La coopérative à la une Duransia, la force du collectif enracinée dans les Alpes
Trois ans après la fusion d’Alpesud et de GPS, Duransia a trouvé son équilibre. Forte de 3 000 adhérents, la coopérative s’appuie sur son ancrage territorial et sa stratégie de diversification pour affronter la baisse des volumes de céréales. Approvisionnement, légumes secs, semences ou circuits courts : le groupe explore toutes les pistes pour créer de la valeur en amont.
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La greffe a pris. Trois ans après leur fusion stratégique, les coopératives Groupe Provence Services et Alpesud, devenues Duransia, fonctionnent désormais comme une seule entité. « Les équipes ont trouvé leurs marques, les méthodes se sont harmonisées, et une culture d’entreprise commune a émergé », affirme Richard Sauvat, DG de la nouvelle entité dont le siège se trouve à Peyruis (Alpes-de-Haute-Provence). « Aujourd’hui, il n’est plus question ni de GPS, ni d’Alpesud, les 136 collaborateurs se revendiquent désormais de Duransia. »
Un nom qui se veut fédérateur, à l’image du fleuve dont il s’inspire : la Durance, qui traverse les départements dans lesquels œuvre la coopérative. « Nos deux structures couvraient un territoire commun, avec un ancrage fort dans les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence, qui s’étend au Var, aux Bouches-du-Rhône, au Vaucluse et à une partie de la Drôme, précise Lionel Orcière, fraîchement élu à la présidence du groupe en janvier dernier. Elles se retrouvaient en outre confrontées à des défis majeurs pour assurer leur pérennité. »
Une collecte déstabilisée
Alpesud, surtout tournée vers le négoce d’aliments pour l’élevage ovin, caprin, bovin ainsi que les engrais et les produits phytosanitaires pour la polyculture, avait atteint une taille critique. « Nous devions passer un cap », commente Lionel Orcière, ex-adhérent d’Alpesud. De son côté, GPS, axée sur la collecte de céréales, le blé dur en tête, a payé le choix des agriculteurs alpins de se tourner vers d’autres cultures alors plus rémunératrices, les plantes à parfums en particulier. Résultat, les volumes de grains se sont effondrés au fil du temps. À date, la collecte s’élève à 30 000 tonnes, dont 40 % de blé dur. « C’est un niveau supérieur aux autres années, relève Richard Sauvat, grâce à l’augmentation des surfaces cultivées, et la reconquête de parts de marché. » « Nous avançons, mais le cours du blé dur sur les marchés mondiaux reste bas, renchérit Lionel Orcière. Heureusement, les partenariats noués avec Panzani et Alpina Savoie nous permettent de mieux valoriser cette production. » Toutefois, cette baisse structurelle des volumes de céréales pèse sur l’activité. « Aujourd’hui, c’est l’approvisionnement qui porte majoritairement notre modèle économique, avec 70 % des revenus. La collecte, elle, ne représente plus que 30 % », précise le DG.
Un modèle original
Avec la fusion, Alpesud a en effet apporté un atout de taille au groupe : les magasins de sa filiale Alp’Agri développés sous l’enseigne Gamm vert, auxquels sont adossés des points de vente réservés aux professionnels. Duransia compte désormais dix jardineries, dont sept sous la bannière Gamm vert, ainsi que 13 magasins professionnels pour ses adhérents. « Nous avons construit un modèle original, explique Lionel Orcière. La plupart des magasins destinés à l’approvisionnement des agriculteurs sont couplés à un Gamm vert, et ils fonctionnent avec des équipes mutualisées de trois à quatre personnes. Ce n’est pas toujours simple de recruter des profils capables de s’adresser à la fois aux professionnels et au grand public, mais nous y parvenons. » Ce modèle permet une ouverture six jours sur sept et de larges amplitudes horaires. Il garantit en outre à la coopérative de maintenir des points de vente au plus près de ses adhérents, notamment sur les secteurs les plus reculés.
Cet ancrage local s’avère également capital pour les habitants de ces zones rurales, clients de l’enseigne Gamm vert. À cet égard, le magasin de Manosque, le plus important du groupe, a récemment été repensé pour le rendre plus attractif. Et bientôt, une borne d’accueil sera mise en place pour faciliter l’accès aux services de la boutique en ligne de l’enseigne. Un point relais colis va également être installé pour renforcer le rôle de commerce de proximité du magasin.
