Dans l'enfer du prix
SAPEVILLE, MARS 2017
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Camille rentre dans la cour d'une ferme. La jeune technico-commerciale de 25 ans vient de terminer un tour de plaine chez Pascal, à la tête d'une exploitation de 150 ha. Il n'a pas pu l'accompagner car il devait veiller sur un de ses enfants malade et l'a alors invitée à passer le voir après sa visite des parcelles de blé. Pascal l'accueille dans le salon où se repose sur le canapé le petit dernier de 4 ans.
Camille sort sa tablette et lui montre la série de photos prises. Ils font le point sur l'enherbement des parcelles et sur l'état végétatif du blé. L'ensemble des surfaces est arrivé au stade épi 1 cm. Le second apport azoté va pouvoir être réalisé. Le plan de fumure est ressorti. C'est alors que Pascal se rend compte qu'il n'aura pas assez d'engrais azotés. « Camille, je refais le point et je te fais signe pour la commande. Je vais devoir te laisser, le petit se réveille. »
C'est un peu plus rassurée que la jeune femme quitte l'exploitation de son client qu'elle suit depuis son arrivée dans l'entreprise, trois ans auparavant après un bac + 3. L'équipe de 20 TC l'a bien accueillie d'autant plus que deux d'entre eux sont également des femmes, dans la trentaine. Elle a bien droit à quelques oeillades, car elle est jolie et vive. Elle en sourit et prend le parti d'en blaguer. Aujourd'hui, elle repart plus sereine de chez Pascal, car la veille, le Gaec du Bois Tordu lui a annoncé qu'il faisait affaire avec un concurrent mieux placé en prix pour un complément de solution azotée. Elle avait pourtant passé du temps avec les deux associés lors d'un tour de plaine et des analyses du sol après la dernière récolte.
Le lendemain, arrivée au siège social de son entreprise, elle croise Damien, son voisin de bureau. « Pfff, je suis trop dégoûté ce midi, je viens d'apprendre que Franck va commander son azote ailleurs. » Elle le regarde soulagée, en fait : « Ouf, je ne suis pas la seule alors ! » A peine a-t-elle terminé sa phrase que son mobile vibre dans sa poche. « Oui, Pascal ? Ah, tu ne prends pas ton complément d'azote chez nous ? Et pourquoi ? Une question de prix. Pourtant, tu es toujours satisfait de mes conseils, et j'ai parlé longtemps avec toi... D'accord, à une autre fois. » Déconfite, elle regarde Damien qui lui dit tout doucement « Allez, c'est une mauvaise série. Ne te laisse pas abattre. »
Hélène Laurandel
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