment à AgrIdées… C’est autant d’opportunités de rencontrer des personnes extérieures avec qui échanger. » Équilibre aussi entre le court, le moyen et le long termes. « Il ne faut pas forcément vouloir toujours des résultats immédiatement. »

Redonner des objectifs communs

Diriger, c’est prendre des décisions, exercice assez naturel pour Estelle Thibaut. « J’ai d’abord une phase d’écoute, puis d’analyse des enjeux, des objectifs et des contraintes. Ensuite, la décision arrive assez intuitivement. À ce moment-là, j’aime bien la discuter avec mon président, le codir ou les administrateurs, pour avoir d’autres angles de vue, pour bénéficier de leurs expériences, pour prendre en compte l’histoire de la Scara. Ces échanges viennent conforter, ajuster ou modifier ma réflexion initiale. » Pour Estelle Thibaut, l’une des priorités actuelles est de redonner des objectifs communs aux adhérents pour dynamiser le collectif qu’est la Scara. « Produire en masse n’est plus aujourd’hui l’objectif attendu. Toutefois, les attentes de la société française envers son agriculture sont peu lisibles, ce qui peut être démotivant. Le rôle de la Scara est de rassembler ses adhérents et ses clients autour de projets répondant aux enjeux actuels. »

La jeune dirigeante essaye également de ne pas céder au chant des sirènes d’une lecture simpliste de l’agriculture. « Les modèles agricoles ont la vertu d’être simples à comprendre mais ils ne s’appliquent pas uniformément et facilement. Il faut apprendre à gérer la complexité liée au vivant avec lequel on travaille. »

Chantal Urvoy