Partager le risque
Pour accélérer le déploiement du biocontrôle, les acteurs du secteur, dont la distribution agricole, creusent la question de la répartition du risque.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
En 2023, les produits de biocontrôle représentaient seulement 9 % du marché phytosanitaire français. Un chiffre qui n’entame pas la détermination d’Alliance Biocontrôle d’atteindre les 30 % d’ici à 2030. Même si « la marche est haute », a reconnu Céline Barthet, la présidente de l’association, lors du Sival 2025, « faire ce constat est aussi un moyen de montrer aux autorités la situation. Il faut sortir de l’incantatoire et passer un peu plus à l’action. » Et le partage du risque entre tous les acteurs de la chaîne de valeur est l’un des leviers à actionner.
Car, à l’heure actuelle, « c’est l’agriculteur qui endosse le risque lié à la transformation de son système », constate Quentin Mathieu, responsable entreprise et consommation chez Agridées. « L’activité agricole est de plus en plus risquée en raison des aléas qui se renforcent ces dernières années et, face au risque, les agriculteurs ont tendance à aller vers la solution la plus sécurisante. C’est pourquoi, aujourd’hui, on voit des coopératives et des négoces qui se structurent de manière à pouvoir assumer une partie de ce risque et accompagner les agriculteurs dans cette transition. »
Une garantie de résultat
Océalia s’est notamment lancée dans une nouvelle démarche, celle de l’économie de la fonctionnalité. En clair, l’adhérent n’achète plus des produits phytosanitaires, mais des hectares sains. « On y croit ! », affirme Matthieu Denier, directeur agrofournitures chez Océalia. Après une phase de test en 2024, la coopérative propose, dès cette année, deux offres axées sur la protection fongicide des céréales : PreDiMa de Bayer et Xarvio Healthy Fields de BASF. Ce sont pas moins de 10 000 ha de blé qui seront protégés via ces deux offres en 2025. « Cela représente 10 % des hectares que nous contrôlons en blé, dès la première année. Ces modèles sont amenés à se développer rapidement, car les adhérents sont à l’écoute de ces solutions et les conseillers sont motivés », ajoute-t-il. De plus, ce nouveau modèle permet à l’agriculteur de mieux maîtriser ses charges puisqu’il achète un hectare sain à un prix fixe, indépendamment de la pression et du nombre de traitements requis. « C’est assez séduisant », convient-il.
De son côté, les Ets Charpentier n’ont pas encore franchi le pas, mais ils s’y préparent. « Proposer des offres avec un engagement de résultats, c’est un nouveau métier, et c’est un modèle vers lequel on va aller de plus en plus », projette Nicolas Charpentier, directeur du négoce éponyme.
Vers de nouveaux dispositifs assurantiels
Quant à l’État, il multiplie les initiatives pour embarquer l’ensemble des acteurs dans cette transition. Après le Parsada et le Grand Défi biocontrôle et biostimulation, le dispositif Praam (Prise de risque amont aval et massification de pratiques visant à réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques sur les exploitations agricoles) a fait son apparition. Doté d’une enveloppe de 90 M€, cet appel à projets sera lancé au premier semestre 2025 pour faire émerger des modèles d’accompagnement à la prise de risque. Le dispositif s’adresse aux opérateurs économiques impliqués dans la valorisation des produits agricoles et en lien direct avec l’amont, tels que les coopératives et négoces, les industries agroalimentaires, les assureurs, etc. « Nos adhérents ne peuvent pas être porteurs de projet mais pourront y être associés », précise Céline Barthet.
Alliance Biocontrôle a également évoqué d’autres pistes à explorer, comme la mise en place d’incitations financières, ou encore la recherche d’une meilleure valorisation des productions agricoles issues d’itinéraires techniques utilisant ces produits. « Il faut également que les acteurs de l’aval et la grande distribution prennent leur part de risque, mettent en avant ces produits et participent, par le biais de la contractualisation, à sécuriser le revenu des agriculteurs », appuie Quentin Mathieu.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :