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Moisson 2019 Un maïs nommé désir

En France, la petite récolte attendue en maïs grain peine à arriver jusqu’aux silos. Comme aux États-Unis, où le feuilleton de l’été n’est pas fini et continue d’influer sur les cours mondiaux.

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Ce n’est pas une surprise, la récolte française de maïs grain ne s’annonce pas mirobolante. La sécheresse quasi généralisée et les vagues de chaleur ont fortement entamé le potentiel de production, même pour des cultures irriguées dans des bassins sujets à des restrictions d’irrigation. Ainsi, le rendement moyen est estimé en baisse (85,9 q/ha selon Agreste, 89,5 q/ha selon l’AGPM). La production se maintiendrait tout juste au niveau bas de l’an dernier (12,4 à 12,8 Mt), grâce à une hausse des surfaces de près de 7 %. Par ailleurs, les transferts entre maïs grain et fourrage pourraient atteindre 60 000 ha du fait du déficit fourrager dans certaines zones, avance l’AGPM.

Le Sud-Ouest au beau fixe

Mais, à la mi-octobre, les opérateurs n’y voyaient pas encore bien clair, la récolte ayant pris pas mal de retard, environ trois semaines par rapport à la précédente, qui était exceptionnellement précoce. Les primes à la livraison précoce n’ont pas fonctionné : 3 % de la collecte chez Maïsadour (2 €/t), par exemple. En Alsace, « pour gagner quelques points d’humidité, les agriculteurs n’étaient pas pressés d’aller dans les champs », fait savoir Michèle Waegele, responsable commercialisation à la Cac.

L’état des cultures laisse globalement à désirer : 58 % de conditions bonnes à très bonnes selon la publication Céré’Obs du 17 octobre. Elles s’étalent de 32 à 37 % de la Bourgogne jusqu’aux Pays de Loire, atteignent 57 % en Alsace, et vont jusqu’à 80 % dans le Sud-Ouest qui a tiré son épingle du jeu grâce à des pluies salvatrices. Ainsi, chez Maïsadour, la récolte s’annonce « très correcte », assure Bruno Schrijvers, chef marché collecte, avec un rendement moyen en hausse de 10 % par rapport à 2018, à 11 t/ha en sec, 12 t/ha en irrigué. En Alsace, que ce soit au Comptoir agricole ou à la Cac, on s’attend à des rendements plutôt moyens pour le secteur, proches de 110 à 115 q/ha. En revanche, les humidités n’ont rien à voir avec les taux exceptionnellement bas de l’année dernière, et se positionnent autour de 25 % dans le Sud-Ouest, jusqu’à 30 % en Alsace. Si, au premier abord, cette récolte tardive et à ce niveau d’humidité peut surprendre, en réalité les plantes se sont mises en sommeil pendant les épisodes de canicule et ont différé leurs croissances.

Fin de la chute des cours

Côté prix, après la longue période de baisse durant l’été pour atteindre un plus bas mi-septembre (161 €/t sur Euronext), ils retrouvent quelques légères couleurs sous l’influence, encore une fois, des États-Unis, sans conteste le driver de la campagne. Tout d’abord, au niveau des fondamentaux, la production est certes en retrait ( 2,8 % à 1 100 Mt, selon le CIC) mais ce sont surtout les prévisions de stocks américains de fin de campagne 2019-2020, attendus en forte baisse, qui focalisent l’attention. Surtout, le bilan est encore susceptible de fortement évoluer, comme le montrent les revirements de l’USDA au gré des conditions climatiques : des maïs au nord-ouest de la Corn Belt se sont retrouvés sous la neige dès le 10 octobre, alors que les retards de développement des cultures et de récolte étaient déjà préoccupants.

Si ces craintes de production aux États-Unis, auxquelles il faut ajouter le dénouement de la guerre commerciale sino-américaine et la relative fermeté du blé, redonnent un peu d’énergie aux prix du maïs, le flux d’import européen est cependant trop élevé pour permettre un regain plus marqué. « Les importations de maïs de l’UE connaissent un début de campagne record avec déjà 5 Mt enregistrées pour les trois premiers mois de la campagne », relate Matthieu çaldumbide, à l’AGPM. Vu ce rythme, la Commission a dû revoir à la hausse ses estimations d’importations pour la campagne 2019-2020 à 17 Mt. L’an dernier, à cette date, elle en prévoyait 15 Mt, mais les importations avaient finalement terminé au niveau inégalé de 24 Mt. L’UE avait alors importé l’équivalent du tiers de sa production. En grande partie d’Ukraine, qui se prépare elle-même à un nouveau record de production, au-delà des 35,8 Mt de la campagne passée…

Renaud Fourreaux

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