Face aux nouvelles évolutions, il faut adapter l'approche commerciale Repenser la morte-saison
Morte, pas morte ? Le sort de la morte-saison, particulièrement en phytos, n'est pas si tranché que cela. Entre contraintes réglementaires, logistiques et économiques, un nouvel équilibre est à retrouver tout en restant réaliste.
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" Comment un technico-commercial pourrait visiter une centaine de clients agriculteurs en huit jours, par exemple au moment du désherbage en mars, si on supprime les visites de morte-saison ? ", interroge Roland Rosseel, directeur commercial et marketing du négoce Bernard. Cette réflexion pertinente pose toute la question de l'évolution qui semble vouloir être donnée à la pratique commerciale de la morte-saison. En fait, celle-ci est prise entre plusieurs feux. D'une part, la nouvelle configuration réglementaire, avec le Grenelle, privilégie le traitement à vue et joue en défaveur de commandes passées hors saison. Mais d'autre part, distributeurs et fournisseurs ont des contraintes logistiques à gérer. Et sur le terrain, la réalité peut vite ramener le curseur en arrière. Donc que faire ? Jacques Coulon du réseau Agridis parle plus de commande de mise en place que d'acte commercial de morte-saison. " Nous avons encore peu de recul, mais il y a une mutation qui s'opère avec un décalage amenant à se rapprocher de l'utilisation du produit. " Toute la chaîne est à repenser en se rapprochant d'un système à flux tendu comme en grande distribution. La LME avec la réduction des délais de paiement appuie ce phénomène. De son côté, InVivo se positionne dans cette configuration réglementaire amenant à privilégier les traitements à vue (lire encadré ci-dessous), et vient de mettre sur pied un nouveau réseau logistique de proximité, E-Ris, pour s'inscrire dans cette mouvance.
Reprise des produits
Mais pour autant, condamner les visites de morte-saison semble une utopie comme l'a souligné Roland Rosseel. En outre, celui-ci tient à préciser que " si tous les agriculteurs devaient retirer leurs produits de désherbage entre le 15 et 25 mars, nous n'aurions pas la capacité de tous les stocker ". L'agriculteur pour s'assurer d'avoir le produit au bon moment peut donc choisir l'achat anticipé. Aussi, dans ce négoce de l'Ain, le programme cultural préétabli est de mise avec des ajustements en saison, et une souplesse dans la reprise des produits. Cette façon de faire n'est pas spécialement antinomique avec l'évolution réglementaire car, en effet, il s'agit de ne pas faire de confusion entre la systématisation des traitements et la visite de morte-saison.
Un bilan de préconisation
En fait, à chaque entreprise de trouver son tempo en fonction de son univers concurrentiel, des habitudes de ses agriculteurs, des productions et de ses propres contraintes. Toutefois, quelques règles peuvent permettre de repositionner l'approche commerciale de l'agriculteur et de préparer en amont la présaison. Consultant chez Form'arc, Jean-Jacques Lavignon insiste de ce fait sur le bilan de préconisation de fin de campagne pour faire le point sur les résultats technico-économiques et le respect des aspects réglementaires et environnementaux. " Ces bilans sont quasiment inexistants à ce jour, commente Jean-Jacques Lavignon. Le management doit être alors promoteur de ces bilans et technicod' un nouveau système d'évaluation des équipes. Le technico-commercial doit être formé à l'écoute et à une démarche de conseil global. "
Gérer les appels d'offres et les achats cadencés
Dominique Cojan et Jacques O'Neill, chez Adepe, appellent à adapter la stratégie commerciale dans un contexte où " l'on se rapproche de plus en plus du mode de fonctionnement du commerce classique : d'un métier technique on passe à un métier à 80 % commercial ". Si la morte-saison a toujours sa raison d'être, notamment pour les petites exploitations et certaines productions, ces deux formateurs-consultants estiment que son amplitude va se réduire pouvant l'amener à glisser vers 40-50 % des commandes, contre environ 70 % à ce jour. " Il va falloir apprendre alors à gérer les appels d'offres, les achats cadencés avec des livraisons étalées. " Et cela, en dehors de la morte-saison, tout comme il est nécessaire aux yeux de ces formateurs qu'une action commerciale soit menée durant toute l'année. " Les TC ne tirent pas forcément bénéfice du suivi technique qu'ils font toute l'année et peuvent s'en trouver dépossédés quand ils arrivent en visite de morte-saison, car un concurrent sera passé par là. "
Hélène Laurandel
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