Les fabricants font grise mine
Un retour aux volumes de 2006 ou 2007, un fort repli des aliments pour ruminants… Les tonnages 2009 sont en berne. L'avenir le reste aussi, car aucun signe de reprise n'apparaît, sauf en poulet. Les estimations donnent au mieux une année à - 7 %.
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Avec une prévision de - 7 à - 8 % pour 2009 (+ 0,9 % en 2008), les industriels français de l'alimentation animale sont moroses. La forte montée des tonnages d'aliments pour ruminants l'an passé (+ 8,2 %) a troublé la lisibilité des tendances à long terme. Euphorique en 2008, avec une percée incroyable de 20 % au premier semestre, pour honorer la rallonge de 15 % des quotas laitiers, ce segment masquait la peine déjà perceptible en porc (- 1,8 %) et en volaille (- 0,7 %). Dans ce secteur, seuls les aliments pondeuses et palmipèdes progressaient, la pintade ayant le plus souffert (- 8,9 %) devant le lapin (- 7,4 %). Ce qui souligne une standardisation de la production au profit du poulet et des oeufs, alors que la segmentation constituait jusqu'à présent une des forces de l'aviculture française. La baisse des tonnages d'aliments toutes espèces confondues était donc déjà amorcée au second semestre 2008 (- 2,8 %). Engagée sous de sombres auspices, 2009 confirmait la morosité dès les premiers mois avec - 7,8 % en janvier 2009 par rapport à janvier 2008, - 13 % en février, - 3,2 % en mars… La principale cause de ce repli était clairement les aliments pour bovins (- 13,3 % au premier trimestre). Mais, ils avaient tant augmenté en 2008 que, malgré cette forte baisse, ils restaient alors supérieurs à leur niveau de 2007.
Plus structurelle, la baisse des aliments pour porcs au premier trimestre (- 7 %) soulignait la décapitalisation du troupeau de truies. Quant à la volaille, hormis la pintade, toutes les espèces se repliaient (- 4,8 %). Sur les huit premiers mois de l'année (dernières statistiques connues à l'heure ou nous mettons sous presse), la perte de volume totale atteint 7,2 % (- 12 % en ruminant, - 7,1 % en porc, - 4,9 % en volaille).
Aucune reprise n'étant notée en début d'automne, sauf en poulet, le marché devrait subir une perte d'au moins 1,34 Mt (550 000 t en ruminant, 440 000 t en porc, 350 000 t en volaille). En aliments minéraux, les tendances sont identiques : « Nous n'avons pas les statistiques du troisième trimestre, mais les volumes sur la première moitié de l'année 2009 sont en recul de 14,4 % par rapport à 2008 qui avait été une bonne année (7,2 % par rapport à 2007). Ces chiffres traduisent l'impact des difficultés de l'élevage laitier, principal débouché des aliments minéraux, » indique François Guibert, secrétaire général de l'Afca-Cial.
Avec 8,2 Mt, les aliments pour volailles dominent, devant ceux pour porcs (5,9 Mt) et ruminants (4,6 Mt). Malgré sa position de leader, la France perd régulièrement des parts de marché : la production avicole a reculé en dix ans d'environ 20 %. Elle a baissé à un rythme de 2,3 % par an, alors que la production mondiale augmentait dans le même temps de 3,8 %. Pour comprendre ces raisons et proposer des solutions, les experts de l'Inra et de l'Itavi se sont livrés à un exercice de prospective sur la production avicole à l'horizon 2015. Les résultats présentés à Tours, le 20 octobre dernier, montrent que la filière avicole française souffre d'un déficit de compétitivité en prix par rapport à plusieurs de ses concurrents mondiaux, voire européens. En 2006, les coûts de production hors rémunération de l'éleveur étaient de 0,69 €/kg de poids vif en France, supérieur de 0,24 € à ceux du Brésil. Toute diminution de la protection tarifaire à l'entrée de l'UE, sous l'effet d'un accord multilatéral de libéralisation des échanges agricoles à l'OMC, ou d'accords bilatéraux de libéralisation avec les pays du Mercosur, aurait pour effet d'augmenter les importations françaises de produits avicoles et de diminuer la production hexagonale. Ce déficit de compétitivité en prix s'est aussi traduit sur les dix dernières années par la perte de positions à l'exportation, non seulement sur les pays tiers, mais aussi dans la Communauté, en raison de la croissance des productions polonaises, par exemple, et des importations croissantes des Britanniques (en provenance de Thaïlande) et des Allemands (du Brésil). Inquiets que les ventes de Rafales, au Brésil, ne se traduisent en kilos de poulet importés, les industriels de la filière avicole souhaiteraient que l'origine France soit portée non seulement sur les produits frais, mais aussi sur les produits transformés. Les quatre scénarios proposés par les experts envisagent au mieux la stabilisation de la production au niveau actuel, au pire la poursuite de la baisse, mais dans une tendance moindre que celle notée depuis dix ans.
DOSSIER RÉALISÉ PAR YANNE BOLOH
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