Pourquoi la dynamique de marché du Superéthanol est en demi-teinte ?
Si l’E85 séduit toujours plus d’automobilistes, notamment par son tarif avantageux, la consommation a atteint un plateau en 2024 après une progression jusque-là continue. L’avenir de la filière dépend désormais des décisions qui seront prises à Bruxelles.
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1. Une consommation qui stagne
Après un bond en 2022, la consommation annuelle de Superéthanol-E85 s’est stabilisée. « En 2024, nous avons assisté à la sortie du parc automobile des premiers véhicules flex-E85 lancés il y a quinze ans, ainsi que des véhicules d’occasion vieillissants équipés de boîtiers éthanol. Parallèlement, il y a eu des achats de véhicules récents qui consomment beaucoup moins, ce qui, à parc égal, a ralenti la croissance des volumes consommés », explique la Collective du bioéthanol.
Certes, le parc total de véhicules flex-E85 a progressé de 8 % en 2024 et atteint les 400 000 exemplaires (contre 371 000 en 2023), dont 250 000 véhicules essence équipés de boîtiers et 150 000 véhicules flex-E85 d’origine. Mais l’offre de modèles neufs s’est drastiquement réduite. En 2025, Ford, acteur principal sur ce segment, a retiré de sa gamme Puma et Focus Flexifuel qui ne répondaient plus à la norme Euro 6e. Ford Kuga FHEV est donc devenu la seule référence sur le marché du neuf.
2. Un prix attractif
De son côté, le réseau de distribution se développe. Le Superéthanol-E85 a franchi le cap des 3 800 stations-service équipées en 2024, soit près de 40 % des stations de l’Hexagone. Et pour cause, ce biocarburant a de quoi séduire. Au 24 janvier 2025, son prix à la pompe était de 0,78 €/l, soit 1 € de moins que le SP95-E10. « Pour les automobilistes, cela représente une économie de 729 € par an pour 13 000 km parcourus, ce qui permet d’amortir l’investissement d’un boîtier flex-E85 (700-800 €) en un an », souligne le syndicat.
3. Un coup de pouce fiscal
De plus, une nouvelle mesure fiscale est venue renforcer l’intérêt pour l’E85. Depuis le 1er janvier, « les entreprises dont la flotte automobile est composée de voitures combinant l’électricité et le Superéthanol-E85 émettant moins de 250 g de CO2/km bénéficient d’une réduction de 40 % des émissions de CO2 pour le calcul de la taxe sur les véhicules de société », explique le collectif.
Et pour soutenir davantage la dynamique de ce marché, la filière milite pour que les véhicules convertis puissent obtenir la vignette Crit’Air 1 lorsqu’ils sont classés Crit’Air 2. Pour l’heure, seules Montpellier et Reims ont mis en place des dérogations pour que l’E85 soit reconnue dans les zones à faibles émissions.
4. Une définition à trancher
Mais l’avenir de la filière se joue à Bruxelles. Le 30 janvier, la présidente de la Commission européenne a lancé le « dialogue stratégique sur l’avenir de l’automobile ». Parmi les sujets importants, celui de la définition du carburant « neutre en carbone ». En effet, le règlement CO2 pour les véhicules légers interdira dès 2035 la vente de voitures neuves autres qu’électriques ou neutres en carbone. « La Commission a fait une première proposition de la définition des carburants neutres en carbone, et huit États membres ont plaidé en faveur des carburants de synthèse et des biocarburants. La France ne s’est pas encore prononcée compte tenu du contexte politique », relaie Nicolas Kurtsoglou, responsable carburants chez Bioéthanol France (ex-SNPAA).
En attendant, l’organisme explore la piste du Superéthanol neutre en carbone. « Il existe des coproduits de la production de carburant d’aviation durable tels que le bionaphta, une essence renouvelable qui peut remplacer les 25 % d’essence fossile présente dans le E85, fait-il savoir. Ça marche, nous l’avons démontré dans deux études et cela permettrait aussi de décarboner l’aviation encore plus vite. »
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