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Coopédom sèche à l'énergie végétale

A l'heure de son quarantenaire, la coop de déshydratation bretonne, Coopédom, adopte pour une partie de son énergie de séchage une biomasse produite localement.

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Aujourd'hui, 50 % de l'énergie utilisée par la Coopédom (Ille-et-Vilaine) pour la déshydratation des fourrages (luzerne, graminées et maïs) provient d'une biomasse produite localement. « Notre objectif est de faire fonctionner une filière courte en terme d'énergie, au lieu de faire venir du charbon d'Afrique du Sud », avance Frédéric André, responsable technique et codirigeant de cette coopérative bretonne de déshydratation. C'est donc un véritable virage énergétique que prend la Coopédom avec la mise en route en août 2009 d'un foyer biomasse. « Nous perpétuons ainsi l'esprit des fondateurs de la coopérative quarante ans plus tôt. Après l'autonomie alimentaire, nous visons l'autonomie énergétique », précise le président, Joseph Lebrun. L'énergie représente, en effet, un tiers des charges de l'entreprise.

Une aide pour implanter du miscanthus

En outre, l'impact sur l'environnement est loin d'être négligeable sur le plan des émissions de CO2. D'une part, la logistique est ramenée à un niveau local, évitant les 8 000 à 9 000 km pour importer le charbon. D'autre part, le bilan carbone du miscanthus, alimentant pour 50 % la biomasse utilisée, lui attribue d'être 100 fois moins émetteur en CO2 que le charbon. Sans parler de la captation du dioxyde de carbone permise par la culture au niveau du sol. Quant au volet économique de l'opération, l'objectif est de rester sur un même ordre de coût que pour le charbon. Encore que la nouvelle taxe carbone confère plus d'intérêt à cet investissement. En effet, elle coûtera 7 €/t de produit fini déshydraté, au lieu de 13,50 € avec une énergie fossile de type charbon. Ce nouvel investissement se monte à 1,6 M€ dont 15 % de subventions (fonds européens, conseils régional et général, Ademe). L'implantation du miscanthus est aidée par le conseil général à hauteur de 800 €/ha pour les quatre cents premiers hectares, dans le cadre de la diversification des énergies renouvelables. A ce jour, 310 ha sont en terre, l'an prochain, les 400 ha seront plantés. La Coopédom apporte aussi son obole pour motiver ses adhérents en proposant une aide de 700 €/ha. De ce fait, il reste à leur charge un coût d'implantation de 1 500 €, sachant que le miscanthus est dans une parcelle pour quinze à vingt ans. L'agriculteur touche 45 €/t de matière sèche de cette graminée énergétique originaire d'Asie. La récolte est assurée par la Coopédom. « Le fait de pouvoir utiliser le matériel de la coopérative a été décisionnel dans le choix de cette nouvelle culture. Nous avons aussi recruté une personne pour le suivi des cultures et des CDD pourraient devenir des CDI », souligne Joseph Lebrun.

D'autres initiatives énergétiques à l'étude

Cette plante couvre la moitié de la biomasse utilisée pour le nouveau foyer. L'autre moitié est apportée par des coproduits du bois de scieries locales ou de forêts exploitées par l'ONF et dont, sur les 15 % restant au sol, 5 % peuvent être exploités sans nuire à l'écosystème forestier. Au total, 15 000 t de biomasse par an sont nécessaires pour faire tourner une des deux tours de séchage du site de Domagné. Sensibilisée depuis huit ans à ce dossier énergétique, la Coopédom a fait un premier pas important, il y a trois ans, avec la technique du préfanage. Un séchage de 36 heures au champ, au lieu de transporter l'herbe aussitôt récoltée à l'usine, permet une économie de 20 % d'énergie et un gain net (salaires et amortissements nouveau matériel déduits) de 100 000 €. Ainsi, 2 500 t de charbon ont été économisées, sur les 14 000 t alors brûlées, soit 6 500 t de CO2. Et à ce jour, ce ne sont plus que 6 000 t de charbon qui sont utilisées. Pour l'instant, le projet de s'affranchir en totalité de l'énergie fossile n'est pas déterminé. Cependant, la coopérative s'intéresse à d'autres initiatives des collectivités locales comme la méthanisation et projette d'installer bientôt 1 000 m2 de panneaux photovoltaïques sur sa commune.

La Coopédom pousse un peu plus loin le dossier par l'intermédiaire de Coop de France déshydratation qui a présenté un projet domestique et collectif de vente de CO2 auprès de la Caisse des dépôts et consignations en août 2008. Entre le préfanage et le foyer biomasse, près de 180 000 € pourraient être récupérés, chaque année, par la vente des tonnes de CO2 économisées. Mais, la réponse de la Caisse des dépôts est toujours attendue.

Rendre lisible les efforts sur le CO2

Reste à donner de la lisibilité à ces actions. Chose en partie faite avec les portes ouvertes fin septembre. Son président souhaite aller plus loin avec un bilan carbone et également au niveau des producteurs. « Mais les industriels laitiers ne veulent pas segmenter leur collecte, même s'ils sont très heureux de notre présence sur leur secteur. Nous n'en tirons pas plus que cela de bénéfice. » De plus, dans le contexte actuel d'un prix du lait bas, la luzerne n'est pas forcément l'aliment le plus compétitif. « Toutefois, l'éleveur voit l'avantage pour l'animal et pour l'organisation de son temps de travail, avance Samuel Maignan, responsable administratif et codirigeant. Nous avons toujours annuellement sept à huit adhérents qui partent sur une autre voie alimentaire puis, l'année d'après, ils reviennent à la déshydratation. » Globalement, le coût de la prestation pour l'éleveur se chiffre à 116 €/t de produits secs sortie usine, en granulés (retirés à 80 % par les producteurs) ou balles (livrées en totalité par la coopérative). L'enrubannage se situe sur un même ordre de coût et l'ensilage d'herbe, clé en main, est à 100 €/t de MS.

Rationaliser l'outil

Maintenir l'adhérent à la Copédom est un point crucial dans la mesure où l'aide allouée à la déshydratation est intégrée pour moitié à ce jour dans la DPU et le sera en totalité en 2012. Donc, le producteur ne sera plus obligé d'en faire pour toucher l'aide. Aussi, au-delà des avantages apportés sur le troupeau (+ 20 % de valeur alimentaire par rapport à un ensilage) et le confort de travail (fini les chantiers d'ensilage), tout est fait pour améliorer la rentabilité de la déshydratation et maintenir un coût de prestation qui a très peu augmenté depuis des années (8 €/t sur douze ans). Ainsi, des productions complémentaires sont développées comme les mélanges fibreux depuis 2003, en grande majorité pour le compte de Sanders. Cette activité est portée par CVDA, coopérative adhérente à la Coopédom et créée pour valoriser les excédents en fourrage des adhérents. « La mission de CVDA est de faire fonctionner le plus possible les installations de Coopédom pour avoir une facture au plus juste des prestations », explique Samuel Maignan. CVDA gère aussi la vente à prix coûtants des intrants liés aux cultures (semences et phytos en légumineuses et graminées). La troisième structure, Déshyouest, filiale de Coopédom, CVDA et Codéma (coop de déshydratation en Mayenne) assure les achats de produits déshydratés, hors zone de production. Dans ce même esprit de rationalisation, l'usine produit depuis 2007 des granulés bois à partir de sciure sèche ou humide avec pour objectif à moyen terme d'atteindre les 5 000 t/an. Ces activités complémentaires permettent de transformer des CDD en CDI. Des embauches ont pu également être réalisées comme pour le préfanage avec le recrutement de trois personnes. Aujourd'hui, l'usine est à saturation avec 42 t d'eau évaporée par heure. Les gains de rentabilité se jouent donc dans les économies d'énergie ou de nouvelles productions allongeant la période d'utilisation des lignes de séchage.

Hélène Laurandel

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