VU À L'ÉTRANGER Grain Corp : l'art de stocker pas cher, vite et bien
Comment faire face à la moisson durant deux mois avec l'afflux de dizaines de camions. C'est le défi auquel les collecteurs australiens comme Grain Corp ont dû faire face.
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Lundi 1er décembre 2014, à Nhill, dans la région de Victoria au sud de l'Australie, la moisson bat son plein. Les agriculteurs souhaitent finir au plus vite. Jusqu'à fin août, les cultures se présentaient au mieux, avec des semis précoces début mai, mais il n'y a eu aucune pluviométrie pendant quatre mois, d'août à novembre. « Nous allons faire moins de 2 t/ha, heureusement, la qualité est là », précise Andrew Colbert, agriculteur travaillant sur une surface de 4 000 ha.
La proximité n'existe plus
Lorsqu'il quitte son champ en pleine moisson, distant de 25 km de Nhill, avec son camion de 30 t qu'il vient de charger dans le petit silo de report en bout de champ, Andrew a quelques craintes. « Nous allons probablement attendre au moins une bonne heure avant de pouvoir décharger le camion. La proximité n'existe plus. Les petits silos locaux ont tous été fermés pour se concentrer dans les villes proches des voies ferrées », bougonne-t-il. « Hier, j'ai mis en dépôt sans les vendre, 120 t de blé chez Grain Flow, une filiale de Cargill. J'attends d'avoir un meilleur prix, surtout que le stockage est gratuit pendant deux mois. » Aujourd'hui, Andrew a fait le choix du groupe Grain Corp, l'un des principaux collecteurs australiens, pour la destination de l'orge qu'il vient de récolter. Il l'a préféré à l'une des trois multinationales Cargill, Glencore ou encore Sumitomo, présentes elles aussi à Nhill, car pour le moment c'est celui qui paie le mieux.
A l'arrivée au silo, aucune surprise à la première étape de prise d'échantillon et d'analyse, la queue de camions en provenance des champs est impressionnante. Pas moins de douze camions devant lui. Sous un soleil de plomb, John Buschier, le responsable du silo, casque sur la tête et gilet fluo, est au service de tous. « La moisson, cette année a été très rapide. Au pic de la moisson, nous avons collecté jusqu'à 15 000 t en une journée. Pour faciliter la réception, nous avons créé depuis plusieurs années des « bunkers » (lire encadré) qui viennent en complément des silos classiques. Grâce à ce concept, nous arrivons à faire face à l'afflux des deux mois de moisson. A Nhill, il y a quatre bunkers, mais bien souvent beaucoup plus, comme à Wagga Wagga où il en a quinze. »
Des rendements similaires et des prix avantageux
Andrew Colbert en profite pour discuter avec John Bushier des prix et avec ses voisins de leurs résultats. Même si les derniers sont en deçà des espérances, l'ambiance est sereine. « Nous sommes tous dans le même cas pour les rendements. Avec notre climat, il y a peu de différence entre nous. Heureusement que les prix sont bons avec pour l'orge de malterie que je livre aujourd'hui, une rémunération de 285 $ australien la tonne, soit plus de 200 €. A défaut de gagner de l'argent, je ne vais pas en perdre. L'an passé, j'avais stocké car les cours étaient plus bas. J'ai bien fait car au mois de mars, les chinois, faute de trouver en Ukraine de l'orge, sont venus acheter directement en ferme. J'ai fait une plus-value de 15 % et j'ai été payé comptant avant livraison. Depuis, les collecteurs locaux se méfient. Ils font plus de marketing et paient à 7 jours au lieu de 30. »
Paiement à 7 jours
La première étape franchie, Andrew va peser le camion et reçoit un reçu avec le poids à plein. La jeune femme lui indique à quel bunker il doit décharger. Pas de difficulté, Andrew se présente devant la sauterelle qui va progressivement constituer ce long tas de 15 000 t de grains, à même le sol, qui sera ensuite bâché, pour une semaine, un mois ou un an, en fonction des ventes. Ces bunkers ne sont que des stockages temporaires. Ils seront ensuite repris par camions pour être expédiés soit par trains, soit par gros camions vers les ports d'exportation. John Bushier attend avec impatience la prochaine moisson, car les travaux du futur silo en béton de 40 000 t, embranchement fer, avec un raidler qui reliera directement les bunkers, vont prochainement commencer. Ils compléteront les 210 000 t actuelles. « Cela nous permettra de façon très professionnelle d'envoyer notre production par trains de vingt wagons de 2 000 t. En ce moment, elle part à 60 % par camions, plutôt la nuit, vers les ports de Portland ou Geelong, tout proches, où Grain Corp a ses silos d'exportation. »
Il ne reste plus à Andrew qu'à se présenter à la pesée à vide où lui est remis un document officiel, consultable sur internet à la minute, avec le prix, la quantité et la qualité. Il sera ensuite payé sous 7 jours.
Christophe Dequidt
Entre la première étape de prise d'échantillon et le déchargement, il faudra compter au moins une heure d'attente.
C. DEQUIDT
Le déchargement s'effectue dans l'un des quatre bunkers du collecteur Grain Corp, à Nhill.
C. DEQUIDT
Le responsable de silo, John Bushier, doit agir rapidement pour fluidifier la réception.
C. DEQUIDT
Andrew Colbert (à droite), agriculteur sur 4 000 ha, en profite pour discuter prix et rendements avec un voisin.
C. DEQUIDT
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