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Réagir à une situation de détresse

Logo de la nouvelle initative pilotée par Idele, le Réseau Agri-Sentinelles.

Le sujet sensible du suicide des agriculteurs a conduit à la création du Réseau Agri-Sentinelles et à un projet de loi du Sénat débattu le 12 décembre. Pour aider à gérer une telle situation de détresse, Maëlle Maitrallain, du Réseau Motival, sensibilise sur les attitudes à adopter, lors de ses formations.

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Le Sénat s’est engagé dernièrement sur le dossier sensible du suicide en agriculture. Il souhaite mettre les établissements bancaires dans la boucle par un projet de loi déposé en septembre et qui fera l’objet d’un premier débat public le 12 décembre prochain. Cette proposition de loi a pour but de fixer l’obligation légale pour tout établissement bancaire ou financier de repérer, sans porter atteinte au secret professionnel qui lui incombe, les difficultés financières d’un client chef d’exploitation agricole ou salarié agricole et de l’orienter vers un accompagnement social et psychologique.

De son côté, dans une communication de septembre 2019, la MSA établissait un bilan concernant le sujet délicat du suicide. Elle annonce que chaque jour, un exploitant met fin à sa vie, selon les données recueillies en 2015 avec le concours de la SNDS. Si ces organismes signalent que le taux de suicide augmente pour la tranche d’âge jusqu’à 40 ans, ce sont toujours les plus de 65 ans qui, principalement, passent à l’acte, ainsi que les hommes, soit dans les deux cas environ 75 % des 372 exploitants ainsi décédés.

Plusieurs voies pour s’informer et se former

Nombreux sont les technico-commerciaux qui se trouvent face à des agriculteurs en détresse. Ils ont toutefois à disposition plusieurs voies d’accompagnement pour appréhender au mieux une telle situation et pouvoir alerter au plus tôt, afin qu’un accompagnement adapté soit mis en œuvre.

Il y a bien sûr la MSA, qui dispense des formations également auprès des agents d’organismes en contact direct avec des agriculteurs et a mis en place pour les agriculteurs un numéro d’écoute, Agri’écoute (09 69 39 29 19). Chacune des 35 MSA est dotée d’ailleurs depuis 2011 d’une cellule pluridisciplinaire de prévention du suicide composée de professionnels de la santé et du social. En 2018, 1 654 situations ont été détectées et, parmi elles, 1 355 ont été accompagnées.

Le nouveau Réseau Agri-Sentinelles

En septembre 2019, a été lancé le site web du Réseau Agri-Sentinelles, créé un an auparavant et piloté par l’institut de l’élevage Idele, qui veut sensibiliser notamment tout technicien, vétérinaire ou conseiller agricole en contact au quotidien avec des éleveurs. Ce site web dédié met à disposition des informations autour de trois temps forts graduels, « repérer, alerter et agir », et propose des contacts de professionnels de l’accompagnement ainsi qu’un catalogue de formations pour monter en compétences sur l’écoute et le repérage des agriculteurs en détresse. Ce projet a été réalisé à la demande d’Allice, union des coopératives d’insémination, à la suite d’un vécu compliqué d’un de ses techniciens inséminateurs. Il est financé par Coop de France dans le cadre des fonds Casdar.

« Nous souhaitons informer tout professionnel intervenant en élevage sur la détection des situations de détresse, sur les premiers mots et premiers gestes à adopter avec des agriculteurs en difficulté », explique Delphine Neumeister, d’Idele, co-animatrice avec Elsa Delanoue du Réseau Agri-Sentinelles. Des journées d’information et de sensibilisation devraient être organisées en région courant 2020.

S’engager dans un tel réseau ne relève d’aucune obligation ; il est juste recommandé de suivre une formation pour aborder au mieux toute situation de détresse tout en s’en protégeant.

Les attitudes à adopter

À la fin de son cycle de formation commerciale, ou dans le cadre d’une formation spécifique, Maëlle Maitrallain, formatrice consultante du Réseau Motival, propose un module sur les situations sensibles qui aborde notamment la question du suicide. Elle partage ainsi avec les stagiaires les attitudes à adopter face à un agriculteur qui affirme vouloir passer à l’acte. Elle invite à ne pas minimiser ses propos en demandant des détails sur le comment, le où et le quand.

« Plus le plan est précis et rapproché dans le temps, au plus vite, il faut contacter les pompiers (112 depuis un portable ou 15 depuis un fixe) », souligne Maëlle Maitrallain qui complète avec quelques conseils établis avec des professionnels de la santé :

- ne pas banaliser le propos de la personne en détresse car c’est toujours à prendre au sérieux,

- ne jamais promettre le secret,

- éviter d’être moralisateur ou de juger les causes de son propos,

- ne pas distribuer des recettes inefficaces comme secoue-toi, va faire du sport, n’y pense plus,

- éviter les ça ira mieux demain, tu as tout pour être heureux, tu n’as pas de raison de te plaindre,

- rester calme et à l’écoute

- aider la personne à exprimer ses émotions,

- l’encourager à évaluer sa situation et l’aider à trouver d’autres possibilités que le suicide.

Hélène Laurandel

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