Betteraves sucrières Le retour de la sélection en France
Avec le rachat de SESVanderHave par Florimond Desprez, et de Strube par Deleplanque, la France assure à nouveau le leadership en betterave sucrière.
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Entre la betterave sucrière et la France, c’est une longue histoire qui a démarré avec Napoléon Ier, mais qui a été faite de va-et-vient. L’essor de l’industrie sucrière s’est accompagné de celui des semences de betteraves. Si la multiplication de ces semences est à l’origine de nombreuses maisons de semences du nord de la France, comme Lemaire Deffontaines ou Florimond Desprez, elle s’est ensuite déplacée vers d’autres régions françaises (lire encadré).
Deux paris très audacieux
La France était aussi un des tout premiers acteurs de la sélection des betteraves jusqu’à ce que la découverte de la monogermie lui fasse peu à peu perdre pied. L’essentiel de la sélection est alors passé dans les mains d’autres sélectionneurs européens, comme Hilleshög ou KWS.
Seul Florimond Desprez avait maintenu une activité de recherche dans ce domaine, ce qui lui a permis un pari très audacieux, celui de racheter en 2005 une entreprise plus que deux fois plus importante que lui, SESVanderHave. En 2018, c’est au tour de Deleplanque de s’aventurer dans un pari aussi osé, reprendre le sélectionneur allemand Strube, dont il était distributeur exclusif en France, une entreprise, là encore, deux fois plus grosse que lui. « Cette reprise n’était absolument pas prévue, reconnaît Éric Verjux, président de Deleplanque. Le rachat a été bouclé avec l’aide des salariés de la société allemande d’enrobage Suet et d’Unigrains. » En 2019, si le groupe allemand KWS est leader mondial en semences de betteraves, Florimond Desprez-SESVanderHave est numéro 1 en France, et avec Deleplanque-Strube, les deux groupes français assurent ensemble 57 % des ventes de semences de betteraves sur notre territoire. La sélection s’est d’ailleurs fortement concentrée, elle ne compte plus que quatre entreprises en Europe. Syngenta, qui détenait Hilleshog, s’est désengagé du secteur en 2017, en revendant sa filiale au groupe coopératif danois DLF. Il faut dire que la production de betteraves, avec la fin des quotas et l’effondrement des cours mondiaux, vit une période difficile. « Les surfaces augmentent de 20 % une année, chutent de 8 % l’année suivante, note Alice Lorriaux, responsable marketing, communication et développement de SESVanderHave. Pour les industriels, il ne faudrait pas qu’elles fluctuent trop. Pour les semenciers, c’est aussi compliqué à gérer, notamment pour planifier la production de semences. »
Attente très forte des producteurs
En même temps, la filière attend beaucoup de la sélection. « Il nous faut des rendements plus élevés et des betteraves qui se conservent longtemps pour rester compétitifs, mais aussi des betteraves plus rustiques, résistantes à la jaunisse et aux autres maladies, pour réduire les IFT et faire face aux produits phytos qui disparaissent, souligne Benoît Carton, directeur de la CGB en Normandie et de la coopérative C-S2B qui distribue 7 % des semences de betteraves en France. Pour que la recherche avance vite, il y a le programme Aker, mais il faut aussi que les sélectionneurs puissent avoir recours aux nouvelles techniques de sélection NBT. » Il regrette aussi qu’en France, on ne se batte pas à armes égales avec les autres pays européens. « Quatorze pays sur 18 ont obtenu des dérogations pour utiliser des néonicotinoïdes en traitement de semences ou en foliaires, pas la France », indique-t-il. Pour faire face aux difficultés de marché, la CGB avait aussi soulevé la question du prix des semences. « Lorsque les surfaces ont gagné 20 %, il aurait été logique que leur prix baisse, mais ça n’a pas été le cas, ajoute Benoît Carton. Seul le prix des variétés de deux ans et plus a été bloqué. C’est en Belgique et en France que le prix des semences est le plus élevé. Est-il normal qu’il soit 30, 40, 50 € plus bas, voire davantage, en Pologne, Ukraine ou Russie ? L’écart de génétique n’est pas aussi important que cela. »
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