ENGRAIS Rebâtir un approvisionnement de proximité
Le chemin de la souveraineté française des fertilisants pourrait passer par une « discipline de filière » qui intégrerait la distribution et les agriculteurs.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Adopter une « discipline de filière » entre les fabricants, la distribution et les agriculteurs, pour soutenir l’outil industriel français de production d’engrais. Ceci dans l’intérêt partagé de garantir la disponibilité des fertilisants, la maîtrise des prix, la souveraineté alimentaire nationale et les intérêts de l’écologie. Telle est l’ambition affichée par l’Unifa (Union des industries de la fertilisation) lors de son assemblée générale, le 1er juin, à Paris. Pour en débattre, l’organisation avait convié autour de la table plusieurs représentants des agriculteurs et des filières agricoles.
Des besoins assurés à 35 %
L’enjeu est de taille depuis la période Covid et à mesure que la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine se prolonge. En 2022 et 2023, les filières ont craint des pénuries. En outre, l’industrie française de production des engrais, qui avait déjà été affaiblie ces dernières années, s’est trouvée contrainte de réduire encore ses volumes de production. Une baisse estimée à 40 % du fait des prix élevés de l’ammoniac et du gaz, et de la levée des barrières douanières européennes pour les engrais.
« En quarante ans, la France est passée d’une situation où elle était capable d’assurer 60 % de ses besoins en engrais à une situation où elle ne les assure plus qu’à 35 % », pointe la présidente de l’Unifa, Delphine Guey. « Au fil des années, la France a perdu le lien de proximité qu’elle pouvait entretenir avec ses gisements et l’approvisionnement en engrais, constate Benjamin Lammert, président de la Fop. Retrouver des acteurs forts et structurés sur le territoire permettrait aux agriculteurs français d’avoir un meilleur accès à ces ressources et donc plus de sécurité. »
Sécuriser la production
« Depuis l’épisode de Covid et la guerre en Ukraine, l’environnement de marché a changé. La question de notre autonomie en engrais se pose car la période est moins stable, moins sûre et moins abondante. Cependant, l’autonomie, ce n’est pas l’autarcie. L’autonomie, c’est avoir l’autorité stratégique et la maîtrise sur notre chaîne d’approvisionnement », insiste Dominique Chargé, président de La Coopération agricole. Le constat semble donc aujourd’hui assez unanimement partagé de l’intérêt d’avoir une filière des engrais structurée et en « circuit court » ou de proximité sur le territoire national. Cependant, les représentants de l’outil industriel français de production ont besoin de se sécuriser par des engagements, dans un contexte où la production nationale est souvent moins compétitive que l’approvisionnement sur les marchés mondiaux.
Les discussions sont aujourd’hui ouvertes sur la forme que pourrait prendre cette fameuse « discipline de filière ». Des engagements sous forme de contrats pluriannuels pourraient en faire partie. L’innovation et la décarbonation des engrais peuvent représenter des leviers de premier plan pour permettre une préférence nationale, voire européenne. L’intervention de l’État dans ce dossier semble également cruciale.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :