Pourquoi les JO vont faire perdre du blé au secteur céréalier
Avec les arrêts de navigation prévus sur la Seine pendant les JO 2024, le transport des céréales va être dégradé, qui plus est en pleine moisson. Dégagements perturbés, silos encombrés, exportations retardées… Cette désorganisation va coûter cher à la filière.
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1 UNE NAVIGATION PERTURBÉE
Afin d’assurer la sécurité des Jeux olympiques de Paris 2024, la préfecture prévoit de restreindre, voire d’arrêter la navigation des barges sur la Seine. « On nous a annoncé un blocage de la circulation pendant les sept jours précédant la cérémonie d’inauguration, mais aussi un ou deux jours pendant les épreuves fluviales, puis sur toute la période des Jeux une fermeture partielle de 2 h à 11 h du matin », informe Jean-François Lépy, membre du bureau et référent logistique d’Intercéréales. Or 3 Mt de céréales sont transportées chaque année jusqu’à Rouen via la Seine, dont 600 000 à 700 000 t entre juillet et août. D’après les estimations d’Intercéréales, les perturbations pourraient coûter 500 000 € à la filière.
2 DES RESTRICTIONS EN PLEINE MOISSON
« Du 19 au 27 juillet, période à laquelle la navigation sur la Seine sera à l’arrêt, la moisson sera en plein boom », s’inquiète le directeur de Soufflet Négoce by InVivo. Pour Valfrance, ce sont près de 160 000 t de céréales qui transitent sur la Seine à cette période. Le DG, Laurent Vittoz, craint la catastrophe : « Nous sommes en sous-capacité de stockage avec une grosse collecte de maïs qui arrive au mois d’octobre. Le dégagement de nos céréales est donc vital pour faire rentrer les maïs dans nos silos. Nous ne pouvons pas les laisser sur dalle, ou alors il faudra sacrifier des blés ou des orges. Pour l’instant, nous n’avons pas de plan B. » Une problématique qui va également se poser chez le groupe Soufflet qui fait transiter près d’1 Mt de céréales via la Seine.
3 PEU DE TRANSPORTS ALTERNATIFS
Selon Jean-François Lépy, transférer les volumes sur d’autres modes de transports n’est pas une solution. « Nous sommes déjà à saturation sur le transport ferroviaire », fait-il savoir. Côté camion, les capacités en termes de bennes et de chauffeurs ne seront pas disponibles pour acheminer les tonnes supplémentaires. En effet, il faudrait entre 40 et 60 camions pour remplacer une barge. « Le report modal est quasiment impossible », prévient-il. De plus, le prix du transport passe du simple au triple entre le fluvial et le routier, soit un surcoût « astronomique » pour le secteur. Sans parler de l’empreinte carbone. « Nous tirons la sonnette d’alarme, car ce n’est pas possible de reporter les volumes sur les camions. Rien que pour Valfrance, il faudrait en trouver 6 000 », alerte Laurent Vittoz. Pour limiter (un peu) les désagréments, VNF va modifier les horaires d’ouverture des écluses en amont de Paris. La fermeture ne se fera plus à 20 h mais à minuit. « L’objectif est de permettre aux barges de passer Paris avant la fermeture de la Seine à 2 h du matin », explique Francois Houix, chef de projet Jeux de Paris chez VNF.
4 DES SURCOÛTS LOGISTIQUES
Sans moyens pour dégager les céréales, l’encombrement des silos va être important. « Il va falloir faire très attention au programme de chargement prévu à l’export. Nous savons que sur la période de blocage, les céréales ne seront pas commercialisées. Et si on charge les navires à Rouen deux fois moins vite, les frais d’attente vont être importants », prévient Jean-François Lépy. Selon lui, entre 30 000 et 40 000 $ pourraient s’ajouter à la facture par jour supplémentaire de chargement des vraquiers. Ainsi, soutenue par VNF et Haropa Port, la filière appelle la préfecture de Paris à ne pas prendre de décisions « au détriment d’une certaine réalité économique ».
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