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Quelle énergie choisir ?

La coopérative laitière de Verneuil (Indre-et-Loire) a investi 3 M€ dans une unité de méthanisation, qui alimente l'usine en chaleur.A. RICHARD

Chaque énergie possède ses propres règles techniques et son montage financier. Quelques conseils avant de se lancer.

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Biogaz : choisir ses associés

Le biogaz semble l'énergie la plus légitime pour le secteur agricole, en tant qu'apporteur de matière première. On pense instinctivement aux coopératives laitières, viticoles, ou de transformation qui possèdent des déchets, mais les collecteurs de grains ne sont pas en reste. Les issues de céréales et leur fort pouvoir méthanogène, se négocient entre 30 et 40 €/t, voire jusqu'à 80 €/t dans certains secteurs. Alors pourquoi ne pas porter directement un projet de méthanisation ? Le premier postulat est d'atteindre un seuil de 10 000 t de matière première, ce qui correspond à environ 100 Nm3 CH4/h. Bien souvent, les organismes stockeurs ne disposent pas assez de déchets. Il faut donc s'associer avec d'autres acteurs (adhérents de la coop, collectivités, entreprises agroalimentaires...). Il faut également réfléchir dès le départ au débouché, gaz ou chaleur. « Aujourd'hui, la technologie permet de faire du biogaz sur tout le territoire. La réussite d'un projet dépend essentiellement du facteur humain. L'enjeu est de bien s'entourer et de savoir animer un projet avec de nombreux partenaires », souligne Jérémie Priarollo, responsable ingénierie méthanisation à Solagro. Avant de se lancer directement dans une étude de faisabilité, mieux vaut élargir les réflexions et ne pas se focaliser sur un modèle. En discutant avec les organismes consulaires, l'administration, les entreprises du secteur, les banques, il peut y avoir des opportunités à saisir. Une fois le projet lancé, il est recommandé de mettre en place un comité de pilotage avec toutes les parties prenantes. « Tous les mois, après la réunion entre porteurs de projets, les avancées sont présentées aux acteurs locaux. Il est bon d'associer les associations environnementales et les élus locaux en organisant un voyage d'études, par exemple. A ce stade, la réunion publique est fortement déconseillée. Elle apporterait plus de questions que de réponse. Il est préférable d'effectuer du porte à porte pour expliquer le projet auprès des riverains les plus proches du site d'implantation, et sentir les éventuelles réticences », ajoute Jérémie Priarollo.

Le choix de l'entreprise qui réalise le process de méthanisation est primordial. Un cahier des charges précis sur la construction, un plan de maintenance et les références locales peuvent aider à y voir plus clair dans les devis. « Au-delà de l'analyse technico-économique, il est conseillé de joindre des exploitants ayant déjà travaillé avec l'entreprise visée pour recueillir un retour d'expérience précieux », ajoute l'ingénieur de Solagro.

Biomasse : étudier la ressource

Certains procédés continus dans l'année comme le séchage du maïs semence, la distillation, la formulation d'aliments du bétail ou le séchage de l'orge en malterie sont tout à fait adaptés à l'utilisation de biomasse comme source de chaleur. Première étape, bien analyser la ressource : connaître le pouvoir calorifique inférieur (PCI), le taux d'humidité, la saisonnalité, le temps et le type de stockage nécessaire, le tonnage et la répartition de la ressource sur le territoire.

La plaquette forestière est la plus courante, comptez environ 80-90 €/t ou 20 € HT/MWh PCI. Avec la réglementation sur le recyclage, le bois « en fin de vie » (faiblement adjuvanté) devrait devenir une nouvelle source de biomasse, moins chère.

Quant à la biomasse agricole, les coproduits (paille, issues de silo, rafle de maïs...) ou les cultures dédiées (miscanthus, TTCR...) peuvent être brûlés. « Attention, prévientCamille Poutrin, chargée de mission biomasse à Service Coop de France, leurs propriétés sont différentes de celles du bois. La chaudière doit donc être adaptée à la biomasse utilisée, par exemple en utilisant des équipements équipés d'une grille mobile. » La technologie est devenue courante et il existe de nombreuses offres sur le marché : Guntamatic, Herz, Compte.R, Hargassner... La partie logistique est également à prendre en compte. Par exemple, pour la paille, il faudra contractualiser avec les agriculteurs, aller la collecter et pouvoir la stocker.

