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Réglementation : l’idéal européen

Initié il y a dix ans, le règlement européen harmonisé, soutenu par les fabricants, est désormais fixé. Il s’appliquera à l’été 2022, une fois les normes établies.

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En septembre 2009, les metteurs en marché, ainsi que les représentants de la Commission et des États membres, étaient réunis à Bercy pour impulser l’ébauche d’une réglementation européenne harmonisée sur l’ensemble des matières fertilisantes et supports de culture. On parlait alors d’un horizon à trois ou quatre ans mais il aura fallu dix ans pour que le rêve devienne réalité. Le règlement européen 2019/1009, établissant les règles relatives à la mise à disposition sur le marché des fertilisants UE, a été adopté le 5 juin 2019 et publié au JO le 25 juin. Il met ainsi sur un pied d’égalité tous les fertilisants, minéraux et organiques, biostimulants et supports de culture. Il entrera en application le 16 juillet 2022 en abrogeant le règlement CE 2003/2003 qui était réservé aux fertilisants minéraux. Mais il n’écrase pas les réglementations nationales, les AMM et normes locales restant valides. « Un industriel détenteur d’AMM pourra continuer sous ce régime ou respecter les nouvelles dispositions du règlement européen », traduit Oriane Mazerolles, à la DGCCRF. Et de citer, parmi les autres avancées, l’instauration de seuils d’innocuité ou encore des règles communes pour l’évaluation des produits et un marquage CE permettant la libre circulation dans toute l’Europe des fertilisants conformes à la réglementation. Pour les fabricants et metteurs en marché, cela signifie un seul et unique marché directement accessible. « C’est un gros ballon d’oxygène, notamment pour les PME, car ce règlement va leur permettre d’investir davantage dans la recherche, de se battre à armes égales et d’exporter, savoure Benoît Planques, président du syndicat Afaïa. La norme européenne, considérée comme très qualitative, va pouvoir être utilisée comme une référence dans d’autres juridictions qui n’ont pas de norme pertinente, au Maghreb ou au Moyen-Orient par exemple, ce qui peut faciliter le business pour nos propres entreprises. Quant aux agriculteurs, ils pourront avoir, quel que soit leur pays, accès aux mêmes produits innovants avec des gages de qualité et de performances communs, et ainsi produire sans distorsion de concurrence. »

Cap sur la normalisation

Ce nouveau cadre réglementaire est basé à la fois sur le respect indispensable d’exigences essentielles en termes de qualité (efficacité) et de sécurité (innocuité), avec des teneurs minimales en éléments fertilisants à respecter et l’intégration de seuils pour les contaminants, ainsi que sur l’obligation de procéder à une évaluation de la conformité adaptée aux risques potentiels, avec des niveaux de contraintes variables en fonction des fertilisants.

Il repose sur l’application de normes techniques harmonisées de facto à l’ensemble du marché communautaire, et qui seront élaborées sous l’égide du Conseil européen pour la normalisation (CEN), qui regroupe les organismes nationaux de normalisation. « Chacune des catégories de fertilisants devra utiliser ces normes, nécessaires pour effectuer les analyses ou essais dans le but de vérifier la présomption de conformité du produit », explique Benoît Planques. Le début de ces travaux de normalisation est prévu en avril 2020, pour une publication au JO au plus tard en avril 2024 (avec des versions allégées dans l’intervalle de temps).

Par exemple, rien que pour les biostimulants, il y aura au moins 34 normes à élaborer, sous l’égide d’un comité technique dédié, le CEN/TC 455 dont Afnor normalisation assure le secrétariat. Pour cette catégorie, cinq groupes de travail vont être mis sur pied : échantillonnage, revendications, microorganismes pathogènes et non pathogènes, autres paramètres d’innocuité, étiquetage et dénominations.

Autre changement de taille : il n’y a plus de dénomination de type. Ainsi, les termes comme ammonitrate n’existent plus. En revanche, un fertilisant sera constitué de matières premières parmi 11 catégories de matières constitutives des produits (CMC) et devra se conformer à l’une des 7 catégories fonctionnelles de produits ou PFC (engrais, AMB, biostimulant…), la documentation technique (description générale, fonction revendiquée, utilisation attendue…) découlant de cette formulation.

De l’autodéclaration à l’audit

Pour l’évaluation de la conformité et donc l’obtention de la marque CE, il y aura plusieurs possibilités en fonction des PFC et des CMC, et donc de la dangerosité potentielle du fertilisant. « Par exemple, un chlorure de potassium sera moins contrôlé qu’un fertilisant organique, qui peut contenir des pathogènes », illustre Estelle Vallin, directrice de l’Afcome, l’association française de commercialisation et de mélange d’engrais. Cela ira donc de l’autodéclaration (contrôle interne), qui couvrira principalement les engrais minéraux, jusqu’à des systèmes de contrôle par organisme notifié : dépôt de dossier, voire audits annuels pour vérifier que le système qualité de l’entreprise permet d’atteindre les exigences en termes de sécurité et de protection de l’environnement. « Ce dernier module semble plus adapté pour des entreprises produisant de nombreuses formulations ou changeant régulièrement de matières premières », commente Benoît Planques, tout en précisant que « les États membres pourront de toute façon contrôler et challenger tous les produits ».

Quant au marquage réglementaire, il comprendra les exigences générales d’étiquetage, les exigences spécifiques à chaque PFC, le marquage CE et le numéro de l’organisme notifié. « Un guide d’orientation sur l’étiquetage avec des exemples concrets doit être publié par la Commission vers le 16 juillet 2020 », informe Estelle Vallin.

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