Les agris peu informés
Bien que directement concernés par la mise en place d’un conseil stratégique obligatoire, les agriculteurs sont peu au courant. Côté conseillers, la bataille est lancée pour ce nouveau marché.
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Si la séparation fait grand bruit, deux tiers des agriculteurs n’ont pas connaissance de l’obligation future d’un conseil stratégique, révèle notre sondage Agrodistribution-ADquation (ci-contre). « Il y a un vrai travail de communication à faire, et tant que nous n’avons pas tous les éléments, c’est compliqué, justifie Émilie Rannou, de La Coopération agricole. Et l’encadrement des relations commerciales dans la loi EGalim a beaucoup focalisé l’attention. » Reste que ce conseil va devoir être donné, et la grande question est : par qui ? Sachant que la structure devra avoir l’agrément conseil indépendant. La tendance, chez les distributeurs agricoles, étant au choix de la vente, ce ne sera pas eux. Côté agriculteurs, le sondage montre qu’ils penchent vers les chambres d’agriculture. Actuellement, celles-ci sont titulaires de l’agrément conseil indépendant, qui prendra en compte, après le 1er janvier 2021, les règles supplémentaires concernant les capitaux et la gouvernance. Elles pourront donc proposer des prestations de conseil stratégique, une façon aussi de remplir les caisses alors que les temps sont durs. Chez les conseillers indépendants, « on ne va pas courir après le conseil stratégique, juge Hervé Tertrais, président du PCIA, représentant la profession. Mais on fera celui chez nos adhérents car on connaît l’exploitation. »
Les Ceta frileux
Côté Ceta, la complexité administrative rend prudent. « En creusant, on se demande si c’est vraiment une opportunité pour nous, admet Romain Cintrat, président de l’association des Ceta de France. Cela va rajouter une couche de contraintes réglementaires à nos structures. On n’a pas forcément le temps et les moyens pour cela. » Comme pour Hervé Tertrais, sa crainte est que nombre d’acteurs se positionnent sur ce créneau, et que la qualité du conseil stratégique s’en ressente. Dans les campagnes, certains commencent déjà à taper aux portes des fermes, arguant que la future séparation nécessite un conseil indépendant. D’autres réfléchissent à se lancer. « Beaucoup de gens appellent pour se mettre à leur compte, rapporte Hervé Tertrais. On m’a demandé de créer des antennes partout sauf dans le Sud-Est ! » Une volonté pas encore traduite en actes. « Les gens attendent de voir », précise le conseiller. Chez les syndicats, les avis sont partagés. À la Coordination rurale, le président Bernard Lannes est très sceptique : « On va continuer comme avant mais on va payer plus cher ». Par voie de communiqué, la FNSEA dénonce aussi des charges supplémentaires. A contrario, « le conseil stratégique est très intéressant, juge Valentin Beauval, membre de la commission nationale pesticides de la Confédération paysanne. L’approche globale est essentielle pour réduire les pesticides. » Il souhaiterait un coup de pouce de l’État en matière de coût et s’inquiète du manque de personnes formées. Quant aux chefs d’exploitation interrogés par ADquation, le sujet fait débat : 49 % perçoivent cette mesure négativement, une proportion qui s’élève à 60 % chez ceux qui sont au courant de cette obligation.
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