En parallèle, l'entreprise doit définir ses besoins énergétiques : avec la puissance nécessaire à son fonctionnement et la variation de la demande. « Le besoin en chaleur doit être, plus ou moins continu toute l'année. Pour un séchoir de céréales qui ne fonctionnerait que deux mois dans l'année, l'investissement sera difficilement rentabilisé. Par contre, en nutrition animale avec des besoins en vapeur continus, le retour sur investissement peut être de cinq ans sur certains sites, grâce aux subventions de l'Ademe », ajoute Camille Poutrin.

Photovoltaïque : la plus simple

Le solaire photovoltaïque est sûrement l'énergie la plus simple à mettre en oeuvre. Pas besoin d'approvisionnement, ni de tierce personne. Les technologies sont matures. En dix ans, la puissance d'un panneau a augmenté de 50 %, passant de 200 W à 300 W/m2. Techniquement, il est possible d'installer des panneaux sur beaucoup de bâtiments. « Les panneaux seront plus salissants sur des bâtiments de type stabulation avec pailleuse, il faudra nettoyer plus souvent pour maintenir la production. Sur ce type de bâtiment, l'assurance peut être plus élevée », explique Simon Ondet, directeur commercial de Solewa, installateur dans l'Ouest de la France. La Cavac, (6 000 adhérents, Vendée, Deux-Sèvres) a fait le choix d'installer 1,8 MWc, soit 12 680 m2 de panneaux sur ses bâtiments de stockage autre que céréales : stockage de paille ou bien plateforme d'approvisionnement des magasins Gamm vert. Un technicien - conseiller bâtiment - accompagne également les adhérents, en proposant une étude de faisabilité lors de la création d'un bâtiment. Au total, la coopérative a soutenu l'installation de 5 MWc, sur 33 700 m2, chez les agriculteurs.

Un des points importants pour installer des capteurs solaires est d'être proche d'un transformateur Enedis ou d'une ligne haute tension HTA, car les coûts de raccordement pèsent sur le projet (environ 10 000-15 000 € pour un 100 kW). A l'automne 2017, le gouvernement a voté une réfaction de 40 % sur les coûts de raccordement, ce qui élargit le périmètre des projets. « Un raccordement à 300 m est devenu rentable. Cela ouvre la possibilité à de nouveaux projets », ajoute Simon Ondé. Privilégiez une orientation sud et 200 m2 de panneaux pour que ce soit intéressant. L'autoconsommation, récemment réglementée, peut également ouvrir de nouvelles possibilités. La coopérative Arterris (Occitanie), déjà impliquée dans de nombreux projets solaires, fait partie des 142 lauréats de l'appel à projet dédié à l'autoconsommation de décembre 2017. Elle projette d'installer 450 kWc pour les consommer directement.

Eolien : gérer les frustrations

Peu de coopératives ou de négoces se sont lancés dans l'éolien. Il s'agit avant tout d'une démarche en tant qu'acteur du territoire, pour améliorer l'image de la coopérative. Les Fermiers de Loué portent à 66 % le parc EoLoué, avec l'énergéticien Quadran. La coopérative a investi 17 M€ pour six éoliennes (10,8 MW) à Juillé (Sarthe). Depuis quatre ans, les rendements électriques sont conformes aux estimations. « Un des points essentiels est de s'associer avec des entreprises sérieuses, reconnues dans le domaine de l'énergie, insiste Yves de la Fouchardière, directeur des Fermiers de Loué. L'autre point à gérer est leur implantation. Certains particuliers peuvent être frustrés de ne pas avoir d'éolienne sur leur terrain (NDLR : ni le loyer qui l'accompagne) et peuvent mettre des bâtons dans les roues du projet. L'implantation doit être raisonnée par rapport aux productibles et non aux propriétaires. » A EoLoué, une seule éolienne est implantée chez un adhérent de la coopérative.

Boortmalt, filiale d'Axéréal, a équipé sa malterie d'Issoudun (Cher) d'unechaudière biomasse. Celle-ci brûle des poussières d'orge et des issues de céréales.

A. RICHARD

La Cavac a fait le choix d'installer 1,8 MWc (12 680 m2) de panneauxsur ses bâtiments de stockage, sans souci technique.

S. CHAMPION

Dans la Sarthe, la coopérative des Fermiers de Loué est une des rarescoopératives à avoir investi dans l'éolien.

FERMIERS DE LOUE

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