RÉCOLTE 2009 Abondance déroutante
Déjouant les prévisions, la moisson d'été se situe dans les très bonnes années. Mais si les volumes s'accumulent, les prix flanchent.
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Au petit jeu estival des estimations de récolte, certains auraient préféré bûcher sur des cahiers de vacances. Annoncée modestement « bonne » après le traditionnel coup de chaud de juin, la récolte de céréales et d'oléagineux pourrait bien constituer un record. Premier exemple : en colza, le service de la statistique et de la prospective du ministère de l'Agriculture (SSP) annonçait début juin une production de 4,5 Mt de colza, en retrait de 3 %. Elle devrait finalement être comprise entre 5,3 et 5,4 Mt, à + 12 % !
Estimations discordantes
Même revirement côté blé : la moisson annoncée début juillet par FranceAgriMer à 36 Mt, « sous réserve du maintien de conditions climatiques clémentes », est réajustée par l'établissement un mois plus tard à la hausse, entre 37,5 et 38 Mt. L'analyste privé Agritel a même enfoncé le clou en annonçant une récolte record (sans la nommer telle quelle) de 38,4 Mt, « à plus ou moins 0,5 ». Le SSP, lui, s'est retrouvé tout le mois d'août avec sa prévision à 36 Mt, visiblement sous-évaluée. Du coup, pour le SSP, la récolte de blé « marque le pas » et, pour FranceAgriMer, le blé ferait un « excellent rendement », deux sources émanant pourtant du ministère ! Espérons que le projet VisioGrains, initié par FranceAgriMer (voir ci-dessous) et censé fiabiliser les statistiques, aboutisse.
Du blé plein les silos
Si la récolte s'annonce bonne, le prix à la tonne de blé s'étiole, de 165 € début juin à 130 € fin août, sur une base Euronext. Et heureusement que le stock de report s'est subitement allégé en juin, pour retrouver son niveau d'un an avant. A ce niveau de prix, les producteurs peuvent difficilement payer leurs intrants avec la récolte. Sans réelle perspective d'amélioration, ils sont enclins à se réfugier dans le prix moyen, « parfois d'ailleurs en raison de prix d'acompte fixés un peu trop haut », reconnaît Christophe Descréaux, du négoce éponyme de l'Allier. Pour cause de prix déprimés et de débouchés peu présents, les collecteurs, eux, ne se précipitent pas pour vendre leurs grains. Mais avec les silos encore plus pleins que prévu, ils devront de toute manière déstocker quelque peu d'ici les récoltes d'automne.
« Je pense que nous sommes à un tournant », avance néanmoins Virginie Ciesla-Maudet, de la société de courtage Assertis, le regard sur la courbe du blé, tout proche du support long terme situé à 127 €/t. « Soit ce support est franchi et le cours du blé s'effondre, soit ce dernier rebondit. Il est vrai que le blé vit quelques semaines difficiles, pression de récolte oblige, mais j'aurais tendance à retenir cette dernière hypothèse », poursuit-elle, pointant du doigt une prise en compte excessive des éléments baissiers dernièrement.
Renaud Fourreaux
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