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Le négoce à la une Les Ets Bernard, discrets mais efficaces

D. PAILLARD

Jean-Pierre et Hubert Bernard ont développé l’entreprise de négoce familiale implantée dans le Nord, selon trois axes : céréales, fabrication d’aliments et appro. Loin des projecteurs, ils placent la proximité et le service au tout premier plan des relations avec leurs clients.Par Blandine CailliezPhotos : Denis Paillard

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Hubert et Jean-Pierre Bernard sont, comme souvent les « gens du Nord », de nature très discrète, mais avec qui les échanges sont très vite chaleureux. Leurs clients ne s’y trompent pas. S’ils leur restent fidèles, c’est qu’ils apprécient le contact direct, la rapidité avec laquelle ils répondent à leurs attentes, et leur efficacité. « L’avantage des entreprises de taille plutôt modeste comme la nôtre est de bien connaître chacun de nos clients, souligne Hubert, l’aîné, arrivé dans l’entreprise familiale en 1982, aux côtés de ses parents. Les agriculteurs savent qu’ils peuvent nous appeler directement, et obtenir une réponse précise dans les 10 minutes qui suivent. » C’est ce qu’il résume en deux mots, la proximité et le service.

« Nous sommes la cinquième génération à la tête de l’entreprise familiale, précise Jean-Pierre, qui a rejoint à son tour le négoce en 1991 et qui le gère depuis avec son frère. Les Ets Bernard ont été créés à Saint-Amand-les-Eaux, à quelques kilomètres d’ici, par notre arrière-arrière-grand-père, qui était à l’époque agriculteur et qui a eu l’idée de vendre des produits à ses voisins. Ce sont nos parents, Pierre et Jocelyne, qui ont fait le choix en 1976 de déménager l’entreprise à Lecelles, et de quitter des locaux en centre-ville pour la campagne. » Le négoce a ensuite fonctionné à partir d’un seul lieu jusqu’en 1991, et la reprise des Ets Bonte-Faille, un autre négociant en céréales de Mérignies, à 25 km de Lecelles. « Ce deuxième site était aussi implanté en plein centre de la commune, nous avons fait le choix de construire de nouvelles installations à l’extérieur du village en 1997 », indique-t-il.

Aujourd’hui, les Ets Bernard s’appuient sur deux sites, en plein cœur du département du Nord. Leur zone d’activité s’étend du nord au sud, de Lille à Cambrai, et d’est en ouest, de la frontière belge à Seclin, sur l’autoroute A1. Cela signifie qu’en plus de l’environnement concurrentiel habituel de coopératives et négociants français, ils doivent aussi faire avec la concurrence de distributeurs belges.

Une région de polyculture-élevage

Les Ets Bernard réalisent un chiffre d’affaires de 12 M€ et se sont développés selon trois axes : les céréales, la fabrication d’aliments du bétail et l’approvisionnement. L’entreprise s’appuie sur dix personnes, les deux gérants, deux technico-commerciaux, deux magasiniers, deux chauffeurs, une secrétaire comptable et un jeune en contrat de professionnalisation. Hubert Bernard a en charge l’approvisionnement en phytos et en semences et les relations avec les banques, assurances et autres partenaires, Jean-Pierre, les céréales, les engrais et l’aliment du bétail. Tous deux assurent en parallèle le suivi d’un portefeuille clients.

« Nous sommes dans une région de polyculture-élevage, souligne Hubert Bernard. Plus de la moitié de nos clients sont éleveurs en bovins lait ou bovins viande. La taille des exploitations est en train d’augmenter pour atteindre 100 à 150 ha en moyenne, et des ateliers lait qui disposent de contrats de production de 800 000 à 1 million de litres. » En production végétale, les agriculteurs sont surtout producteurs de blé, maïs grain, betteraves et pommes de terre. « Dans la région, les terres disposent d’un potentiel assez élevé, reconnaît le négociant. Les surfaces de maïs ensilage sont aussi importantes chez les éleveurs. » En grandes cultures, dans le secteur, la betterave sucrière est plutôt en perte de vitesse ces dernières années, alors que les pommes de terre sont en plein essor. « Il est de plus en plus fréquent de voir des rotations sur trois ans, avec un blé et deux têtes d’assolement », constate Nicolas Lhomme, TC productions végétales.

