Partenaire de l’agriculture bas carbone
Les dispositifs de valorisation des démarches agricoles en faveur du climat font florès. Ce tournant est stratégiquepour les entreprises de collecte et d’agrofourniture. Il permet d’engager les différents corps de métier et de réaffirmer le rôle de partenaire des agriculteurs.
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A vec 24 % des émissions totales de gaz à effet de serre (GES) dans le monde (19 % en France), l’agriculture représente une composante importante du défi climatique. Mais surtout l’agriculture est le seul secteur à pouvoir se positionner comme susceptible de faire réellement partie de la solution pour capter les gaz à effet de serre à un coût et avec une efficacité raisonnables. Il est reconnu qu’un accroissement réaliste des taux de matière organique dans les sols de 0,5 point pourrait gommer l’ensemble des GES émis depuis le début de l’ère industrielle.
En France, le secteur est encore émetteur net, mais il a déjà réduit son impact avec une baisse des émissions de 8 % entre 1990 et 2018. Une volonté politique existe en Europe et en France pour viser la neutralité carbone (lire notre dossier dans Agrodistribution n° 310, pp. 24 à 36). Les fonds du plan de relance « post-Covid » français de 100 milliards d’euros sont également souvent fléchés vers des objectifs allant dans ce sens. Le contexte actuel est donc une occasion unique pour les entreprises d’appro et de collecte de réaffirmer leurs rôles d’apporteurs de solutions et de valorisation.
1Se détacher de l’enjeu énergétique
C’est contre-intuitif mais la problématique des émissions de GES par les activités agricoles est peu reliée à celle de l’énergie. La consommation d’énergie par les activités agricoles (fabrication d’engrais azotés incluse) dans le monde, ne représente en effet que 2 % des consommations totales. Et en France, elle ne pèse que 11 % des émissions agricoles totales. Le levier de réduction des GES doit donc prioritairement viser les émissions liées aux activités d’élevage (48 % des émissions, principalement du méthane) et celles des surfaces exploitées (41 %, principalement lié à la volatilisation des formes azotées).
2Un rôle unique à jouer
Pour parvenir à réduire les émissions de gaz à effet de serre, les métiers de la distribution ont un rôle de premier plan à jouer. En effet, des intrants de nouvelle génération arrivent sur le marché avec des promesses d’efficacité supérieure. Les agriculteurs peuvent les utiliser pour réclamer ensuite des compensations sur les marchés du carbone, via leur partenaire d’agrofournitures.
En grandes cultures, de nouvelles générations d’engrais azotés qui s’appuient sur l’utilisation d’enzymes, comme les inhibiteurs d’uréase, voient le jour. Ce levier de réduction des GES est très porteur. À l’heure actuelle, une culture de blé en conduite conventionnelle ne valorise que 30 % de l’azote minéral qui lui est apporté. Une partie retourne dans l’atmosphère sous forme de protoxyde d’azote, un gaz au pouvoir de réchauffement global 310 fois supérieur à celui du CO2 (Ademe).
3Un pilotage pour les sols
Concernant les cultures, l’amélioration des bilans en GES n’est que le premier étage de la fusée. C’est une porte d’entrée vers le cœur de l’enjeu climatique qui n’est pas seulement la neutralité carbone, mais le stockage dans les sols. Là encore, l’agrofourniture a une carte à jouer en misant notamment sur un marché en plein essor, qui est celui des activateurs de sol. Grâce à des prébiotiques, des oligo-éléments ou des inocula de bactéries, il est en effet possible de cibler des fonctions précises dans la microbiologie des sols et d’améliorer les bilans humiques.
4Un cadre mouvant
Le sujet du carbone est suffisamment connu pour que des référentiels existent avec une reconnaissance pouvant ouvrir des droits sur le marché du carbone. Néanmoins, ces référentiels sont amenés à évoluer au fil des avancées scientifiques. Pour les acteurs de ces marchés, cela suppose d’être agile. Des pratiques préconisées aujourd’hui en faveur du stockage dans les sols ne le seront peut-être plus demain. Le sujet des couverts végétaux hivernaux, hérité de l’agriculture tropicale, fait débat sous nos latitudes. Les plantes immatures activeraient la minéralisation de l’humus autour de leurs racines (effet d’amorçage de la rhizosphère). La gestion des résidus et leur capacité à stocker durablement le carbone dans le sol devront aussi prendre en compte l’existence des différentes familles de constructeurs d’humus du sol plus ou moins efficaces, plus ou moins sensibles à la faim d’azote.
5Valoriser la collecte
Il est logique également qu’en plus de l’agrofourniture, la collecte s’empare du sujet. Les coopératives et les négoces reçoivent en effet de l’agriculteur un « mandat » pour valoriser au mieux sa production. Cette mission est naturelle pour les OS qui sont légitimes pour aller chercher toutes les primes liées à la production. C’est d’autant plus salutaire que le secteur des grandes cultures a cruellement besoin de différencier des productions qui se trouvent banalisées sur le marché mondial.
Alexis Dufumier
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