VU À L'ÉTRANGER En Serbie, Axéréal organise la production de céréales

« De l'organisation de la production », c'est ainsi que Frédéric Moulin définit le modèle économique mis en place par Axéréal en Serbie. « C'est davantage que de la collecte mais ce n'est pas le système coopératif tel que nous le pratiquons en France, explique celui qui est manager Serbie-Croatie, chez Axéréal. Nous préfinançons les semences, les phytos, puis nous collectons. Nous fonctionnons plutôt comme un privé. Nous travaillons actuellement avec une cinquantaine de producteurs. Cela va de la petite structure familiale de 20 à 30 ha à des exploitations de 200 à 300 ha. Nous ne travaillons pas avec les plus grandes qui font 2 000 à 3 000 ha, et qui sont en fait des sociétés correspondant aux anciennes fermes d'Etat de l'époque communiste. Ces structures ont les moyens de stocker et n'ont surtout pas besoin de nous pour aller sur les marchés. »

« Progression régulière des rendements »

« Les rendements progressent régulièrement note Frédéric Moulin, grâce aux recours à d'autres variétés, dont des variétés françaises. De 60 q en blé, ceux-ci sont passés à 70-80 voire 90 q/ha dans certains secteurs, et ce depuis deux, trois ans. Mais la Serbie reste un pays continental avec les aléas climatiques que cela suppose : fortes gelées l'hiver, comme cette année en janvier. Le Danube a été bloqué par les glaces pendant un bon mois, empêchant tout transport fluvial. L'été, il peut y avoir des sécheresses terribles, comme une année où des maïs, qui étaient magnifiques en juin ont ensuite grillé sur place... Sachant qu'il n'y a quasiment pas d'irrigation (en Serbie, seulement 5 % des surfaces sont irriguées). La fin de la campagne 2017 aura été compliquée aussi avec de fortes chaleurs en juin, puis en juillet. En revanche, la qualité était très bonne pour les blés, avec souvent des protéines à 12, 12,5 % et un PS à 78-80. »

« Gagner la confiance des opérateurs »

Le point de départ de la présence d'Axéréal dans ce secteur d'Europe centrale est l'achat d'une malterie en Croatie, il y seize ans. Puis la coopérative s'est implantée en Serbie en 2008, afin d'être présente à l'export vers la Bosnie, la Macédoine, sur le trafic fluvial via le Danube. L'objectif est aussi d'irriguer le nord de l'Italie, fortement importatrice. « Il ne faut pas être trop pressé dans ces pays, note Frédéric Moulin, qui, résidant sur place depuis maintenant dix ans, parle couramment le serbe. Il faut se faire connaître, gagner la confiance des opérateurs et se développer progressivement. Certaines entreprises, pas forcément agricoles, s'y sont cassé les dents, car elles ont voulu faire du chiffre rapidement, même si c'est plus facile qu'il y a plusieurs années. Le pays s'est stabilisé au niveau politique. Le dinar est stable lui aussi. Certaines années, la ligne de perte de change a fait mal. »

Des silos soit en location soit achetés

Aujourd'hui, Axéréal fonctionne avec plusieurs points de collecte, des cellules que la coopérative loue en fonction de ses besoins géographiques. Elle a acheté il y a deux ans des silos à Temerin, près de Novi Sad, la deuxième ville du pays après Belgrade. La capacité de stockage y est de 10 000 t (10 cellules de 1 000 t). Le site dispose d'un séchoir au gaz. La capacité de traitement de l'ensemble est de 42 t par heure. Ces silos sont situés juste à côté de l'usine Sanders d'aliments du bétail, qu'Axéréal approvisionne. Une usine d'une capacité de 35 000 t. En revanche, à Temerin, il n'y a pas d'accès pour le transport fluvial. Tout se fait par camions. L'équipe de technico-commerciaux est composée de six personnes, toutes serbes. Axéréal est la seule coopérative française à s'être implantée en Serbie et en Croatie. Avec un concurrent principal, l'autrichien Raiffeisen, qui fonctionne sur un modèle d'engagement contractuel similaire à celui de la coopérative française. Autre acteur du marché qui se déploie de façon identique, l'union de négoces Agrogrnja (lire encadré) qui vise aussi l'international.

Dominique Péronne