En ce qui concerne les céréales, le négoce a toujours investi pour répondre aux besoins des agriculteurs. Sa capacité de stockage est passée progressivement à 23 000 t, pour une collecte aujourd’hui de 26 000 à 30 000 t. « L’achat des céréales aux agriculteurs se fait essentiel à prix ferme, précise Jean-Pierre Bernard. Comme nous disposons d’une capacité de stockage importante, les agriculteurs peuvent laisser en dépôt, une grande partie de leur récolte et décider de la vente quand bon leur semble. »

L’export avant tout

Le négociant commercialise l’essentiel de ses blés et maïs à l’export vers le nord communautaire pour l’alimentation animale ou, pour le grand export, via le port de Dunkerque. « Nous vendons aussi un peu de céréales à des amidonniers du nord de la France, comme Roquette, mais c’est surtout pour l’activité aliment du bétail que nous bénéficions de la présence d’indus­triels de l’agroalimentaire dans la région, indique-t-il. Nous achetons des sous-produits à Cargill, Roquette, Tereos… ainsi qu’à des industriels belges. »

L’alimentation animale est un autre point fort de l’entreprise. « Entre les années 1990 et 2000, nous avons subi deux crises sanitaires très importantes, la vache folle et la dioxine, rappelle Hubert Bernard. À l’époque, nous achetions des aliments à des fabricants français ou belges. Par souci de traçabilité et de transparence vis-à-vis de nos clients, nous avons pris la décision de construire notre propre atelier de mash. » Depuis, le négoce est devenu exigeant sur les matières premières qu’il achète, et il fabrique l’ensemble de ses aliments. « Le fait de fabriquer un volume relativement limité par rapport à de grands groupes, 8 000 t par an, ne nous empêche pas d’être compétitifs, reconnaît Jean-Pierre Bernard. En revanche, le fait de disposer de notre propre usine nous permet de proposer à nos clients des formules à la carte, étudiées en fonction des objectifs de leur élevage. » Une possibilité que les éleveurs apprécient.

L’appui de la centrale Clef

« Nous adhérons depuis une douzaine d’années à la centrale d’achat SAS Clef, poursuit Jean-Pierre Bernard. Avec les autres dirigeants des entreprises de négoce du groupe, nous nous réunissons au moins une fois par mois, sans compter les évènements particuliers, ce qui nous permet d’échanger et de réfléchir ensemble à notre métier. La centrale nous permet surtout d’être compétitifs sur le plan des appros, en particulier en phytos et semences. Clef nous apporte une démarche de mise en marché et de valorisation des produits bien construite, et qui prend parfaitement en compte les préoccupations environnementales et les solutions alternatives. »

Les Ets Bernard ont d’ailleurs la particularité d’être un acteur important en semences. Leur chiffre d’affaires est aussi élevé que celui des phytos. « Nous avons toujours été sensibles à ce dossier, remarque Hubert Bernard, et nous vendons beaucoup de semences de maïs, aussi bien en grain qu’en fourrage. » L’entreprise voit également d’autres avantages à être membre de Clef, le fait de bénéficier des expérimentations mises en place et de l’expertise de la centrale sur le plan agronomique et réglementaire. « Nous avons aussi opté pour le logiciel Géofolia d’Isagri, pour le suivi du conseil chez nos clients, note le négociant. Là encore, c’est Clef qui a débroussaillé le dossier et nous a proposé une solution clé en main qui nous convient bien. »

« L’une de nos particularités est aussi d’être réguliers, de ne pas vouloir faire de coups, de travailler du 1er janvier au 31 décembre avec les mêmes marges, ajoute Hubert Bernard. Nos clients le savent, et même si un jour, ils répondent à des offres ultra-agressives, ils se rendent compte de l’intérêt de notre façon de travailler et reviennent rapidement vers nous. »

Pour les années à venir, les Ets Bernard n’ont pas de grands projets, si ce n’est de consolider l’existant et de continuer à être performants dans tous les domaines, pour répondre aux attentes des agriculteurs. À moyen terme, ils commencent à réfléchir au devenir de l’entreprise le jour où ils prendront leur retraite. Même si pour le moment, leurs enfants ont choisi d’autres voies que celles de l’agriculture ou du commerce, ils aimeraient que des jeunes puissent prendre la relève, dans la famille ou parmi les salariés.

© Denis Paillard - « L’une de nos particularités est aussi d’être réguliers, de ne pas vouloir “faire de coups”, de travailler du 1er janvier au 31 décembre avec les mêmes marges, se félicite Hubert Bernard, cogérant. Nos clients le savent. »

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