Login

SUCRE Bras de fer avec Südzucker

« Si Saint Louis Sucre ne revient pas aux discussions, cela va lui coûter très cher ! » Didier Guillaume, ministre de l'Agriculture, a brandi cette menace fiscale contre le groupe allemand Südzucker, le 27 mars, devant les planteurs et salariés réunis à Cagny. Il a ensuite participé à une réunion de travail avec eux.A. DUFUMIER

Le groupe allemand Südzucker a décidé de faire porter l'essentiel de sa restructuration sur la France et, malgré les fortes pressions, il n'en démord pas.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

La fin des quotas et l'effondrement des cours du sucre qui s'en est suivi ont décidément de fortes répercussions chez les industriels et les producteurs de betteraves français. Après la crise de gouvernance qui s'est installée chez Tereos (lire p. 7) depuis le mois de juillet 2018, c'est au tour de Saint Louis Sucre, filiale depuis 2001 de Südzucker, de faire les frais d'une conjoncture très compliquée. Si le groupe allemand pensait fermer deux de ses quatre sucreries françaises, celles de Cagny dans le Calvados et d'Eppeville dans la Somme après la campagne 2020, sans que cela ne fasse trop de vagues, ce n'est vraiment pas le cas. Depuis qu'il a annoncé son projet le 14 février, non seulement les salariés et les planteurs du groupe se sont mobilisés à plusieurs reprises, mais les syndicats et les politiques font aussi pression sans relâche sur le groupe allemand, et ce au plus haut niveau de l'État, puisque plusieurs ministres sont déjà montés au créneau.

Pas de solutions acceptables

2 500 agriculteurs sont concernés par ce projet de fermeture, ce qui représente 36 000 ha de betteraves. De prime abord, on aurait pu penser que la situation était surtout inextricable pour les planteurs et les salariés de Cagny, car l'usine normande est isolée. Mais l'avenir semble presque aussi compliqué pour ceux d'Eppeville en Picardie. Cette sucrerie n'est qu'à 25 km de Roye, et Saint Louis Sucre a évoqué la possibilité de transférer une partie des betteraves sur ce deuxième site picard. « Mais Roye est déjà à 130 jours de fonctionnement, avec 14 000 t par jour », explique Dominique Fievez, président de la CGB Somme. Les sucreries de Tereos et Cristal Union des Hauts-de-France ne seraient pas non plus en capacité d'absorber la totalité de ce tonnage supplémentaire.

En plus des mobilisations devant les usines en France, les planteurs, les salariés et la CGB ont manifesté à Mannheim, le 12 mars, devant le siège de Südzucker. Le 13 mars, Didier Guillaume, ministre de l'Agriculture, et Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État à l'Économie, ont reçu à Paris Wolfgang Herr, président du groupe allemand, pour lui demander de revoir son projet et de « considérer toutes les options pour maintenir une activité industrielle et, notamment, d'envisager la cession de ces sites si des projets de reprise crédibles devaient émerger ».

Suppression du CICE

Le ministre de l'Agriculture est aussi en train de regarder avec les ministres de l'Économie, Bruno le Maire, et du Travail, Muriel Pénicaud, s'il est possible de priver Südzucker du crédit d'impôt (CICE) très élevé qu'il doit toucher. « Le groupe allemand contourne la loi, a indiqué Didier Guillaume devant la commission du développement durable de l'Assemblée nationale. Il ne ferme pas les entreprises, il reste cinq personnes dans les bâtiments. Il n'a donc pas à payer de plan social d'entreprise. » Les présidents de Région, Hervé Morin en Normandie et, surtout, Xavier Bertrand dans les Hauts-de-France, sont également intervenus.

Le 22 mars, le président de la CGB, Franck Sander, et son directeur général ont rencontré à leur tour les responsables du groupe allemand, mais, là encore, « aucun gage n'a été donné par Südzucker », regrette la CGB. Malgré la pression, Südzucker n'a, à ce jour, pas modifié d'un iota son projet. Seul petit espoir, le président du groupe sucrier a accepté de poursuivre les discussions avec la CGB et a accepté une nouvelle rencontre le 30 avril prochain à Strasbourg.

Blandine Cailliez

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement