AGRICULTURE ET SANTÉ Cancer : tout n'est pas clair
Le 16 septembre dernier, le colloque " Cancer et travail en agriculture " a permis de faire le point sur l'avancement des recherches.
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Les agriculteurs seraient-ils en meilleure santé que le reste de la population ? C'est ce qu'affirme la MSA, au vu des premiers résultats d'Agrican, présentés lors du colloque " Cancer et travail en agriculture " (1). Initiée en 2005, cette étude sur la santé en milieu agricole suit 180 000 assurés agricoles actifs et retraités sur douze départements. Les premiers résultats, tirés de l'analyse des causes de décès entre 2006 et 2009, montrent que le risque de décéder d'un cancer chez les hommes et les femmes de la population agricole est respectivement de 27 % et 19 % moins élevés que pour le reste de la population française. Selon Pierre Lebailly, épidémiologiste en charge de l'étude, cette sous-mortalité s'explique notamment par le fait que les agriculteurs fument moins que le reste de la population. Or, un fumeur sur deux mourra des suites de son tabagisme. " Des résultats sans intérêt ", selon Générations Futures, qui pointe un manque d'indépendance de l'étude (financée à 2 % par l'UIPP).
Des incertitudes pour les pesticides
Et les phytos ? L'étude Agrican ne met pas nettement en évidence une surmortalité pour certains cancers, aucune conclusion concernant l'exposition aux pesticides n'est donc vraiment possible. De plus, la moyenne d'âge des sujets est de 65 ans, et seulement 48 % des agriculteurs en productions végétales ont été en contact direct avec des pesticides. Mais comme l'explique Pierre Lebailly, " cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de risques, l'étude ne fait que commencer, le suivi durera jusqu'à 2020 ". En effet, les résultats présentés ne concernent que la mortalité et non l'apparition de nouveaux cas. Les premiers résultats sur l'incidence seront disponibles dans un an.
Des études américaines plus abouties
Si l'étude Agrican n'en est qu'à ses débuts, des méta-analyses réalisées aux Etats-Unis donnent plus de résultats sur l'incidence. Il ressort nettement une plus faible apparition de cancers en général dans la population agricole. En revanche, on note une forte présence de cancers de la peau et de mélanomes malins, qui pourraient être liés à une exposition aux pesticides. Idem pour les cancers liés au système nerveux ou au sang, en nette progression dans la population agricole. Comme le rappelle Isabelle Tordjman, responsable du programme " Cancer et environnement " à l'Institut national du cancer : " Il est très difficile d'établir clairement une causalité entre un cancer et un facteur de risque. " Et ceux-ci sont multiples : pesticides, mycotoxines, poussière, UV… Mais plusieurs études sont en cours en France et en attendant, la prévention reste de mise.
Marion Coisne
(1) Colloques organisé par la MSA et l'INMA (Institut national de médecine agricole) à Tours.
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