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Export agroalimentaire : les pays tiers déterminants

Face à la moindre performance en Europe, ce sont les pays tiers qui permettentde limiter la dégradation de la balance commerciale agricole et agroalimentaire française.

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Le solde commercial agricole et agroalimentaire ne cesse de dévisser. Il a baissé de moitié depuis 2012 pour atteindre 5,7 Mds€ en 2017 et ne représente plus que le 3e excédent de la France derrière les parfums (10,55) et les transports (6,86). Certes, les mauvaises performances céréalières de 2016 pèsent fortement, ce qui fait que le solde des échanges de produits agricoles bruts est déficitaire « pour la première fois depuis au moins trente ans », précise Agreste, mais la tendance ne date pas d'hier. Les exportations françaises continuent pourtant de bien progresser (+ 3,8 % en 2017). A part l'Algérie, l'export vers les 15 premiers clients de la France, qui sont avant tout européens, est partout en progression en 2017. Cependant, les importations augmentent davantage (+ 5,1 %) et ce phénomène est encore plus vrai, si l'on s'en tient au commerce avec l'Union européenne.

L'UE reste aux deux-tiers le principal débouché des exportations françaises, mais les performances de la France s'y dégradent significativement, notamment pour les produits transformés issus de l'élevage. Le solde commercial avec l'UE n'est plus que de 374 M€ en 2017, à peine positif, contre près de 6 Mds€ en 2012 ! Le solde avec les pays tiers, lui, reste bon an, mal an autour de 6 Mds€. Il ne compense pas les mauvaises performances sur l'UE, mais permet de ne pas décrocher totalement, et pour le coup, grâce aux produits transformés. « La balance agroalimentaire avec les pays tiers est devenue déterminante grâce aux exportations de boissons et produits laitiers surtout », appuyait Mylène Testut-Neves, directrice marchés, études et prospective de FranceAgriMer, lors d'un point sur le sujet au Sia. Dans certaines filières, la part des destinations pays tiers dans les exportations françaises atteint désormais 30 % (oeufs et ovoproduits, céréales), voire 40 % (viandes de porc et volailles, lait et produits laitiers). Pour d'autres, c'est beaucoup moins. Mais « c'est parfois essentiel pour l'équilibre de certaines filières, avertit Carole Ly, responsable de la mission Affaires européennes et internationales de FranceAgriMer. C'est parfois ce pourcentage à l'export qui fait la marge des entreprises. Sachant que les produits que l'on vend à l'export, ce n'est pas forcément ceux que l'on consomme en France. » C'est le cas des abats comme les pieds de poulets ou les oreilles de porc, des protéines animales transformées, des graisses, cuirs et peaux... A contrario, on importe du jambon et de la charcuterie à plus haute valeur ajoutée. Par conséquent, si la balance commerciale de la filière porcine française est positive en volume, elle peine à le rester en valeur, notamment en raison d'une perte de marché en Italie depuis trois ans. En revanche, pour la filière laitière toujours excédentaire malgré une moindre performance au niveau européen, le solde est positif sur les produits à haute valeur ajoutée (fromages, lait liquide), mais négatif sur ceux plus industriels (butter oil, beurre industriel). Dans le vin, la balance commerciale est de plus en plus excédentaire, en valeur du moins, sauf dans l'Union où « la France peine sur le marché allemand, réputé être un marché de petits prix, et recule sur le marché britannique très concurrentiel », note Mylène Testut-Neves. Dans les spiritueux, la PDM française dans l'UE s'accroît, tirée par le whisky et la vodka. Au global (UE et pays tiers), la France ne cesse de voir ses exportations augmenter : + 10 % en 2017 pour les vins, + 6 % pour les spiritueux.

Les Etats-Unis et la Chine tirent largement les performances mondiales de l'Hexagone, avec une croissance des exportations de 50 % depuis 2012, grâce aux boissons et aux produits laitiers, devant l'Asie du Sud-Est (+ 16 %) et le Moyen-Orient (+ 8 %). En outre, « l'Amérique du Sud et l'Afrique subsaharienne sont des zones à surveiller », signale Pascale Thieffry, chef du service agricole et agroalimentaire chez Business France. « Là où la France s'en sort le mieux, c'est là où elle est forte et compétitive chez elle, conclut Carole Ly. Elle est mieux positionnée lorsque la demande des pays tiers porte sur des produits à valeur ajoutée. Lorsqu'elle porte sur des commodités ou des produits peu transformés dont le prix reste un maître mot, sa compétitivité est questionnable. »

Renaud Fourreaux

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