Reste que la branche approvisionnement du groupe est aussi aujourd’hui malmenée. « Cette activité subit les conséquences de la baisse de revenu des agriculteurs sur leurs exploitations, commente Richard Sauvat. Dans ce contexte, nous travaillons sur les moyens de rendre notre structure plus efficace, ainsi que sur la réduction des coûts. D’ores et déjà, nous avons réussi à faire des économies, nous n’en sommes toutefois qu’à la première phase. Et ce n’est qu’une partie de la solution. Il est en effet indispensable d’aller chercher de la valeur en amont en nous positionnant sur des marchés de niche pour abaisser notre dépendance aux fluctuations de prix du marché des céréales. »
Capitaliser sur les légumes secs
Dans ce cadre, Duransia poursuit la stratégie de diversification, lancée par GPS en 2018, autour du développement d’une filière légumes secs : lentilles, pois chiches, et depuis peu haricots secs, commercialisés sous la marque Les Fermiers de Provence. Aujourd’hui, une centaine de producteurs sont engagés dans cette démarche, représentant quelque 300 ha. « Pour le moment, les ventes demeurent limitées, mais il existe des marges de progression. »
La gamme a donc récemment fait l’objet d’ajustements et le marketing a été revu pour capitaliser davantage sur la proximité, l’authenticité du produit et l’image du territoire, la Provence. Afin de gagner en notoriété, un cabinet accompagne la coopérative pour cerner la cible consommatrice de ces produits et définir leur positionnement. Deux commerciaux, dont un recruté l’an dernier, sont responsables du développement de cette gamme. « Nous ciblons la restauration hors domicile, les épiceries fines, ainsi que des particuliers via nos magasins où ils sont d’ores et déjà présents », précise Lionel Orcière.
Une baguette locale
Duransia s’est également inscrite dans la démarche collective Lou Pan d’ici, lancée en 2020. « Cette filière, axée sur le blé tendre, est née de la volonté de réunir des coopératives, des meuniers et des boulangers qui veulent produire une baguette avec du blé tendre cultivé localement, explique le directeur. La construction du prix part de l’amont, dans le but de dégager de la valeur. » Aujourd’hui, 400 ha sont engagés dans cette filière, et Duransia entend bien passer à la vitesse supérieure. En effet, les résultats sont encourageants. En 2024, 2 290 t de blé tendre ont été commercialisées par le biais de cette démarche, et 83 200 € ont été distribués sous forme de prime aux adhérents. « Nous croyons à ce projet qui bénéficie du soutien de la Région Sud et du Crédit Agricole », complète le président.
Un autre débouché plus ancien est aussi source de plus-value. Il est hérité d’Alpesud qui s’est équipé, il y a plusieurs années, d’une unité d’ensachage de céréales. Elle conditionne des mélanges de céréales en sacs de 25 et 10 kg destinés aux éleveurs et au grand public. À ce jour, 25 % de la production de céréales du groupe emprunte ces circuits.
Deux filiales de négoce
Du côté de l’activité semences, la fusion a accru les besoins du groupe qui adopte une stratégie résolument volontariste. « Nous augmentons progressivement nos volumes de production, qui s’élèvent actuellement à 5 000 t, tout en améliorant l’efficacité de l’outil industriel pour diminuer les coûts d’exploitation, commente Richard Sauvat. Nous avons ainsi réduit le nombre de références, et nous sommes passés de 13 à 9 sur les variétés de blé dur. »
Duransia a d’autres cordes à son arc. Cette année, elle a ainsi relancé son activité de livraison de granulés de bois à ses adhérents ainsi qu’aux particuliers et aux collectivités. Elle possède en outre deux filiales spécialisées dans les cultures végétales. Mille & Fils, basée à Manosque, est ainsi tournée vers le négoce de cultures légumières et de plein champ, notamment les courges et pommes de terre. Les Ets Magnan, installés à Sisteron, sont de leur côté axés sur l’agrofourniture pour l’arboriculture, une filière importante dans les deux départements alpins. Deux filiales qui, à l’image de Duransia, cultivent un enracinement fort dans leur territoire.
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