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Mondelez s’ouvre à la blockchain

Salon de l'Agriculture 2020, stand de Mondelez. © Cédric FAIMALI

À l’origine du programme Harmony, Mondelez International, propriétaire de la marque Lu, démarre une blockchain pour le Véritable Petit Beurre, ce produit emblématique de la biscuiterie, avec trois coopératives et un négoce.

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Au Salon de l’agriculture, Mondelēz International affichait sa fierté : « Pour la première fois en France, une marque de biscuit met en œuvre la blockchain sur un de ses produits phares », en l’occurrence le Véritable Petit Beurre de Lu. Cette technologie, rappelons-le, constitue un registre digital immuable contenant l’historique de tous les échanges effectués entre les opérateurs économiques d’une filière.

Portraits d’agriculteurs

Pour Mondelēz, il s’agit de renforcer le lien de confiance avec les consommateurs et valoriser en toute transparence les étapes du parcours du blé ainsi que le savoir-faire des acteurs engagés. Concrètement, dès cet été, grâce au scan du QR code apposé sur l’emballage, qui va d’ailleurs être relooké, chaque consommateur pourra accéder via une plateforme sécurisée, depuis son smartphone, à des informations fiables et infalsifiables, liées au numéro du lot auquel est rattaché le paquet en question. Celles-ci concerneront le lieu de la récolte du blé, les lieux et dates d’écrasement de la farine et de fabrication des biscuits, et le portrait d’agriculteurs qui cultivent ce blé selon la charte Harmony.

« Dans chaque paquet de biscuits, il y a grosso modo une centaine de producteurs de blé derrière et plusieurs OS, convient Cécile Doinel (photo), responsable qualité du programme Harmony en Europe. Ce qui peut faire sens pour le consommateur, ce n’est pas de lister ces agriculteurs, mais c’est de localiser sur une carte les différentes parcelles liées au paquet qu’il a entre les mains, et voir qu’elles sont situées dans un rayon de 100 km autour de l’usine. En revanche, on veut valoriser le côté humain, et on va constituer un pool d’agriculteurs pour qu’ils puissent donner leur nom, leur localité, leur photo. On poussera de manière aléatoire quelques agriculteurs forcément impliqués dans le lot. On est en train de calculer justement le nombre minimal de producteurs qu’il nous faut pour pouvoir toujours en afficher quelques-uns. »

Traçabilité structurée

Ce projet, insiste Mondelēz, n’aurait pas pu voir le jour sans l’appui de Connecting Food, une start-up spécialisée dans le déploiement de la blockchain dans le secteur alimentaire. Ni sans l’engagement de l’usine de fabrication du Véritable Petit Beurre à La Haye-Fouassière (Loire-Atlantique), des deux meuniers et des quatre OS partenaires (CAPL, Cavac, Soufflet et Terrena).

À la Cavac, « on a tout de suite été motivé par ce projet, relate Thierry Guibert, responsable filières végétales, car la transparence est un élément indispensable pour le consommateur. Cela permet de mettre en lumière le savoir-faire de nos producteurs et de notre entreprise. Nous pensons que demain, cela va s’appliquer à d’autres domaines, et ce projet permet de nous faire la main pour le dupliquer derrière. »

Même état d’esprit chez Soufflet. « C’est une première concrétisation, on compte bien utiliser la blockchain comme support de nos filières tracées », avance Fabrice Bourjot, responsable développement blé chez Moulins Soufflet. Il évoque, avec cette technologie, un « gros changement » : la livraison en temps réel des informations liées à chaque lot de farine. « Cela rend plus robustes nos pratiques internes. » À l’usine de la Haye-Fouassière, on se félicite de la structuration de la traçabilité permise par cette technologie. « Même s’il y aura toujours à un moment donné une intervention humaine, ajoute Cécile Doinel, Connecting Food est en train d’automatiser l’ensemble des flux pour renforcer, sur toute la chaîne, la vérification de la cohérence des informations, par exemple des volumes de blé qui sont transportées d’une cellule à une autre ou de l’OS au meunier. »

12 Indicateurs à valider

Au-delà de cette possibilité de tracer de manière transparente l’origine de son blé, Mondelēz développe la systématisation de la remontée des données des pratiques agricoles sur le terrain pour calculer et suivre, avec Agrosolutions, 12 indicateurs de performance économique et agroenvironnementale tels que la balance globale azotée, les émissions de gaz à effet de serre, l’eutrophisation de l’eau, et évaluer la plus-value des pratiques de la charte Harmony par rapport à un blé conventionnel. « Les premiers résultats sont encourageants, avance la responsable qualité, mais nous serons en mesure de communiquer seulement lorsque ces méthodologies pointues auront été validées par des experts indépendants. »

Si la biodiversité est un axe emblématique d’Harmony, avec l’obligation pour les agriculteurs de dédier 3 % de leur surface de blé en jachère mellifère, le programme recouvre une approche plus globale : réduction des phytos, sélection variétale, raisonnement de la fertilisation, utilisation d’OAD, rotations culturales allongées, mise en place de précédents légumineuses (9 % des surfaces pour Harmony contre 5 % en moyenne en France), etc. Ainsi, Mondelēz avance le chiffre d’un IFT réduit de 20 % et deux tiers des parcelles Harmony n’utilisent pas de régulateurs de croissance. Surtout, « la dynamique que l’on donne à notre charte, c’est de retravailler son contenu chaque année avec nos partenaires ». Quant au montant de la prime versée, l’industriel reste discret. Mais, « avec un taux de fidélisation de nos producteurs de 60 à 75 % en France, ça montre qu’ils s’y retrouvent. Et nous faisons en sorte, avec les OS, d’être en cohérence entre l’effort attendu dans la mise en place des pratiques et la rémunération qu’ils en tirent derrière. »

Renaud Fourreaux

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