Login

Coupable recouvrement

JEUDI 4 NOVEMBRE, FERME DE L'ÉTANG-SONDURE

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Ce matin-là, Thierry est remonté comme une pendule. Il a bien écouté les conseils de ses collègues et se sent prêt à réclamer à Fabrice Lesourd, l'un de ses plus gros clients, ce qu'il doit à son employeur, avant de passer une nouvelle commande.

Cette fois, c'est sûr, il est bien décidé à ne pas se laisser influencer. Il a bien préparé le rendez-vous au téléphone avec Fabrice et a sollicité Nicole, sa collègue de la compta, pour faire un peu pression avec l'envoi de courriers.

Lorsque Fabrice lui ouvre la porte, son fils de quatre ans dans les bras, Thierry comprend toutefois rapidement qu'il aura du mal à faire passer tous les arguments mûrement répétés dans sa tête. De toute façon, il n'a pas le temps de dire un mot, le jeune agriculteur dégaine le premier.

" Bonjour Thierry. Excuse-moi, mais c'est un peu la panique à la maison ce matin. Nathalie doit emmener le petit chez le médecin, il nous fait une otite. Moi je ne peux pas, il faut absolument que je finisse mes semis de blé, avec le temps pourri qu'ils annoncent dès ce soir. Du coup, Nathalie doit prendre sa journée, mais ça gueule dans sa boîte. C'est vraiment pas le moment qu'elle perde son nouveau boulot, on a déjà du mal à boucler les fins de mois… "

Entre les pleurs du petit Lucas et les virevoltes de Nathalie dans la cuisine, Thierry n'écoute même plus le débit incessant des litanies de Fabrice. Plus que jamais, il se dit que cette mission d'encaisseur n'a rien à voir avec ce pour quoi on l'emploie. Qu'il est payé pour fournir des conseils agronomiques, pas pour martyriser une pauvre famille.

Tout ce que Thierry veut, c'est être dans un champ, avec ses bottes, et discuter tranquillement technique avec cet agriculteur d'habitude si passionné par son métier. Il se voit accroupi derrière le semoir, en train de faire remarquer à Thierry qu'il devrait ajuster la densité de son blé pour éviter les problèmes de maladies qu'il a connu cette année dans cette parcelle.

Prenant justement conscience de l'air absent de Thierry, Fabrice Lesourd l'interpelle tout à coup plus directement : " Au fait Thierry, avec tout ça, je ne me rappelle plus. Tu viens pour quoi déjà ce matin ?

Laurent Caillaud

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement